Les bonnes affaires de Patrick Buisson

par Olivier Bonnet
jeudi 30 juillet 2009


La légion d’honneur ne suffisait pas ! En la lui décernant en ce 24 septembre 2007, Nicolas Sarkozy fait cette confidence publique : "C’est à Patrick que je dois d’avoir été élu". Patrick Buisson, conseiller politique, ancien de l’extrême droite (ancien journaliste aussi, à Minute notamment), qui lui fut si utile pour siphonner les voix du Front national : "Le président évoque les temps forts de la campagne, quand l’avis de Patrick lui fut si précieux : les incidents gare du Nord, le ministère de l’Identité nationale, la pédophilie « innée », l’invocation de Jean-Paul II…", raconte Christophe Barbier, le directeur de la rédaction de L’Express témoin de la cérémonie. En gros, on décèle son influence derrière les aspects les plus scandaleux du discours sarkozyste, qui sont effectivement à la base de sa victoire lors de la présidentielle. Mais si le président la lui doit, il en sera (in)dûment récompensé. Il est d’abord au centre de l’affaire des sondages payés par l’Elysée à Opinionway, révélée par la Cour des comptes. Montant des honoraires du cabinet d’études de Buisson, Publifact, versés par l’Etat en 2008 : 1,5 million d’euros ! Sans appel d’offre, évidemment. "La Cour ne nommait pas le cabinet, résume Rue89, mais deux enquêtes de Libération et de Mediapart ont permis d’apporter ce complément d’information. En revanche, la Cour ne minorait pas les irrégularités du contrat signé avec l’Elysée : il a été passé sans aucune mise en concurrence ; le contrat réalisé sur papier libre ne comportait qu’une seule page et laissait le cabinet « juger de l’opportunité, dans le temps et dans les thèmes, des sondages ». La Cour insiste sur la totale liberté alors laissée au cabinet puisque «  la Présidence n’avait ni la maîtrise ni le contrôle, tant de l’engagement que du montant des dépenses  ». Les honoraires mensuels du cabinet s’élevaient à 10 000 euros auxquels 130 factures sont venues s’ajouter. Dont celle de 392 228 euros, pour des sondages OpinionWay parus dans Le Figaro et sur LCI."

Et voilà que Le Monde nous apprend hier que Buisson, qui n’a pas sur la tête une seule casquette, a également bénéficié des largesses de l’Etat pour une autre de ses activités, celle de patron de la chaîne de télévision Histoire, filiale de TF1 : "La chaîne privée Histoire a-t-elle bénéficié des mannes du ministère de la culture du fait de la proximité de son directeur général, Patrick Buisson, avec Nicolas Sarkozy, dont il est un des conseillers officieux ?, interroge le quotidien du soir. Au printemps 2008, le ministère de la culture a publié un appel d’offres pour obtenir le droit d’utiliser un programme de télévision disponible sur le marché "à des fins de communication institutionnelle". (...) L’affaire s’est conclue très vite. (...) Malgré l’absence de concurrent susceptible d’être mieux-disant, le ministère ne déclare pas l’appel d’offres infructueux. "Le prix proposé par la chaîne nous a semblé raisonnable", insiste-t-on rue de Valois. Le ministère obtient ainsi le droit de rediffuser l’émission, intitulée Vive le patrimoine, et verse 65 000 euros HT à la chaîne dirigée par M. Buisson. Cette somme est suivie d’un second versement de 35 000 euros HT par le ministère, pour obtenir le droit d’avoir son logo au générique de chaque émission. "Puisqu’il s’agit cette fois d’un accord de parrainage, un second appel d’offres n’est pas nécessaire", explique-t-on rue de Valois. Après l’obtention de ce premier marché pour un total de 120 000 euros TTC, l’administration a signé, le 9 juin 2009, un nouvel accord avec la chaîne Histoire pour un montant total de 150 000 euros. Cette fois encore le marché s’est conclu sans aucun appel d’offres, puisqu’il s’agit toujours d’un contrat de parrainage." Quel aurait pu être l’intérêt personnel de la ministre dans l’opération ? @rrêt sur images lance une piste : "Selon Le Monde, Christine Albanel et Patrick Buisson ont déjeuné plusieurs fois ensemble "pour évoquer avec elle ses relations avec le président de la République", selon un proche de la ministre. Quelques jours avant le remaniement du 23 juin, M. Buisson s’est fait fort de promouvoir son action à l’Elysée. "Il aurait été demandé deux fois plus à la ministre, Christine Albanel, elle aurait signé des deux mains pour être dans les petits papiers de M. Buisson", assure une source proche de l’ex-ministre de la culture, qui tient à garder l’anonymat par crainte pour sa carrière." Total des sommes versées par le ministère de la Culture à la chaîne dirigée par Buisson (dont le PDG n’est autre que Laurent Solly, ancien directeur de campagne de... Sarkozy) : 270 000 euros.

Mais ce n’est pas tout : "Le ministère du tourisme parraine lui aussi la même émission, révèle encore Le Monde. "Il est normal que le ministère cherche à valoriser son action en participant à un programme sur le patrimoine", explique le cabinet du ministre Hervé Novelli, un proche de M. Buisson depuis de nombreuses années. Son administration n’a pu communiquer à ce jour le montant des crédits ni les modalités de leur affectation." Sans doute qu’elle ne retrouve pas les factures, est-ce bête d’être si désordonnée ! Hervé Novelli, lui aussi ancien militant d’extrême droite, comme Buisson. Voilà comment sont dilapidés les deniers de l’Etat, dont "les caisses sont vides". Petites affaires entre amis. Qu’on se le dise : Sarkozy n’est pas un nain gras ingrat !


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