Le FN a-t-il cassé le plafond de verre, ou s’est-il juste déplacé ?
par Laurent Herblay
jeudi 2 avril 2015
Il y a près de 2 ans, suite aux bonnes performances de son candidat dans l’ancienne circonscription de Jérôme Cahuzac, on se demandait déjà si le plafond de verre au-dessus du FN avait cédé. En réunissant deux fois d’affilé 25% des suffrages, on peut être tenté de le penser, ou pas…
Le plafond de verre tient
Bien sûr, de 2002 à 2012, le parti de la famille Le Pen n’a pas semblé capable de passer le cap des 20% des suffrages. Le score de Marine Le Pen était inférieur au cumul de celui de son père et de Bruno Mégret en 2002. Mais, coup sur coup, le FN a réuni un quart des électeurs, lors des élections européennes, puis lors des élections départementales. A priori, il est bien légitime que ce changement de dimension pousse certains à penser que les frontistes ont cassé ce fameux plafond de verre. Mais, l’énorme décalage entre le nombre de voix obtenues et le nombre de sièges gagnés (à peine 1,5% de ceux mis en jeu) démontre qu’il y a toujours un plafond de verre, même s’il est plus haut.
En effet, si le FN était un parti comme les autres, en arrivant en tête dans plus de 15% des cantons, il devrait gagner des centaines de sièges. Alors bien sûr, certains frontistes préféreront incriminer les « magouilles » imaginaires de l’UMP, dont quelques représentants n’ont pas suivi la consigne nationale et préféré appeler à voter contre eux. Mais nous sommes en démocratie et chacun est libre de sa parole, ce que le FN a peut-être du mal à comprendre, à moins qu’il ne tombe dans les mêmes travers politiciens que l’UMPS qu’il dénonce. S’il rassemble plus d’électeurs qu’avant, le FN affronte toujours le mur du second tour, qui semble à peine moins dur à passer que quand il ne pesait pas 20%...
Le plafond de verre tiendra-t-il ?
Une nette majorité de Français persistent à ne pas vouloir donner la moindre responsabilité au parti de la famille Le Pen : voilà le message qu’envoient aussi ces élections départementales puisque le FN n’est parvenu à se faire élire que dans 1,5% des cantons, bien qu’il ait réuni un quart des votes au premier tour, presque autant que la majorité présidentielle. Plusieurs raisons à cela : un parti qui reste sulfureux malgré les tentatives de dédiabolisation, notamment du fait des déclarations de ses dirigeants ou candidats. Mais surtout, en 2013, seulement 25% des Français pensaient qu’il ferait mieux que le PS et l’UMP, quand 72% pensaient le contraire. Pourquoi changer alors ?
Ce sondage d’il y a deux ans est très intéressant car il annonce le score du FN aux élections européennes et départementales et son échec au second tour. Toute la question est de savoir si les choses peuvent changer d’ici à deux ans et encore après. Les frontistes pourraient dire que Marine Le Pen a repoussé le plafond de verre de 6 points en trois ans, ce qui est une performance, et qu’à ce rythme, elle finira bien par accéder au pouvoir. Mais cette incapacité du FN à faire penser qu’il pourrait faire mieux que les bras cassés qui nous gouvernent depuis des décennies pourra-t-il changer avec une présidente qui n’est pas au niveau et ne semble pouvoir le devenir. Et il y a tout le reste…
La vie politique n’est jamais figée donc on ne peut rien exclure, surtout dans une époque aussi dure. Nous ne sommes pas à l’abri d’une révolution conservatrice que le FN pourrait incarner. Mais étant données les circonstances actuelles, j’ai l’impression que notre pays résiste bien et qu’il continuera.