Lang annule

par LM
mardi 3 octobre 2006

Tandis qu’on apprenait que tous les frères de Ségolène ne posent pas que des bombes, battling Jack jetait l’éponge, hier, au 20 heures de PPDA, dans un style très jospinien.

Le mystère socialiste s’éclaircit de jour en jour. Par ordre d’apparition à l’écran des prétendants, nous avions Ségolène, en tailleur et sondages-plébiscites, partie très tôt et archifavorite encore pour beaucoup ; puis nous avons eu le vrai faux retour de Jospin, ému ou presque et finalement dégonflé, comme d’habitude. Dans la foulée, DSK, qui a tout le soutien de ce dernier, s’ajoutait à l’attelage, histoire de donner un peu plus de vitesse à la diligence rose. Fabius, toujours opportuniste, le plus arriviste de tous, ex-jeune prometteur, carriériste à mort, imbu et aussi à gauche que Mitterrand, ne pouvait laisser passer l’occasion de ralentir l’équipage en entrant à son tour dans la danse.

Et donc, hier soir, Jack Lang, cultureux people, prince de la fête et des défilés revendicateurs (quoi qu’ils revendiquent d’ailleurs) était venu dire sa bonne nouvelle à PPDA, droit dans son costume, le lifting tendu, le cheveu précis et la phraséologie ampoulée, comme à son habitude quand il prend la parole pour ne rien annoncer. Candidat, il était battu d’avance, lui qui se retrouvait isolé depuis le déballonnage de Jospin. Ce dernier, s’il avait poussé jusqu’au bout sa logique de retour, aurait en profondeur divisé le parti, affaibli considérablement Royal, et aurait, dans le marasme consécutif, sans doute permis à Lang de dépasser pour une sorte de solution de « sagesse » de « juste milieu », le genre de position qu’affectionne depuis tout le temps Jack le fêtard, qui n’a jamais été choisi que lorsqu’il n’y avait pas d’autre choix, justement.

Jospin planté sur la ligne de départ, Jack n’avait plus d’allié par défaut. Lionel soutenait immédiatement DSK, comme prévu, et Jack se retrouvait dépourvu,condamné à n’être qu’un second couteau, comme Fabius. Mais Fabius, lui, n’en a rien à faire de n’être qu’un second couteau, lui n’est pas discipliné, lui n’a jamais accepté de rentrer dans le rang, lui préfère diviser à mort plutôt que d’accompagner les collègues. Jack, lui, l’a dit et redit à Poivre, s’il renonce, c’est parce que « son ami » François Hollande, qu’il a « rencontré à plusieurs reprises », « même ce matin », lui a demandé, en toute « amitié » pour ne pas « ajouter de la division à la division » de renoncer à sa candidature. Autrement dit, de rentrer à la niche et de se tenir à carreau. Ce que Jack a accepté, sans trop grogner apparemment. Sans doute parce que, derrière Hollande se cache Royal, et derrière Royal se cache l’éventualité d’un succès et peut-être de quelque strapontin ministériel à saisir.

Candidat, Lang n’avait aucune chance d’aller au bout, ex-futur-candidat, il a de grandes chances de finir ministre. Mais Lang peut aussi choisir Strauss-Kahn, ce qui ne serait pas forcément une idiotie. Soutenu par Jospin,ce qui n’est pas rien, DSK a plus que les moyens de brouiller les cartes « royalistes ». DSK, qui dans l’immédiat mène son zodiaque intelligemment, sans tomber dans le « Tout sauf Ségolène », sans refuser le débat, sans se positionner par rapport aux autres, mais plutôt en fonction de son propre programme. DSK peut-être, Ségolène pourquoi pas, mais ce qui est acquis, c’est que Lang ne jouera pas la carte Fabius. Ce dernier, isolé au sein même du parti, est déjà battu.

Il est donc là, ce bon Jack, assis bien sage, devant deux niches, différentes mais toutes deux accueillantes. Dans l’insistance qu’il a mis à citer plusieurs fois le rôle décisif de Hollande dans son choix de ne pas y aller, on peut deviner un rapprochement de festive Jack vers Ségolène, mais rien n’est sûr. Il y a peut-être de la manœuvre dans l’air, un appel du pied à DSK, du style « si tu veux que je te soutienne, fais comme Hollande, parle-moi en ami, et on verra. » Jospin a déclaré qu’il ne serait pas « celui qui divise », et soutenu dans la foulée Strauss-Kahn, sous-entendant que ce dernier, également, ne souhaitait pas diviser mais gagner. Lang a de la même façon déclaré qu’il ne serait pas « celui qui divise », en saluant dans la foulée l’intervention de son « ami » François Hollande, avant de préciser qu’il ne « s’était pas arrêté sur le nom du candidat qu’il allait soutenir ». En face de lui, TF1 avait projeté les images des trois « seuls » prétendants officiels : DSK, Royal et Fabius, on s’attendait presque que PPD demande à l’ancien ministre « d’appeler pour le candidat de son choix », comme dans les jeux télé.

Hier, c’était au tour de Lang de sortir du château. Au nom de François Hollande, premier secrétaire maritalement non candidat, au nom d’une certaine idée de l’obéissance, ou d’une bonne part de lucidité. Il va maintenant attendre que la manivelle lui revienne, et voir qui l’actionne le plus, de Ségolène ou de Dominique. Qui est le plus prompt à le flatter jusqu’à ce qu’il grogne de plaisir... Jack,désormais, attend son maître. Ou sa maîtresse. Mais le plus « langien » hier soir, c’était la fin du discours de non-candidature, quand emphatique Jack s’est fendu d’un petit laïus droit de l’hommiste au sujet d’un français « innocent » détenu en Iran. Lang demanda alors à l’Iran de le libérer sur le champ, et d’envoyer ainsi « un signe fort d’amitié au peuple français », une demande qu’il joignait à celle qu’avait déjà formulé Jacques Chirac. C’est tout Lang ça : refuser les petits fours, mais garder le carton d’invitation. On ne sait jamais.


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