Jacques Chirac, un Français comme un autre...

par Phileas
mardi 15 mai 2007

Dans un ultime message adressé à la nation française, Jacques Chirac nous quitte. Qu’en retiendrons-nous ? Qu’en retiendra l’Histoire ?

Jacques Chirac a quitté officiellement ses fonctions hier soir par une annonce faite sur les ondes à l’adresse des Français.

Il ne s’est pas levé et ne nous a pas tourné le dos en claquant un « au revoir » prophétique. Il n’a pas attendu qu’une longue maladie s’installe, le montre affaibli, avant de l’emporter.
Il n’a pas non plus commis l’imprudence de remettre son titre en jeu et de mener le combat de trop.
Il est le seul président de la Ve République à être parti de son plein gré, ce qui ne fait pas de lui un héros.

Le personnage aura été jusqu’au bout à la hauteur de sa réputation : un type pataud et sympathique qui aura appris finalement à endosser le costume du haut commis de l’Etat, à manier le code langagier et la gestuelle si particulière à la Cinquième République, qu’inventa le général de Gaulle. Un code fait de haussements de sourcils, de trémolo dans la voix, de mains ouvertes et de bras tendus.

Que retiendra l’Histoire de ce grand séducteur, beau gosse, qui chaussait d’horrible lunettes au début de sa carrière pour être moins glamour ; qui n’était jamais aussi bon que lorsqu’il était en campagne, à la séduction de la France d’en bas dont il n’était pas vraiment issu, mais dont il s’employa avec méticulosité à s’y faire adopter, à coup de rasades de bière, de vin rouge et de gros saucisson ?

Il n’aura pas été un grand résistant faute d’être né trop tard. Il aura été plutôt bon à l’international et le meilleur contre Bush. Vers la fin de son mandat, il se sera confié lui-même plutôt de gauche et critique envers le capitalisme.

Il aura été à l’extérieur un grand défenseur des pays pauvres mais n’aura pas aidé l’Afrique à s’affranchir d’un post-colonialisme où des dictateurs et des margoulins sont toujours à la tête des Etats les plus pauvres grâce à l’aide stratégique de la France.
Il aura créé l’ANPE, mis en place le regroupement familial et aura évoqué les mauvaises odeurs culinaires en parlant des immigrés.
Il aura dissous l’Assemblée nationale alors qu’il y possédait une représentation politique confortable, s’infligeant une cohabitation socialiste alors qu’il était à peine élu.
Il aura toujours refusé les alliances avec le Pen qu’il combattra jusqu’au bout, le privant même d’un débat à l’issue du deuxième tour de 2002.

On retiendra ses frais de bouche à la mairie de Paris de 1977 à 1995, estimés à 4,6 millions d’euros.
Il fut l’homme de la repentance, celui du devoir de mémoire et de la reconnaissance par la France du rôle du gouvernement de Vichy dans la déportation des Juifs pendant le Seconde Guerre mondiale.

Il fut une sorte de don Juan à sa manière : très bon lorsqu’il s’agissait de faire la cours, attendrissant dans ses préliminaires.
Mais lorsque les choses s’étaient installées, il s’avérait être un mauvais coup, un mari et un père plutôt absent (c’est lui qui s’en confia à Drucker), peu attentionné, fragile et défaillant.

Mais c’était peut-être aussi pour cela que certains l’aimaient.

Dix-sept ans de Guignols n’auront jamais réussi à la rendre antipathique même en Super Menteur.

Une page est tournée.


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