Le virus de l’abstention devient résistant

par Michel DROUET
mercredi 15 juin 2022

 

S’il y a bien un domaine où la France est performante, c’est avec son nombre d’élus. Un peu plus de 500 000, (1 pour 130 habitants). A priori, il n’y aurait donc pas matière à se plaindre, puisque nous sommes couvés et choyés, et l’abstention aux élections ne devrait pas prospérer jusqu’à en devenir inquiétante et faire le lit de la contestation violente en dehors des urnes. Et pourtant, ça ne fonctionne pas.

On vote pour quoi, déjà ?

Pour le plus beau, pour la plus jeune, pour la plus grande gueule, pour celui (ou celle) qui a fait de la politique son métier, pour celui qui règlera votre différent avec le voisin, qui vous pistonnera pour un emploi, ou bien celui qui vous fera un chèque en fin de mois à la place de votre employeur ?

En fait, ce n’est ni le nombre, ni la volonté qui sont en cause, mais plutôt l’extrême dispersion de leur compétences et la méconnaissance globale de leurs pouvoirs réels qui rendent illisible l’organisation générale du pays pour l’électeur lambda. Tout part de là, de la complexité du système qui rend les choses illisibles, entre la commune, les intercommunalités, le conseil départemental, le conseil régional, l’Etat, ses ministères et ses ministres et ses agences…, l’électeur perd sa boussole citoyenne et ne vote plus pendant que les partis et les élus confortent leur rente.

Qui décide réellement ?

De plus, avec le temps, les doctrines politiques s’effacent et s’adapte au « monde actuel ». Désormais, à droite, principalement, les partis, coalitions ou mouvements déploient les filets dérivants pour constituer des majorités hétéroclites fragiles, à l’échine souple envers l’économie et la finance, y compris dans nos collectivités territoriales. Les parlementaires votent des textes gouvernementaux censés concerner l’intérêt général mais qui s’égarent souvent vers les rivages d’intérêts particuliers favorisant les actionnaires au détriment du partage de la valeur ajoutée. L’Etat, avec le temps, devient donc bizarrement celui qui assure les fins de mois des salariés avec des chèques, des exonérations ou des suppressions de taxes.

Plus de campagnes, plus de débats, (on remarquera le silence assourdissant de Macron et ses affidés pendant les présidentielles et les législatives) des programmes volontairement flous ou hors sujet (là aussi mention spéciale à Macron et ses godillots et leur « campagne » de caniveau contre la Nupes, puisqu’ils n’ont rien d’autre à proposer qui ne soit validé par le Médef). A quoi sert-il d’aller voter se demande le citoyen puisque les élus, frileux ou hésitants, résignés ou enthousiastes, semblent avoir capitulé devant la mondialisation et la confiscation des richesses qui dictent l’ordre du jour des assemblées ?

Rien ne va changer

A chaque élection, la question de l’abstention est remise sur la table mais à chaque fois on a l’impression que c’est pour se donner bonne conscience. Après tout, les élus sont mal élus mais ils le sont tout de même… On nous ressort donc les vieilles recettes du vote obligatoire ou électronique avec une pincée de proportionnelle, de sensibilisation des jeunes dès le collège ou bien encore de la déconnection des législatives de la présidentielle en mettant le reste sous le tapis.

Je suis convaincu que le cosmétique ne marchera pas et qu’il faudra sortir du système d’empilement sclérosé des collectivités et structures étatiques (trop d’élus, trop cher, pas clair,…) et de soumission à l’ordre néolibéral, d’une manière ou une autre et aller vers un système où l’intérêt du citoyen sera pris en compte plus qu’il ne l’est aujourd’hui.

En attendant, dans l’immédiat, rien ne nous sera épargné pour conserver le système actuel en l’état. 


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