L’honneur d’Isabelle Maurer

par Michel DROUET
lundi 14 octobre 2013

Le propre des émissions de débats politiques, c’est que l’invité arrive fréquemment à débiter son discours avec plus ou moins de bonne foi et est rarement mis en difficulté.

L’autre jour, c’était J.F. Copé qui était l’invité sur la deux de l’émission « Des paroles et des actes » et on s’attendait, connaissant le personnage, à quelque chose de fade, assaisonné de plus ou moins de mauvaise foi. Les communicants étaient passé par là et l’émission s’annonçait comme décrite, c'est-à-dire sans intérêt majeur.

Sauf que… Isabelle Maurer, demandeuse d’emploi, est venue gripper la belle machine et que pendant dix minutes, M. Copé a été totalement laminé par la présence, l’entrain, la conviction, le culot et le bagout d’Isabelle.

http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet_-Des-paroles-et-des-actes-Isabelle-Maurer-et-Jean-Francois-Cope_43225-2237844_actu.Htm

Sur le plateau, une bête politique rompue à l’exercice qui n’a pas de soucis de fin de mois et en studio quelqu’un qui n’avait plus rien à perdre et qui a profité de ce temps de parole pour mettre Copé au pied du mur.

Problèmes de fin de mois, fichage à la Banque de France, minima social comme seul revenu, regard des enfants dans les grandes surfaces, le rouleau compresseur Maurer a confisqué la parole au brillant Copé en décrivant avec passion sa situation et ses problèmes de fin de mois.

Pujadas a fort opportunément rappelé à Mme Maurer le projet de Copé pour les demandeurs d’emploi, à savoir réduire les allocations chômage afin de les inciter à reprendre un travail, comme si les chômeurs pouvaient être soupçonnés d’être des fainéants vivants aux crochets de la société. L’explosion indignée d’Isabelle Maurer (« il n’y a pas d’offres d’emplois ») à été à la mesure du cynisme de Copé, convaincu du bien fondé de sa proposition comme d’habitude.

Autre moment formidable pendant cet échange, le discours de Mme Maurer sur la multiplicité des interlocuteurs (C.A.F., Pôle emploi, Département) auxquels ont affaire les demandeurs d’emploi, avec une réponse imbécile de Copé : la fusion des trois organismes, nouveauté programmatique, sans doute de l’UMP qui se contentait jusqu’à présent de réclamer uniquement la fusion de la Région et du Département. On aura compris que Copé, débordé par un interlocuteur pugnace essayait de combler les fissures comme il le pouvait, c'est-à-dire en racontant n’importe quoi.

N’importe quoi ?

Peut-être pas tout à fait. Il y a une cohérence politique dans tout cela. En fait les éléments de programme présentés par différents ténors de l’UMP, peut s’assimiler au fameux rasoir à trois lames : la première lame attaque les indemnités chômage (proposition Copé), la seconde lame (Wauquiez) taille dans les minimas sociaux et réclame que les bénéficiaires soient soumis aux travaux d’intérêt général, ce qui prépare le terrain à la troisième lame (Ciotti), toujours prêt à embastiller ceux qui sortiraient du droit chemin.

En fait on assiste de manière sournoise au déplacement de la qualification de chômeur vers celle de délinquant en puissance, exclus de la société de leur faute, bien sûr.

Après avoir dénoncé le coût du travail, le coût du chômage, ces « ténors » de l’UMP dénonceront-ils le coût du capital, c'est-à-dire le rendement exigé par les actionnaires qui met à genoux notre économie ? Non, ce n’est pas dans leur culture. Ils préfèrent s’attaquer aux plus faibles et les culpabiliser.

C’est cela qu’Isabelle Maurer à mis enfin en évidence, mieux que toutes les interventions des économistes et journalistes policés, bien dans la ligne.

Pour tout cela, je vous salue bien bas, Madame Isabelle Maurer.

 


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