Le FN : le meilleur ennemi du PS

par Laurent Herblay
mercredi 11 mars 2015

Manuel Valls a créé un sacré phénomène médiatique avec ses déclarations sur le Front National, contre lequel la France pourrait se fracasser. Un effarant retour dans le passé, où le parti lepéniste était déjà le meilleur allié de François Mitterrand pour déstabiliser le camp adverse…

Mitterrand 2.0 ?
 
Déjà, dans les années 1980, le Parti Socialiste avait largement utilisé le FN pour affaiblir l’opposition d’alors, en lui donnant un plus large accès aux médias, en introduisant la proportionnelle, et en jouant avec l’idée du droit de vote des étrangers… L’émergence du parti lepéniste a probablement joué un rôle dans la victoire de 1988. Une leçon sans doute retenue par François Hollande, conseiller à l’Elysée avant 1988, après l’échec de Lionel Jospin en 2002. On constate depuis quelques mois que la majorité joue ouvertement le jeu du FN en cherchant à réduire le débat politique à une alternative entre eux et le parti lepéniste, poussant Nicolas Sarkozy à parler, pour une fois pas totalement à tort, de FN-PS.
 
Car la saillie de Manuel Valls n’est qu’un élément dans une stratégie globale, comme le montre la sortie du président de la République disant qu’il souhaite arracher les électeurs au FN. L’autre élément de la stratégie de François Hollande pour 2017, c’est la droitisation de son discours économique, illustrée par l’utilisation du 49-3 sur la loi Macron. L’idée des apprentis-sorciers de l’Elysée est d’asphyxier une UMP déjà peu fringante avec son président qui préfère courir les conférences que la diriger. Trop modérée, l’UMP se distingue trop peu du gouvernement. Trop dure, elle créé un pont vers le FN pour ses électeurs. L’espace politique de l’UMP n’est-il pas singulièrement réduit dans le contexte actuel  ?
 
Jouer avec le feu…
 
Même si l’élection dans le Doubs indique que ce scénario n’est pas impossible, les résultats désastreux des élections européennes et les sondages pour les élections présidentielles peuvent laisser penser qu’il s’agit d’une tactique perdante. Mais il ne faut pas sous-estimer un président qui l’a été toute sa vie, avant d’arriver là où il est aujourd’hui. Et les meilleurs vents de la conjoncture tombent à point nommé, s’ils se confirment. Mais en légitimant le discours de la droite la plus bête, les socialistes pourraient aussi pousser les classes moyennes et supérieures urbaines plus encore à leur droite sans se réconcilier avec des classes populaires éprouvées depuis 2012 et toujours plus favorable au FN.
 
Depuis deux ans, le parti de la famille Le Pen bat record sur record, certes, dans un contexte très favorable, mais qui fait se demander à quel niveau il montera avec cette stratégie… Mais cela fait sans doute partie de la stratégie, car les innombrables limites du FN font que le PS pense sans doute qu’il le battra forcément au second tour, le seul enjeu étant d’éliminer l’UMP au premier tour… Mais le gouvernement devrait veiller à ne pas s’aliéner inutilement des intellectuels pour des procès en sorcellerie, comme Manuel Valls avec Michel Onfray, qui a répliqué vivement sur Europe 1. Ce nouveau dérapage du Premier Ministre démontre aussi une crispation et une légèreté qui n’augurent rien de bon.
 

Cette focalisation cynique du débat sur la question du FN sert un double objectif. D’abord, elle permet de relativement occulter le débat sur la politique menée depuis près de 3 ans. Ensuite, elle vise à placer les Français devant une alternative entre eux et Le Pen. Un triste jeu.


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