L’Europe de De Gaulle à... François Hollande, sur le chemin des Amériques

par redrock
mercredi 23 avril 2014

Chaque jour qui passe voit l'Europe s'effacer devant l'éléphant américain et grossir la crise Ukrainienne. Le nouveau rideau de fer se lève à l'Est et renvoie toujours plus l'UE dans les bras de l'oncle SAM et son PACS de TAFTA (PTCI ou grand marché transatlantique).

De Gaulle avait bien senti le danger. Hélas la clairvoyance n'a pas été le point fort des présidents qui lui ont succédé.

De Gaulle, l’Europe et les Américains…

Indépendance nationale : la France, puissance tierce entre USA et URSS

Dès la Libération, le Général de Gaulle ne voulut pas se ranger dans une politique d’alignement atlantique systématique. Pour lui, la France, entre l'Amérique et la Russie, devait être « un lien et non pas un enjeu ». Il précise dans un message public du 17 novembre 1945 qu'il fallait mener : « une politique française d'équilibre entre deux très grandes puissances, politique que je crois absolument nécessaire pour l'intérêt du pays et même pour celui de la paix. »

Retrait de la structure militaire de l’OTAN

Le 7 mars 1966, Maurice Couve de Murville remit à l'ambassadeur américain Charles Bohlen une lettre manuscrite du général de Gaulle au président Johnson. Il lui annonçait que la France, sans dénoncer le traité instituant l'Alliance atlantique, avait décidé « de recouvrer sur son territoire l'ancien exercice de sa souveraineté, actuellement entamée par la présence permanente d'éléments militaires alliés ou par l'utilisation habituelle qui est faite de son ciel, de cesser sa participation aux commandements intégrés et de ne plus mettre de forces à la disposition de l'OTAN. » États-majors, services et forces de l'OTAN avaient un an pour évacuer leurs 30 bases militaires, leurs 27 000 soldats et leurs 37 000 employés civils.

http://www.charles-de-gaulle.org/pages/l-homme/dossiers-thematiques/de-gaulle-et-le-monde/de-gaulle-et-les-etats-unis/analyses/le-general-de-gaulle-et-les-etats-unis.php

On peut rappeler ici que c’est Mitterrand qui accepta de revenir ponctuellement sous bannière et commandement intégré de l’OTAN lors des interventions militaires en ex Yougoslavie ; C’est Sarkozy qui, lance la procédure de réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN mettant fin le 17 mars 2009 à la décision de sortie du Général, 43 ans après, à 10 jours près

Le couple Franco-Allemand, un ménage à trois ?

Le général De Gaulle est à l’origine du Traité de l’Elysée suite à un contact direct avec Adenauer ; Il s’agit de consolider les relations de travail et la gouvernance entre les deux nations du couple Franco-Allemand, architecte de la construction européenne. Il s’agit pour le Général de traduire dans les pratiques des exécutifs une réelle coopération et une coordination interministérielle dans les domaines des Affaires étrangères, de la Défense, de l’Éducation et la Jeunesse.

À la suite de la déclaration commune du président de la République française et du Chancelier de la République fédérale d’Allemagne en date du 22 janvier 1963, sur l’organisation et les principes de la coopération entre les deux États, les dispositions suivantes ont été agréées dans le Traité de l’Elysée .

http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_l%27%C3%89lys%C3%A9e

signature du traité de l'Elysée

Le Bundestag ratifie le Traité mais rappelle dans le Préambule quels sont les buts principaux de l’Allemagne :

PRÉAMBULE À LA LOI PORTANT RATIFICATION DU TRAITÉ FRANCO-ALLEMAND VOTÉ PAR LE BUNDESTAG (Bonn, 15 juin 1963)…

« Manifestant la volonté de diriger l’application de ce traité vers les principaux buts que la République fédérale d’Allemagne poursuit depuis des années en union avec ses autres alliés et qui déterminent sa politique, à savoir :

  • le maintien et le renforcement de l’Alliance des peuples libres et, en particulier, une étroite association entre l’Europe et les États-Unis d’Amérique,
  • l’obtention du droit d’autodétermination pour le peuple allemand et le rétablissement de l’unité allemande
  • la défense commune dans le cadre de l’Alliance de l’Atlantique nord et l’intégration des forces armées des États membres du pacte
  • l’unification de l’Europe selon la voie tracée par la création des Communautés européennes, en y admettant la Grande-Bretagne et les autres États désirant s’y joindre et le renforcement des Communautés existantes
  • l’abaissement des barrières douanières par des négociations entre la Communauté économique européenne, la Grande-Bretagne et les États-Unis d’Amérique, ainsi que d’autres États, dans le cadre du GATT… »

Il s’agit là d’une affirmation très claire de la volonté géopolitique allemande de s’inscrire dans un projet européen atlantiste à l’opposé de la vision gaullienne.

Trois ans plus tard, De Gaulle ne pouvait que constater amèrement que l’Allemagne avait privilégié le lien Atlantique plutôt que le couple Franco-Allemand.

« Ce n'est pas notre fait si les liens préférentiels, contractés en dehors de nous et sans cesse resserrés par Bonn et Washington, ont privé d'inspiration et de substance cet accord franco-allemand. »28/10/66

De Gaulle et l’Impérialisme américain

L’extrait ci-dessous est tiré du tome 2 de l’ouvrage « C’était de Gaulle », d’Alain Peyrefitte, paru en 1997 chez Fayard (Editions de Fallois), page 17, janvier 1963.

« Le grand problème, maintenant que l’affaire d’Algérie est réglée, c’est l’impérialisme américain. Le problème est en nous, parmi nos couches dirigeantes, parmi celles des pays voisins. Il est dans les têtes. »

Après le Conseil, le Général me dit : « Les Européens n'auront pas recouvré leur dignité, tant qu'ils continueront à se ruer à Washington pour y prendre leurs ordres. »

« On a donc vu nombre d'esprits, souvent d'ailleurs valables et sincères, préconiser pour l'Europe, non point une politique indépendante, qu'en vérité ils n'imaginent pas, mais une organisation inapte à en avoir une, rattachée dans ce domaine, comme dans celui de la défense et celui de l'économie, à un système atlantique, c'est-à-dire américain, et subordonnée, par conséquent, à ce que les Etats-Unis appellent leur « leadership » »

« Bien entendu, on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant « l'Europe ! », « l'Europe ! », « l'Europe ! » mais cela n'aboutit à rien et cela ne signifie rien.(décembre 65) ».

Cette méfiance du Général par rapport à nos alliés américains et son irritation envers l’atlantisme excessif-selon lui-d’une partie des élites françaises n’étaient vraiment pas partagées par l’un de ses successeurs, Valery Giscard d’Estaing.

French American Foundation : FAF

Valery Giscard d’Estaing trouvait sans doute que la France n’était pas assez proche du Rêve Américain. Aussi lança-il-en mai 1976 l’idée de la Création de la French-American Foundation, à Washington, en compagnie du Président américain Ford et du Secrétaire d’Etat Kissinger. On se souviendra que cette période a été une période de doute pour le camp occidental : choc pétrolier, guerre du Kippour, interrogation sur le modèle de développement et la croissance avec le Club de Rome, défaite militaire des Américains au Vietnam. C’est en 1973 que se crée d’ailleurs la Commission Trilatérale à l'initiative des principaux dirigeants du groupe Bilderberg et du Council on Foreign Relations, parmi lesquels David Rockefeller, Henry Kissinger et Zbigniew Brzezinski

http://fr.wikipedia.org/wiki/French-American_Foundation

Les textes officiels de la FAF définissent sa mission : « L’objectif de la Fondation franco-américaine est de renforcer la relation franco-américaine considérée comme un élément essentiel du partenariat transatlantique. »

Adoubement des « Young Leaders »

Une des activités de la FAF consistent à sélectionner chaque année une liste de vingt « Young Leaders », dix français et dix américains, pour leur capacité à renforcer le partenariat transatlantique et leur potentialité à jouer des rôles de premier plan dans leurs pays respectifs. Les futurs Young Leaders doivent justifier de leurs qualités et de leurs ambitions lors d’entretiens avec des responsables de la Fondation. Ils doivent donc justifier d’un atlantisme bien marqué. Les milieux ciblés sont la Politique, les Medias, l’Université, l’Economie.

Voilà qui justifie largement le constat du Général de Gaulle rappelé plus haut : .« Le grand problème, maintenant que l’affaire d’Algérie est réglée, c’est l’impérialisme américain. Le problème est en nous, parmi nos couches dirigeantes, parmi celles des pays voisins. Il est dans les têtes. »

young leaders de choc

La liste des Young Leaders français recrutés depuis est assez éloquente et explique dans une large mesure la Genèse de ce que l’on appelle communément : « la Pensée Unique ».

  • Young Leaders français recrutés à gauche :

Frédérique Bredin, François Hollande, Anne Lauvergeon, Bruno Le Roux, Arnaud Montebourg, Aquilino Morelle, Pierre Moscovici, Alain Richard, Marisol Touraine, Najat Vallaud-Belkacem, Fleur Pellerin

  • Young Leaders français recrutés à droite :

Nicolas Bazire, Jérôme Chartier, Yves Censi, Alain Juppé, Nathalie Kosciusko-Morizet, François Léotard, Emmanuelle Mignon, Eric Raoult, Valérie Pécresse, Laurent Wauquiez, …Nicolas Dupont Aignan

  • Young Leaders dans les médias :

Alexandre Bompard, Hedwige Chevrillon, Jérôme Clément, Annick Cojean, Jean-Marie Colombani, Emmanuel Chain, Matthieu Croissandeau, Louis Dreyfus, David Fontaine, François Dufour, Stéphane Fouks, Bernard Guetta, Sylvie Kauffmann, Yves de Kerdrel, David Kessler, Laurent Joffrin, Philippe Manière, Dominique Nora, Olivier Nora, Christine Ockrent, Denis Olivennes, Pascal Riché, Thierry Pfister, Mathieu Pigasse, …

  • Young Leaders économistes :

Philippe Askenazy, Guy Sorman, …

  • Young Leaders dans la finance : Bertrand Badré, Henri de Castries, Hakim El Karoui, Pierre Mariani, Alain Minc, Mathieu Pigasse, …
  • Young Leaders dans l’université :

Eric Fassin, Jean-Noël Jeanneney, Yves Lichtenberger, …

  • Young Leaders français 2013
  • Julien Aubert, député [UMP] du Vaucluse, Assemblée nationale
    Jérôme Chapuis, rédacteur en chef adjoint, RTL
    Benoît Claveranne, directeur général, AXA Prévoyance et Patrimoine, AXA France
    Matthias Fekl, député [PS] de Lot-et-Garonne, Assemblée nationale [rapporteur de la loi sur le mariage homosexuel, ndlr]
    Caroline Flaissier, Director of Procurement and Portfolio Management, TOTAL Énergie Gaz
    Renaud Guidée, Executive Director, Goldman Sachs
    Vincent Menuet, Head of Contracts and Marketing, Customer Services, Airbus
    Capitaine de frégate Philippe Naudet, commandant le sous-marin nucléaire d’attaque Améthyste
    Estelle Pietrzyk, directrice, Musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg
    Silvano Sansoni, Director of Public Sector, IBM France
    Vanessa Scherrer, directrice adjointe, École des affaires internationales, Sciences Po Paris
    Leslie Serrero, Vice-President Operational Marketing, Christian Dior Couture
    Myrto Tripathi, New Builds Reactors, Offer Director, AREVA.
  • Young leaders 2012 :

La Trilatérale est une organisation atlantiste trés influente dans les milieux politiques européens

Liste de membres français de la Trilatérale

En lien avec la FAF et l’atlantisme, il est intéressant de noter l’influence de la Trilatérale sur les élites politiques françaises.

Membres français actuels ou passés de la Trilatérale  : VGE, Barre, Delors, Trichet, Guigou, Copé, Adler, Moïsi, Beytout, Patrick Devedjian, Laurent Fabius, Dominique Strauss-Kahn, Pierre Lellouche et François Bayrou font ou ont fait partie de la Trilatérale.

Voici la liste du bureau exécutif actuel de la Trilatérale.

JEAN-CLAUDE TRICHET European Chairman ; VLADIMIR DLOUHY European Deputy Chairman ;

MICHAEL FUCHS European Deputy Chairman ; PETER SI THERLAND European Honorary Chairman ;

JOSEPH S. NYE, JR. North American Chairman ; JIM PRENTICE North American ; Deputy Chairman ;

JAIME SERRA North American Deputy Chairman ; DAVID ROCKEFELLER Founder and Honorary Chairman ;

GEORGES BERTHOIN European Honorary Chairman ; YASUCHIKA HASEGAWA Asia Pacific Chairman ;

HONG SeokHyun Asia Pacific Deputy Chairman ; JUSUF WANANDI Asia Pacific Deputy Chairman ;

MARIO MONTI European Honorary Chairman, PAUL A. VOLCKER North American Honorary Chairman ;

On peut lire une étude plus complète ici.
 

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