Le carburant du FN c’est aussi la 5e République !

par syd93
mercredi 26 juin 2013

La 5e République devait apporter de la stabilité, permettre des choix clairs, moraliser les pratiques politiques. Le résultat de la législative partielle de Villeneuve Sur Lot ce dimanche démontre une seule et unique chose : sa mort clinique. Imaginez un peu. Les électeurs devaient se prononcer sur fond de scandale politique majeur. Ils devaient voter UMP pour faire barrage au FN s’ils étaient de gauche. Le candidat de la droite extrême, pour battre celui de l’extrême droite, devait compter sur des électeurs d’habitude adversaires. A n’y plus rien comprendre en vérité ! Quant à la morale dans tout cela, elle se baladait quelque part entre la peste et le choléra. A Villeneuve Sur Lot ce week-end, rien n’était clair, rien n’était moral, tout était instable. Depuis, les deux partis moteurs de cette 5e République jouent au jeu du « c’est pas moi, c’est lui ». Les Solfériniens du PS clament que le fautif c’est Cahuzac, c’est Barroso, c’est l’UMP qui banalisent le FN. L’UMP rétorque que le fautif c’est le PS et ses électeurs qui n’ont pas joué le jeu du Front Républicain ou d’un Hollande qui accroît la crise avec sa politique. Sauf que les affaires ils y sont englués tous les deux. Tout comme ils préconisent ensemble l’austérité, la règle d’or et l’intégration dans une Europe dirigée par Barroso. Ce faisant, ils accréditent le mot d’ordre du FN selon lequel l’UMP et le PS c’est pareil. Ce faisant ils rendent possible la quasi élection d’un très jeune homme et très incompétent candidat du FN qui a pour seul programme le rejet de ce que son appareil appelle le « système UMPS« . Dès lors, Il convient de s’interroger en urgence sur les raisons qui rendent valides aux yeux de beaucoup d’électeurs cette thèse du FN plutôt que d’essayer d’éteindre un incendie toujours plus vif, toujours plus dangereux, au moyen d’un misérable sceau d’eau qui porte le nom de Front Républicain. Ce Front Républicain ne vient-il pas, finalement, rendre crédible la rhétorique FN et son fameux « système UMPS« ? Le mode de scrutin majoritaire ne vient-il pas renforcer le discours victimaire du FN ? L’absence de contrôle citoyen sur les élus ne rend-il pas possible la multiplication des affaires et des scandales qui alimentent ainsi la thèse favorite de l’extrême droite du « tous pourris« ? Et si, finalement, le carburant du FN c’était aussi les institutions de la 5e République ?

Pour une élection nationale, le mode de scrutin de la 5e doit, dit-on, permettre de choisir au premier tour et d’éliminer au second. L’élection à la majorité des suffrages sur deux tours reconnait donc sa faille à l’intérieur même de son mode d’emploi. Finalement, le citoyen ne choisit pas, il élimine, mécaniquement. Dès lors, l’élection devient peu attractive puisque beaucoup comprennent qu’ils ne seront jamais représentés à la hauteur de ce que pèsent leurs idées dans la société. A l’arrivée, le choix se résume à deux candidats, qu’ils vous plaisent ou non. L’abstention explose ! Les ardents défenseurs de ce scrutin majoritaire affirmeront qu’il est le seul à protéger des dangers de l’extrême droite en général et du FN en particulier. Ils avouent ainsi vouloir réduire la lutte contre le Front National au seul Front Républicain, puis poser le voile sur l’extrême droite et ses causes réelles jusqu’à la prochaine élection, jusqu’à la prochaine convulsion du système. En vérité ils plaident pour leurs paroisses. Car les avocats du scrutin majoritaire proviennent des deux partis « dominants » quasi certains de faire parti du choix final de second tour. Ils avouent ainsi leur préférence pour la frustration citoyenne et les taux d’abstentions records.

En votant pour une liste, à la proportionnelle, tous les citoyens auraient l’assurance d’être représentés à la mesure de leur poids réel dans le paysage politique. Ainsi, le goût du vote reviendrait, l’abstention reculerait. Les femmes compteraient autant que les hommes, les assemblées seraient réellement mixtes. Surtout, ce mode de scrutin mettrait fin au pouvoir absolu d’un seul parti sur le pays. Car il obligerait à des accords politiques et programmatiques sans lesquels aucune majorité ne serait possible. Avec un tel mode électoral, il ne serait tout simplement plus possible de voter une loi organique qui modifie la constitution et qui instaure une règle d’or sur la seule volonté de quelques hommes et d’un seul parti. Alors oui, le FN ferait son entrée au parlement. Alors tous les démocrates seraient contraints de réellement l’affronter, tout le temps, constamment. Alors les électeurs découvriraient la réalité du FN loin du fantasme d’un parti vertueux qu’il cherche à entretenir. Alors les électeurs le sanctionneraient comme ils l’ont toujours fait chaque fois que ce parti d’extrême droite a dirigé une ville. A l’élection suivante il a tout simplement été laminé. En politique la peur n’est jamais bonne conseillère, encore moins lorsqu’il s’agit de l’extrême droite.

En responsabilisant les élus et en permettant leur révocation par les citoyens, les promesses électorales seraient respectées, les magouilleurs prévenus des sanctions encourues. Une campagne électorale ne pourrait plus être un jeu dont le seul but serait de gagner un chèque en blanc. Dans une démocratie réelle et adulte, le contrôle des citoyens doit s’exercer en permanence. Devoir attendre l’élection suivante pour sanctionner une politique ou un comportement indigne confère à l’élu un pouvoir démesuré, procure au citoyen un profond sentiment d’impuissance. La révocation, par référendum populaire, doit pouvoir être mise en œuvre. Que le maire, le député, le ministre ne respectent leurs engagements, volent dans la caisse, s’évadent fiscalement et ils seront révoqués si les citoyens l’estiment nécessaire. Charge alors à nos élus de respecter le contrat passé avec les citoyens, contrat éminemment moral ! La moralisation de la vie politique ne se fera pas à coup de quelques rafistolages inefficaces, à coup de lois de transparence, mais par le truchement d’une véritable responsabilisation de tous.

A Villeneuve Sur Lot, c’est toute la 5e République qui nous donne à voir sa dégénérescence. Ce régime monarchique, qui ne permet pas aux citoyens d’être réellement représentés et d’empêcher les abus du parti au pouvoir, encourage l’abstention, décourage l’implication citoyenne. Car il autorise un parti et un seul à faire comme bon lui semble. Hier, Sarkozy n’en faisait qu’à sa tête. Aujourd’hui, le PS règne en maitre et n’écoute ni ses militants, ni ses partenaires politiques potentiels. Et ce n’est ni entièrement de la faute de l’UMP, ni entièrement de la faute du PS en vérité. Mais principalement de la faute d’une 5e République qui pousse l’UMP une fois, le PS une autre, à se comporter de manière hégémonique. Les élections intermédiaires se transforment alors en système d’alarme afin de prévenir le parti au pouvoir de sa dérive monarchique. Les législatives partielles, les cantonales, les européennes deviennent autant de défouloir et perdent tout leur sens politique. Les électeurs du camp adverse se mobilisent, les électeurs déçus du parti au pouvoir restent chez eux fatigués par un Front Républicain qui ne règle rien. Si bien qu’à la fin, sous la 5e République, un inconnu de 23 ans, militant du Font National, pourrait bien, un jour, devenir député de la république.

Sydne93


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