Le Ségo Show
par D. Artus
lundi 12 février 2007
Devant 10 000 militants conquis, Ségolène Royal a dévoilé hier après-midi à Villepinte les cent propositions de son projet présidentiel. Un discours un peu catalogue, un peu flou, avec des propositions pour tout le monde, mais sans évaluation chiffrée et dans une ambiance très « Mitterrand année 1981 ».
Les accents furent parfois mitterrandiens mais sans le souffle, sauf au moment où Ségo s’est présentée en « mère de la Nation », « je veux pour tous les enfants ce que j’ai voulu pour les miens ». Le poing serré contre son cœur, la voix cassée par l’émotion, ce fut sans doute le seul moment où elle a galvanisé ses troupes... Sinon, ce n’est clairement pas une oratrice : elle parle trop vite et ne laisse pas la foule applaudir et s’enthousiasmer.
Le problème central comme le constatent certains analystes, (voir l’analyse de Gérard Grunberg dans Libé)
est que l’on a assisté à plusieurs discours en un. Le catalogue des
propositions, tout au long des deux heures de discours, distribué à
tout le monde, sans être chiffré. Les accents « gauche socialiste » le
disputent à l’obligation de s’entendre avec l’entreprise et à la musique
personnelle de la candidate qui est revenue sur l’école, la famille,
les enfants, même si elle a déjà amendé celle-ci.
Alors cette
juxtaposition de discours différents sonne-t-elle comme du clientélisme
pur et dur, ou bien plutôt comme une vraie ligne politique en marche,
en cours d’affirmation ? L’avenir nous le dira, mais sans doute est-il
un peu tard pour définir la politique que Ségo souhaite proposer aux
Français. Alors qu’au même moment Sarko présente un parti en ordre de marche, avec ralliements à la clé, Ségo en est encore à tenter de rassembler son propre parti.
Et on tombe là sur les contradictions récentes ou passées de la gauche
socialiste. Ecartelée entre les partisans du non à l’Europe, tendance Fabius ou Emmanuelli, les technos démocrates-sociaux tendance Strauss-Kahn et les rénovateurs ralliés, comme Montebourg ou Peillon... Sans compter avec la ligne plus conservatrice de Hollande.
Bref, difficile de s’y retrouver pleinement quand on est électeur de
gauche. N’oublions pas non plus qu’au-delà de la mise en scène réussie
(même scénographe que Mitterrand, décidément...), la longueur du discours
à la Fidel Castro des grandes années, a dû en rebuter plus d’un. Surtout avec la concurrence du match de rugby Irlande-France... D.A.