Le PS en marche vers Macron

par Henry Moreigne
dimanche 15 janvier 2017

Emmanuel Macron a entamé sa longue marche, ponctuée de visites de terrains et de réunions publiques. Comme une rock star ou une bête de foire, cet OVNI de la politique qui s’évertue à briser les codes intrigue et attire. Irrésistiblement. 

Crédit photo : © Claude Truong-Ngoc / Wikimedia Commons

Lui qu’on présente comme le candidat de la France urbaine et des milieux d’affaires a pris son bâton de pèlerin pour aller voir ce qui fût la France socialiste. Le trajet emprunté visite volontairement les bastions traditionnels du PS, ruraux et urbains. Nevers, Clermont-Ferrand, Lille … Histoire somme toute de vidanger ouvertement l’électorat PS et de laisser comme seul rôle à celui qui sortira vainqueur des Primaires Citoyennes celui d’éteindre la lumière en partant.

Pour comprendre Macron, il faut lire avec attention ce que confie Aquilino Morelle au quotidien Le Monde sur son ancien collègue de l’Elysée. «  C’est un homme intelligent et habile. Son ambition est grande et ancienne ; il croit en lui et en son destin, depuis longtemps. Il a une cohérence politique, celle d’un vrai libéral, de l’économie aux questions internationales, en passant par le social et le culturel. A ce titre, il est le fils spirituel de François Hollande. Nous verrons bien si ce libéralisme complet et assumé convaincra les Français. En tout cas, sa stratégie est claire : il parie sur l’effondrement prochain du « vieux monde » politique, et escompte apparaître alors comme « le » recours ».

L’analyse est pertinente. En bon libéral l’ancien ministre de l’économie tente d’imposer le célèbre acronyme TINA (There is no alternative) au champ de la politique. Un pari habile que tous les sondages renforcent. Ce serait lui ou l’extrême-droite, lui ou la droite. Et quelle droite. Celle d’un François Fillon le couteau entre les dents, héraut de conservateurs revanchards et sans tabou.

Certes Macron n’a pas le charisme de Barack Obama mais il emprunte au registre du président américain sortant par la tonalité positive de son discours. Notamment cette idée répété en boucle par Obama que, « pour chaque américain rien n’est écrit d’avance » ou encore, ces propos dans son discours d'adieux : « j’ai une dernière demande à vous faire en tant que Président. C’est que vous continuiez à croire non dans ma capacité à apporter le changement mais, dans la vôtre ». 

Toute la tragédie socialiste, mais aussi l’héritage de François Hollande est là. Dans la médiocrité intellectuelle et culturelle qui a régné au PS pendant plus d’une décennie, dans l'absence de travail et de préparation dont on a vu les conséquences lors de l’arrivée du président socialiste à l’Elysée.

En face, chez Macron, ça mouline et plutôt vite avec une vraie épaisseur. Si on y rajoute une rare capacité à s’entourer des meilleurs, l’ancien banquier d’affaires n’a rien d’un capitaine de pédalo.

Dès lors, la question n’est plus de savoir si, après ses électeurs et ses militants, l’appareil socialiste va rallier Macron mais, quand. Il suffit d’interroger quelques élus PS pour avoir la réponse. Ce sera vraisemblablement au soir du second tour de la primaire de la Belle Alliance. C’est quasiment écrit dans le scénario. Si Manuel Valls est vainqueur, il le sera sur un champ de ruines. Ses camarades les plus à gauche déserteront vers Mélenchon. Général d’une armée sans fantassins, il sera contraint d’aller à Canossa et de se ranger derrière Macron. Si Benoît Hamon ou Arnaud Montebourg l’emportaient, ce seraient les sympathisants de l’ancien Premier ministre qui feraient leur valise. La seule incertitude ce serait une victoire de Vincent Peillon, unique candidat à pouvoir réussir une synthèse au sein du PS.

Interrogé par La Voix du Nord à l’occasion de son passage à Lille où son meeting a réuni samedi soir 5 000 personnes, Emmanuel Macron a lancé un appel sans ambiguïté aux socialistes : «  Si ceux qui ont un jour voté socialiste souhaitent que ce soit un projet progressiste qui remporte l’élection présidentielle, il est temps qu’ils s’interrogent : c'est rarement à celui qui est en tête au passage du col qu’il revient d’apporter les bidons à celui qui est resté au premier virage de la montée. J’invite donc tous ceux qui croient dans notre projet à nous rejoindre, sans même attendre le résultat de la primaire.  »

Comme si finalement le PS avait déjà trépassé et que la primaire relevait du registre des spasmes post-mortem.

Crédit photo : © Claude Truong-Ngoc / Wikimedia Commons


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