L’étau libyen étouffera-t-il Sarkozy ?

par emile wolf
jeudi 17 mars 2011

Une partie d'échecs réserve toujours des surprises.

Quand Saïf Al-Islam Kadhafi proclame au collaborateur d’Euronews :

« Tout d’abord, il faut que Sarkozy rende l’argent qu’il a accepté de la Libye pour financer sa campagne électorale. C’est nous qui avons financé sa campagne, et nous en avons la preuve. Nous sommes prêts à tout révéler. La première chose que l’on demande à ce clown, c’est de rendre l’argent au peuple libyen. Nous lui avons accordé une aide afin qu’il œuvre pour le peuple libyen, mais il nous a déçu. Rendez-nous notre argent. Nous avons tous les détails, les comptes bancaires, les documents, et les opérations de transfert. Nous révélerons tout prochainement. »
Il porte une très grave accusation contre le Président actuel de la République. Que le démenti de l’Elysée balaie d’un revers. Toutefois quand il s’agit des déclarations officielles le doute vient à l’esprit. Après les Rafales de Lula, les commandes en double de la Chine et les fabuleux contrats libyens démenti par Khadafi le jour même, le pouvoir d’achat et les déclarations sur les retraites intouchables, le bon peuple a toutes les raisons de douter. 
 Si le fils du Colonel exprime une réalité et, comme il le prétend, a l’intention de produire les pièces et documents authentiques justifiant cette affirmation prochainement : le mandat de Monsieur Sarkozy pourrait ne pas arriver à terme.
 
Jugez plutôt :
 
Après l’avis du Conseil Constitutionnel en date du 27 avril 2006, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques prend le 4 mai 2006 une décision relative à la présentation des comptes de campagne en vue de l'élection présidentielle. Celle-ci, publiée sous le n° 107 en page 7827 du J.O n°121 le 25 mai 2006, rappelle aux candidats à l’élection présidentielle les articles du code électoral et notamment la loi n°62- 1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel, modifiée par la loi organique n° 2006-404 du 5 avril 2006. 
 
Ce texte a pour objet d’expliquer les principes et règles administratives à mettre en œuvre dans l’association de financement électorale propre à chaque candidat. Il met également en exergue les lois à ne pas outrepasser . Il précise que seuls les personnes physiques et les partis politiques sont autorisés à faire des dons et que ceux-ci ne peuvent être effectués en espèces au-dessus de 150€ et ne doivent dépassés 4.600 € par donateur par campagne.
C’est-à-dire : si un donateur a l’intention de soutenir deux ou plusieurs candidats, il ne peut globalement donner plus de 4.600€ (dons financiers et dons en nature, hors bénévolat) et ne doit bénéficier de reçus de défiscalisation que pour cette somme globale. Sous peine de sanctions, tout don supérieur à 3 000 EUR doit comporter, au dos du reçu, les nom et adresse du mandataire de l’association de financement électorale.
 
Pour sa part, le montant global des dons reçus en espèces ne peut excéder 20 % du montant des dépenses autorisées par la loi. Pour 2007 ce plafond, prévu par l'article L. 52-11 du code électoral est fixé à 13,7 millions € pour un candidat à l'élection du Président de la République. Il est porté à 18,3 millions d'euros pour chacun des candidats présents au second tour.
 
Sont interdits, en particulier, les dons ou aides matérielles consentis directement ou indirectement par :
- les personnes morales de droit privé ;
- les personnes morales de droit public (Etat, collectivités territoriales, établissements publics...) ;
- les personnes morales de droit étranger et les Etats étrangers (5e alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral) ;
- les syndicats et les mutuelles ;
- les associations autres que celles ayant la qualité de parti politique au sens de la loi n° 88-227 du 11
mars 1988.
 
Rien ne s’oppose à ce qu’un ressortissant de nationalité étrangère soit donateur dans le cadre de la loi. En revanche, aucune personne physique ne peut, en application des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral, accorder de prêts ou avances remboursables aux candidats.
 
C’est dire que l’Etat Libyen ne peut intervenir directement ou indirectement pour soutenir un candidat et que l’association de financement de celui-ci ne peut, légalement, recueillir un tel financement, même en le mentionnant, dans sa compatibilité.
Eric Woerth vous le confirmera : une telle comptabilité fait l’objet d’une vérification par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. De la vérification de cette juridiction, issue de la Cour des Comptes, dépend la décision du Conseil Constitutionnel de reconnaître le bien-fondé et le montant du remboursement du Trésor Public à l’intéressé, dans le cadre de sa mission de contrôle des résultats électoraux.
 
S’il est plausible, le prétendu financement de l’Etat Libyen tel que le définit le fils du colonel est donc tout à fait contraire à la loi électorale. Il mettrait en cause les deux parties vis-à-vis de la justice française. Il est en contravention avec l’alinéa l’article L 52-4 si l’opération a eu lieu hors de la période prévue et, sans réserve, avec les articles L.52- 12 et 42-13 et l’alinéa 5 de l’article L. 52-8 du code électoral. Il entre alors dans le champ d’application des articles 113-1 dudit code pour le candidat et L. 113-2 pour le donateur :
L 113 :
« I. - Sera puni d'une amende de 3 750 euros et d'un emprisonnement d'un an, ou de l'une de ces deux peines seulement, tout candidat en cas de scrutin uninominal, ou tout candidat tête de liste en cas de scrutin de liste, qui : 
1° Aura, en vue de financer une campagne électorale, recueilli des fonds en violation des prescriptions de l'article L. 52-4 ;
2° Aura accepté des fonds en violation des dispositions de l'article L. 52-8 ou L. 308-1 ;
3° Aura dépassé le plafond des dépenses électorales fixé en application de l'article L. 52-11 ;
4° N'aura pas respecté les formalités d'établissement du compte de campagne prévues par les articles L. 52-12 et L. 52-13 ;
5° Aura fait état, dans le compte de campagne ou dans ses annexes, d'éléments comptables sciemment minorés ;
 
 « II. - Sera puni d'une amende de 3 750 euros et d'un emprisonnement d'un an, ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura, en vue d'une campagne électorale, accordé un don en violation des dispositions de l'article L. 52-8.
Lorsque le donateur sera une personne morale, les dispositions de l'alinéa ci-dessus seront applicables à ses dirigeants de droit ou de fait. »
 
Non content, s’il apparaît après le décompte final que les dépenses de la campagne dépassent le plafond autorisé par la loi (18,3 millions € pour les candidats du second tour) l’infraction entre alors dans le champ de l’article L.118-3 : « Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14 (la Commission nationale des comptes de campagne) , le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales.
Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie, ou relever le candidat de cette inéligibilité.
Si le juge de l'élection a déclaré inéligible un candidat proclamé élu, il annule son élection ou, si l'élection n'a pas été contestée, le déclare démissionnaire d'office.  »
 
C’est alors une invalidation pure et simple qui guetterait le Président en exercice. Toutefois il conviendrait pour cela que Saif al Islam produise les preuves indiscutables de la participation indirecte libyenne et du transfert de fonds au candidat Sarkozy puisque celle-ci n’existe pas sur le compte de campagne de l’association de financement http://www.legifrance.com/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000017847611&dateTexte=#.
Il apparaît toutefois que cette campagne a couté 21 038 893 euros selon les comptes publiés au J.O n°0008 du 10 janvier 2008 en page 574, et que le candidat a bénéficié d'une recette 21 251 277 euros, constitués de 11 103 000 euros d'apport personnel lesquels incluent les 153.000 Euros d’avance de l’Etat. C'est clair : la campagne ayant dépassée le plafond autorisé, en cas de malversation établie, l’article 118-3 serait applicable et les opposants débarrassés de Sarkozy par son ami Khadafi. Un comble pour celui qui veut la peau de l'autre !
 
Le financement personnel du candidat Sarkozy représente 10 950 000 €, soit plus de 50% du coût. Un montant qui étonne connaissant la déclaration de patrimoine du candidat dont la fortune s’élève approximativement à 2 millions d’euros. Elle n’a pourtant nullement surpris la commission de contrôle même si la Cour des comptes était présidée par feu Monsieur Seguin qui révéla l'affaire des sondages commandés illégalement par l'Elysée.
 
Pourtant quelle banque prêterait une telle somme avec pour seule garantie une assurance-vie d’une valeur de 1 860 466,48 € à fin 2006, quand le client est déjà caution à hauteur de 34% d’un prêt de 7 millions de francs (360.000€) pour le rachat de clientèle d’un cabinet d’avocats dont il est associé ?
 
 Il y a là un tour de force financier qui nécessite une solide caution et possiblement un prêt privé indirect qu’il conviendrait d’éclaircir en toute sérénité.
 
Alors, bien sûr, vient à l’esprit que la société Générale qui gère les comptes de Monsieur Sarkozy possède une filiale au Liban, la Société Générale de Banque du Liban. Cette filiale est membre de l’association des Banques du Liban. Les spéculateurs de tout bord ont tôt fait de suspecter, la Bankmed de la famille Hariri, ces gentils hôtes qui héberge la famille nécessiteuse de J.Chirac dans 396 m² parisiens.
 
Des suppositions indignes ayant pour seul étai, les déclarations au JDD, de Monsieur Takieddine, l’un des intermédiaires libanais dans l’affaire des frégates saoudiennes qui, avant d'aller chercher ses honoraires à Tripoli la semainedernière, aurait reçu de celle-ci le règlement des commissions afférentes que lui avait confisquées Chirac .
 
Pure spéculation ! Pourquoi la Bankmed aurait-elle cautionné l’emprunt du candidat Sarkozy avec les devises de l’ami Mouammar désireux de s’acheter une virginité ? Mystère et spéculations. 
 
Comment imaginer l’intègre Président s’abandonner à la compromission et aux rétro-commissions sur des ventes d’armes par amour du pouvoir ? Allons, allons. Soyons sérieux ! Même si d’autres enragés affirment que ceci expliquerait l’oreille bienveillante de Nicolas pour les turpitudes parisiennes du bourgmestre Chirac et la générosité contrainte du RPR qui épongea 75% de l’ardoise non prescrite ! Ce sont des calomnies, vous dis-je. Souvenez-vous de l’affaire Clearstream et des crocs du boucher.
 
C’est pourquoi il est préférable d’attendre les pièces à convictions promises par Saif al Islam pour se faire une opinion sur cette situation peu claire.

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