L’assaut final de l’UMP sur les 35 heures ?

par Napakatbra
mercredi 21 mai 2008

Patrick Devedjian, lundi matin, a annoncé que l’UMP envisageait le "démantèlement définitif des 35 heures", en l’honneur du dixième anniversaire de cette mesure. Le secrétaire général de l’UMP souhaite que la durée du travail soit négociée contractuellement entreprise par entreprise. Nouvelle boulette ou nouveau coup de boutoir ?

C’est le cheval de bataille de la majorité. Depuis dix ans, les 35 heures sont responsables de tous les maux de la France qui n’en peut plus de ne pas travailler assez. Sarkozy, début janvier l’avait annoncé : "Oui" avait-il répondu à la question d’un journaliste qui lui demandait si l’année 2008 verrait la fin des 35 heures, tout en se rétractant dès le lendemain. Pourtant, pendant la campagne, il avait promis qu’il n’y toucherait pas. Pourtant, il y a quelques mois, il considérait que les 35 heures étaient un "acquis social", qu’il ne fallait pas revenir dessus. Pourtant...

Le pouvoir d’achat dans la ligne de mire


Si le temps de travail n’est plus réglementé, comme semble le souhaiter Patrick Devedjian, alors la monétisation des RTT, ainsi que toutes les mesures sur les heures supplémentaires, tombent à l’eau. Est-ce à dire que cette mesure ne fonctionne pas ? Ou que le secrétaire national de l’UMP ne suit pas les débats ? Car, si Nicolas Sarkozy avait dû fait machine arrière, en janvier, c’est en partie en raison de cette contradiction. Fillon avait déjà fait parler la foudre, fin 2007, en adressant une lettre écrite aux syndicats, dans laquelle la suppression de la durée légale du travail en France était évoquée. Hasard du calendrier, cette lettre était rédigée moins d’un mois après une demande identique du Medef de Mme Parisot.

La réalité du travail des Français

Pourtant, les Français travaillent beaucoup, bien plus que les 35 heures légales, avant comme après l’entrée en vigueur de la loi. Les 35 heures ont par ailleurs permis d’annualiser les temps de travail, donc d’optimiser les charges : les équipements qui étaient utilisés à 50 heures par semaine en 1995 sont utilisés pendant 55 heures depuis 2000. Enfin, la productivité des salariés français est bonne : selon les chiffres du Bureau of Labor statistics (BLS), organisme officiel américain donc peu suspect de socialisme militant ou de francophilie excessive, un salarié français qui occupe un emploi avait produit 71 900 dollars de richesses en moyenne au cours de l’année 2005, moins que les 81 000 dollars par un employé américain, mais plus que les 64 100 dollars d’un Anglais, les 59 100 dollars des Allemands ou encore les 56 300 dollars d’un Japonais.

Négociations à coups de menaces

Supprimer les 35 heures nous ramènerait-il en 1998 ? Bien sûr que non, car les patrons n’ont en aucun cas l’intention de s’asseoir sur leurs "avantages acquis" : flexibilité du temps de travail, allègements de charges sociales (entre 5 et 15 milliards d’euros selon les points de vue). Il s’agit simplement de diminuer le coût du travail : sans durée légale de travail, plus de RTT et plus d’heures supplémentaires. Des cas récents de "renégociations" en attestent : l’usine Bosch de Vénissieux, en 2004. Devant la menace de délocalisation et de licenciement, les salariés ont dû s’incliner, réduire leurs salaires et augmenter leurs cadences de travail. Idem pour Peugeot Motocycles en 2008 et bien d’autres. Un autre exemple, Airbus, qui a annoncé récemment qu’il voulait augmenter le temps de travail... pour réduire ses coûts, dixit Thomas Enders. Il ne s’agit plus de proposer aux salariés des heures supplémentaires, mais d’imposer, avec réduction du salaire, sans compensation. La seule négociation consiste pour le patron de laisser ce choix au salarié : "licenciement ou baisse salariale, tu choisis". Au cas par cas, entreprise par entreprise... à chaque fois que ce genre de situation s’est présentée, les salariés se sont violemment plaints, mais, au final, n’ont pas eu leur mot à dire, ils ont dû signer, quitte à y perdre de l’argent pour ne pas perdre leur emploi. Comment alors oser parler de "négociation" ?

Supprimer la durée légale du travail. Supprimer les allocations chômage. Réduire les remboursements sur les frais de santé. Supprimer le salaire minimum aussi ? Pourquoi pas... En tout cas, ça évite de se poser de vraies questions sur les allègements de charges sociales en série, et sur les niches fiscales qui s’empilent depuis des années, et dont les résultats se font toujours attendre.

Source : Les mots ont un sens...


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