Jean-Luc Mélenchon : les discours et les actes

par Jean Dugenêt
lundi 27 août 2018

Jean-Luc Mélenchon dispense beaucoup de leçons de morale à juste titre car, par les temps de corruption que nous connaissons, il y a fort à faire en la matière. Il s’est à ce sujet brillamment illustré, comme beaucoup d’autres, à propos de l’affaire Benalla. Mais, on serait en droit d’attendre un comportement exemplaire de la part d’un si grand donneur de leçons. Or, c’est loin d’être le cas. Nous devons à Christian Schoettl, maire UDI de Janvry dans l’Essonne un épineux dossier à charge contre lui. Dans la vidéo intitulée « Révélations d’un élu local sur Mélenchon » sur YouTube, il émet trois griefs :

  1. Il assure qu'en décembre 2009, Jean-Luc Mélenchon aurait fait "embaucher sa fille Maryline par le Conseil général de l'Essonne" en passant outre "les règles d'impartialités".
  2. En 2004, d'avril à juin, Jean-Luc Mélenchon avait utilisé pendant trois mois un véhicule avec chauffeur du Conseil général alors qu’il n'était plus au Conseil Général. Cela s'apparente à un détournement de fonds public. Suite à une plainte de Christian Schoettl le procureur de la République a signifié un rappel à la loi à Jean-Luc Mélenchon sous la forme d'un avertissement solennel.
  3. Entre 2000 et 2002, lorsqu’il était devenu ministre délégué à l’enseignement professionnel, Jean-Luc Mélenchon n’a quasiment plus mis les pieds au Conseil Général. Mais, plutôt que de démissionner, il a continué à percevoir une indemnité de 2 300 € par mois. Au total c’est 57 500 € d’argent public qu’a perçu le conseiller fantôme.

Jean-Luc Mélenchon n’a pas pu faire interdire cette vidéo qui est diffusée sur YouTube. Maryline Mélenchon a bien essayé puisqu’elle a déposé une plainte en diffamation mais elle a perdu son procès pour vice de forme et elle a été condamnée à verser 1 500 € à Christian Schoettl. Si elle pensait avoir raison sur le fond, elle avait la possibilité d’engager une autre procédure. Son avocate avait annoncé qu’elle allait le faire mais, en fin de compte, elle s’est abstenue. De son côté, Christian Schoettl a réagi en faisant une surenchère. Il ajoute deux griefs à propos de faits qui datent de 1998. Laissons-lui la parole :

  1. « J’ai là une facture adressée en décembre 1998 au Conseil Général par une petite boite de communication événementielle, l’agence Eventissimo, et signée de Mélenchon lui-même. La commande concerne la « conception » artistique d’une carte de vœux, mais sans la fabrication ni l’impression. Cette simple « création » a coûté 94 671 francs soit 18 489 euros aux contribuables essonniens ! Et vous savez qui était la patronne d’Eventissimo ? Je vous le donne en mille : Isabelle Thomas, l’égérie du mouvement étudiant de 1986 contre la loi Devaquet, et animatrice de l’aile gauche du PS avec Jean-Luc Mélenchon. »
  2. « A l’époque, il est chargé de l’information et de la communication au Conseil Général. Il passe commande d’une campagne de relations presse pour vanter les mérites de la Fête de la République à Euro RSCG, l’agence amie des socialistes, que dirigent Jacques Séguéla et Stéphane Fouks. Eh bien, ces 7 journées d’attachée de presse ont coûté 98 972 francs, soit 19 329 euros au conseil général ! Un beau cadeau aux copains ».

Il y a assurément un grand décalage entre les mœurs que Jean-Luc Mélenchon préconise, dans ses discours, pour la classe politique dans son ensemble et celles qu’il s’autorise pour lui-même. Plus récemment, en mai 2018, il s’est mis en contradiction avec ses discours à propos de l’immunité parlementaire. Il s’était en effet prononcé contre cette protection accordée aux députés mais alors qu’il fait l’objet d’une plainte en diffamation d’un journaliste qu’il avait traité « d’assassin terroriste repenti », il refuse de se rendre aux convocations de la justice. Pour cela, bien évidemment, il invoque son immunité parlementaire. (Voir notamment sur YouTube la vidéo : « immunité parlementaire : les contradictions de Jean-Luc Mélenchon »).

Il y a aussi un décalage dans son mode de vie entre ce qu’il souhaite pour “les gens” et ce qu’il se réserve pour lui-même ». Il n’envisage toujours pas de passer le permis de conduire puisqu’il dispose à sa guise de voitures avec chauffeur. Il lui arrive aussi de se déplacer en jet privé. Soyons précis à ce sujet. Le 4 février 2017, il a pris un avion taxi immatriculé ASJ591 pour se rendre à la journée commémorative de l’esclavage à Champagney. Cet avion a décollé du Bourget et il s’est posé sur le tarmac de l’aéroport Bâle-Mulhouse à 10h24. La compagnie AstonJet a publié un document concernant ce vol où on peut voir le nom de Jean-Luc Mélenchon en tant que « lead passenger » (passager principal) suivi des noms de quelques membres de son équipe. Il ne se vante évidemment jamais dans ses discours d’adopter pour lui-même les mœurs de la jet set.

Nous sommes conscients que les admirateurs de Jean-Luc Mélenchon face à ces faits sont souvent bloqués par le phénomène de la dissonance cognitive. Celle-ci survient quand des personnes sont confrontées à une information qui n'est pas cohérente avec leurs croyances. Leur besoin de rétablir une cohérence les amène à rejeter ou à réfuter l’information plutôt qu’à remettre en question leurs croyances et elles recherchent alors le soutien d’autres personnes qui partagent les mêmes croyances. Les croyances partagées par tous les membres d’un groupe deviennent, pour le groupe, des vérités. Il est bon alors de se réconforter entre incrédules. Nous sommes ici dans le cas prototypique signalé notamment sur le site web « La Toupie » : « Les partisans d'un homme politique dont on dénonce des pratiques malhonnêtes ne les croient pas et remettent en cause la bonne foi et l'honnêteté de ceux qui les révèlent. Parfois, ils se censurent mentalement et font comme si les révélations n'avaient jamais existé ». On se souvient d’ailleurs qu’au début de l’affaire DSK ses fans du PS qui soutenaient sa prochaine candidature comme président de la république avaient expliqué qu’il ne pouvait s’agir que d’un complot ourdi par les forces réactionnaires pour se débarrasser de lui. Nous sommes confrontés ici au même phénomène. Les plus agressifs des militants de la France Insoumise considèrent que s’attaquer à leur idole relève d’un extrémisme fanatique blasphématoire. Si les fans de Jean-Luc Mélenchon refusent de regarder la vérité en face, s’ils ont déjà du mal à admettre que la personnalité de leur leader ne correspond guère à l’image qu’il veut donner avec ses discours et son accoutrement vestimentaire alors il leur sera impossible de comprendre qu’ils se font enfumer par lui.

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