Les limites de l’impôt à la source

par Laurent Herblay
lundi 15 juin 2015

C’est le gadget de la fin de mandat de François Hollande, qui ne serait mis en place qu’en 2018 pour éviter toute perturbation du scrutin de 2017. Mais même si on peut y voir une forme de modernité ou son aspect plus pratique, le prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source pose bien des problèmes.

 
Impôt et citoyenneté
 
Au premier regard, une telle réforme peut sembler être de bon sens. Ainsi, les contribuables pourraient payer au fur et à mesure leur impôt, théoriquement sans mauvaise surprise. Le paiement progressif éviterait d’avoir à gérer sa trésorerie dans l’année. Les employeurs, qui collectent déjà les cotisations sociales, ne devraient pas avoir de problème à gérer en plus la collecte de l’impôt sur le revenu, qui pèse moins que les premières. Enfin, on pourrait même imaginer que la collecte de l’impôt en serait fiabilisée et améliorée. Au final, c’est une réforme qui porte peu à controverse, même si beaucoup soulignent sa complexité. Mais l’on peut s’étonner d’une mise en place seulement programmée en 2018.
 
Pourtant, le prélèvement à la source pose des problèmes. D’abord, sera-t-il une obligation qui s’imposera à tous les citoyens ou une option qui s’offrira aux contribuables ? Ensuite, plus fondamentalement, cette façon de prélever l’impôt revient à le faire de manière relativement invisible et indolore, sans que le contribuable ne s’en rende compte. Un moyen commode pour calmer la révolte fiscale, même si cela est plus du camouflage qu’autre chose. Mais même si l’on considère que l’Etat ne dépense pas tant que cela en France, ne s’agit-il pas d’une nouvelle déresponsabilisation de nos gouvernants et des citoyens ? Ne peut-on pas penser que le paiement direct de l’impôt peut tous nous responsabiliser ?
 
Réflexion ou communication ?
 
Ne faudrait-il pas, au contraire, rendre le paiement de l’impôt plus clair, plus transparent, en transférant une partie des cotisations sociales (a minima la CSG) sur l’impôt sur le revenu, et continuer à le faire payer par les citoyens directement ? Ne serait-ce pas à la fois un moyen de simplifier notre fiscalité, et faire contribuer tous les citoyens à l’effort commun, comme un acte fondateur et fondamental de la citoyenneté ? Et ce serait l’occasion à la fois de faire payer à tous des impôts, en fonction des moyens de chacun, tout en remettant plus de progressivité républicaine. Et ce camouflage qu’est le prélèvement à la source facilite leur hausse, pas forcément pour le bien, comme on le voit avec la Sécu.
 
Puisque 60% des Français la soutiennent selon les sondages, il est probable que nos dirigeants, qui ne réfléchissent plus, suivront cette boussole superficielle de notre époque. Le discours de François Hollande est assez hallucinant. Celui qui a fait des dizaines de milliards de hausses d’impôt, puis qui fait baisser de 40 milliards les cotisations sociales des entreprises, ose affirmer aujourd’hui que « la priorité, c’est la baisse des impôts des Français  » ! Passons sur la contradiction totale avec la politique menée depuis trois ans, puisque la TVA a été augmentée pour en financer une partie, mais il est stupéfiant que le PS place la baisse de la fiscalité avant la protection de l’emploi ou l’augmentation du SMIC.
 

Ce quinquennat offre un révélateur absolument incroyable, avec un Parti dit Socialiste, qui en vient à aller plus loin que Nicolas Sarkozy sur bien des sujets, comme Paul Krugman le dénonçait il y a quelques mois. Tout ceci signifie sans doute la mort cérébrale de ce parti.


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