Le Valet de Valls

par Daničle Dugelay
samedi 17 août 2013

Manuel Valls, Ministre de l’Intérieur, donne souvent aux personnalités de Gauche l’occasion de le critiquer. Sa politique « tout sécuritaire » fait davantage penser à une droite rude qu’à une gauche humaniste. Lorsque François Delapierre, secrétaire national du Parti de Gauche, a déclaré à RMC que Valls était « l’extrême droite du mouvement socialiste », cela n’avait rien de surprenant, ni d’injurieux : c’est tellement évident ! Certes, Ce ministre a tort de se réclamer de la Gauche, mais il n’est pas le seul. Est-il à l’extrémité de droite du gouvernement, il faut l’espérer…S’il y en un autre pire que lui, c’est une véritable menace pour nos libertés.

Monsieur Valls a probablement des gardes du corps, mais il a aussi un vigile tout dévoué qui surveille l’apparition de toute critique contre lui.Il entend François Delapierre sur RMC. Il se met sur-le-champ à aboyer : « … un socialiste défroqué et âme damnée de papa Mélenchon veut nous donner des leçons. » Il est tout fier de sa petite phrase, il l’a écrite sur son blog et sur deux réseaux sociaux. On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, n’est-ce pas ?

A la réflexion, ces quelques mots nous renseignent sur les convictions peut-être les plus enfouies de ce militant solférinien, Luc Cavournas, sénateur maire d’Alfortville (94) et chargé des négociations avec les autres partis. On pourrait penser que cette mission qui ressemble un peu à celle d’un ambassadeur, devrait l’amener à davantage de réserve et de modération. C’est possible, mais en tout cas ni avec le Parti de Gauche, ni avec le Front de Gauche dont il ne peut pas supporter l’existence. Sans doute pour lui être agréables, ses amis l’appellent « le bazooka », c'est-à-dire un lance-roquette et, comme j’ai l’esprit taquin, je dirai plutôt un « lance-roquet ».

Mais revenons à l’analyse de sa formule « un socialiste défroqué ». Défroqué s’emploie à l’origine pour un moine ou un prêtre qui a quitté son habit religieux. Veut-il dire par là que le Parti Socialiste est une « religion » ? Dans ce cas, tout ce que disent les responsables du PS sont paroles d’Evangile, comme un dogme, immuable, qu’on ne peut pas discuter. Dans ce cas, puisque la démocratie se nourrit justement de la discussion, le nouveau PS religieux ne peut pas être démocratique. C’est Monsieur Cavournas qui le dit ! On comprend alors qu’il y ait encore des militants qui aient tant de mal à s’en détacher. Figurez-vous que j’ai l’honneur d’être aussi une défroquée du PS, jamais bigote, et j’en suis fière.

« Défroqué » s’est égaré par la suite sur les chemins argotiques pour signifier dans la langue familière moderne « qui a baissé son froc » ou « son pantalon ». Alors là, Monsieur le Sénateur se trompe. Les défroqués, c’est dans son parti qu’on les trouve, pas ailleurs. Ils sont nombreux, à commencer par le gouvernement, puis les parlementaires, tous ceux qui ont baissé leur pantalon devant les lobbies oligarchiques, les financiers, les multinationales, les banques, le FMI, l’OCDE, le Medef, la commission européenne, la chancelière, et dernièrement en sus les Etats-Unis. Cela en fait des paires de fesses en l’air ! Ce qui fait mal, c’est qu’elles représentent toutes la souveraineté de notre peuple. Je ne dis pas qu’il ne faut pas discuter et passer des accords avec les autres pays, mais on peut le faire pour le bien des citoyens et l’intérêt général. Pauvre Jaurès !

Monsieur le Sénateur du Val de Marne, dans ces quelques mots, multiplie les bévues.

Il traite ensuite mon camarade Delapierre d’âme damnée de Papa Mélenchon. « Papa Mélenchon », c’est plutôt gentil, voudrait-il par là lui lancer une œillade ? Alors là, il perd son temps. Valls et lui auraient plus de chance avec l’UMP, voire le F.N. Quant à l’âme damnée,

Nous sommes encore en plein dans la religion et le Diable vient s’en mêler.

Au fait, cela me rappelle quelque chose … Mais, oui, le maire d’Alfortville, c’est lui qui a réuni « la communauté » musulmane dans le Palais des Sports pour lui faire part de sa tristesse de constater la poussée de l’islamo phobie. Voilà un mot, « communauté », que je ne peux pas accepter sous la plume ou dans la bouche d’un sénateur : la France est une Nation de citoyens, elle ne connaît pas les communautés et encore moins le communautarisme. Quand on accepte les unes, on n’est pas loin d’accepter l’autre. Cette Nation de citoyens est un des piliers de notre République. De plus, ce représentant de la Nation s’adresse en particulier aux adeptes d’une religion, or l’Etat ne reconnaît aucun culte. Il attribue à celle-ci une qualité particulière en écrivant sur son site que tout musulman peut pratiquer l’Islam avec fierté. Pourquoi serait-il fier de pratiquer cette religion ? Une autre aussi sans doute ? Mais pas le mécréant, à première vue moins honorable.

C’est dans la droite ligne de la déclaration scandaleuse de Sarkozy au Latran, lorsqu’il a comparé le prêtre et l’instituteur, ceux qui ont l’espérance et les autres. Un athée est aussi respectable qu’un croyant et un Sénateur, comme l’ex-président de la République, représente l’ensemble des citoyens de son pays. Aussi, comme François Delapierre, je me permets, en tant que citoyenne, de donner une leçon à Monsieur le Sénateur-Maire. Je lui conseille de réajuster ses lunettes, réviser notre constitution et ses principes fondamentaux, puis relire avec attention notre loi de séparation de décembre 1905. Il me semble que c’est un minimum à connaître lorsqu’on est en charge de représenter la Nation.


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