La TVA sociale, ou comment éviter volontairement l’hégémonie !

par Georges Yang
mardi 19 juin 2007

On a trop parlé de chambre bleue, totalement bleue, mais une victoire plus modeste de l’UMP serait la bienvenue pour rester crédible. Le meilleur moyen d’y parvenir était de relancer le thème de TVA sociale entre les deux tours des législatives. Avec ce stratagèm, la majorité va réussir à perdre quelques dizaines de sièges et faire croire qu’elle est encore démocratique !

Comment perdre intelligemment quelques sièges dont personne n’a besoin, sauf les quelques malheureux sous-fifres qui pensaient être élus les doigts dans le nez il y a encore cinq jours ? Les conseillers de Nicolas Sarkozy ont très vite compris qu’une victoire écrasante aux législatives avait un relent de république bananière. On ne pouvait cependant demander à des candidats UMP arrivés en première position au premier tour de se retirer alors qu’il n’y avait même pas de Front national présent en triangulaire. Le système électoral, avec l’obligation d’avoir au moins 12.5 % des inscrits pour se maintenir au second tour, ne permet pas ce subterfuge. Il faut donc un nombre de socialistes suffisamment décent pour faire croire à la fable d’une opposition utile au débat politique.

Le débat sur la TVA sociale aurait attendu la victoire d’après deuxième tour, si l’UMP n’avait espéré que 300 élus à tout casser. On l’aurait ressortie au mois d’août à coup de 69.3 ! Mais avec la déferlante prévisible, il faut tout faire pour perdre un peu et montrer sa bonne volonté. Une république décente ne peut se permettre 500 élus sur 577 ! Et puis, si quelques villepiniens ou chiraquiens restent sur le carreau, ce ne sera pas un drame, loin de là. L’intelligence en politique, et ce depuis Machiavel, est de ne pas trop humilier l’adversaire, sauf quand on est sûr de l’éradiquer pour de bon. Il ne faut jamais frapper l’homme à terre, sauf si l’on est certain qu’il ne se relèvera jamais. Avoir un petit adversaire faiblard et peu offensif est nettement plus payant que de ne pas avoir d’adversaire du tout !

Et puis, malgré les résultats calamiteux du MoDem, Bayrou reste le véritable adversaire de Sarkozy pour 2012. Maintenir la tête hors de l’eau au Parti socialiste peut se montrer payant en vue d’une réélection dans cinq ans. L’idéal étant de battre un socialiste au second tour et ainsi éviter Bayrou, nettement plus dangereux dans un affrontement frontal. Car le PS n’en a pas fini de ses querelles internes, à moins de trouver, comme sorti d’un chapeau, un ou une candidate présentable et éligible. L’intérêt de Sarkozy est donc la survie des socialistes. L’intérêt de la droite serait un nouveau Villepin ou Chirac, avec trente ans de moins et sans gamelles. Sarkozy fera tout pour que cet homme providentiel n’apparaisse pas pour lui damer le pion. Il a déjà supprimé l’hypothèse d’un président de parti ayant les mêmes pouvoirs que lui avant la présidentielle de 2007. Il noyaute la droite de façon très subtile.

Plus de Front national, quasiment plus de Parti communiste, des altermondialistes à la ramasse... il devient donc impératif de se garder un meilleur ennemi. Les socialistes sont les moins dangereux et les plus utiles et en plus ils font tout pour ne pas gagner.

Reste donc deux tâches essentielles pour Sarkozy, éliminer Bayrou pour de bon en évitant de le pousser à la grève de la faim (ce qui le rendrait populaire) et tout faire pour empêcher l’émergence d’un opposant interne. Et pour cela rien de tel que des socialistes divisés mais encore vivants.

Il a cinq ans pour y arriver. Comment va-t-il faire sans trop se démasquer ?

Il peut déjà compter sur les socialistes pour l’y aider. Quasiment tous n’ont qu’une envie, celle de dégommer la Dame en blanc. Ceux qui n’y pensent pas trop ne songent qu’à envoyer Hollande se présenter au Plat Pays, c’est-à-dire dans une circonscription du Nord-Pas-de-Calais aux prochaines législatives.

Fabius et Strauss-Kahn vont s’entredéchirer jusqu’à disparition. Valls et Montebourg viseront 2017 s’ils ont l’intelligence d’attendre leur tour avec une chance de succès.

Il reste juste la « petite » Clémentine Autain pour réunir les partisans du non au référendum, les derniers communistes, les trotskistes et les bovésistes. Pas de quoi gagner une élection, mais suffisamment pour créer une véritable opposition à gauche qui ne soit pas totalement ridicule.

Quant à plus à droite, ni De Villiers, ni Mégret ni J.-M. Le Pen ne sont en position pour représenter politiquement quelque chose. Reste la fille Marine, mais on n’est pas en Italie et elle ne pourra fonder un parti de droite acceptable avec un peu de repentance pour se faire accepter. Sarkozy pour l’instant est au zénith, il reste cinq ans pour espérer le voir chuter. Seul le Béarnais semble pouvoir y arriver, mais c’est encore loin d’être gagné pour lui à ce jour.


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