Les orientations pour le pouvoir d’achat

par Christophe
mardi 27 mai 2008

Suite aux déclarations de notre Président de la République sur les orientations en faveur du pouvoir d’achat, et bien que je ne me considère nullement dans son camp politique (en ai-je un d’ailleurs ?), il serait bon d’approcher objectivement les tendances vers lesquelles le gouvernement doit aller en essayant d’entrevoir les marges qu’il possède au regard de la législation actuelle. Nous baserons notre raisonnement sur cet article.

Le contexte

Si nous reprenons les mesures expliquées dans notre article de référence, il faut d’abord expliciter quels sont ces 4,9 millions de salariés qui ont perçu une participation et les 4,2 millions ayant perçu un intéressement. En fait, par expérience, nous savons que l’intéressement (facultatif) n’existe quasiment que dans les entreprises de plus de 50 salariés ayant aussi une participation. Si nous nous référons à la population salariée 2005 (source Insee), il reste donc environ 17,5 millions de salariés à prendre en compte, principalement ceux travaillant dans les TPE et PME ainsi que les fonctionnaires et les personnels des collectivités territoriales.

Il faut aussi séparer salaire et revenu. Le salaire est continu, le revenu est au moins égal au salaire et peut avoir une partie conjoncturelle (intéressement, participation, primes...)


La négociation annuelle sur les salaires

La négociation annuelle sur les salaires, comme celle relative à l’aménagement et l’organisation du temps de travail, est devenue obligatoire en 1982 (voir les articles L 132-27 à L 132-29 du Code du travail) dans les entreprises privées. En ce sens, nous ne constatons pas de nouveauté, il faut donc approfondir les marges de manœuvre au sein de la législation actuelle pour tenter d’en définir les mesures pouvant être améliorées.

Il faut d’abord souligner que s’il y a obligation de négociation, elle n’est pas soumise à obligation de résultat ; il serait incongru qu’elle le devienne ; mais elle doit être réelle et non formelle. Sur ces points, il ne me semble pas qu’il existe un quelconque axe d’amélioration.

L’obligation annuelle obligatoire est conditionnée à :

Nous abordons donc la notion de représentation. Qui peut négocier avec un responsable d’entreprise ?

Si la législation prévoit des négociations avec des délégués syndicaux, c’est tout simplement qu’un délégué syndical a une protection relative par rapport à un salarié sans mandat ; son licenciement ne peut être effectif que suite à l’accord de l’inspection du travail.
Le seul point d’amélioration consiste à rendre obligatoire la négociation avec un salarié de l’entreprise, sans statut particulier. La législation pourrait ouvrir une voie en fournissant une protection relative pour un tel salarié, cela ne garantissant que bien peu de choses. Un salarié ne représente que lui-même, il faudrait donc prévoir un principe de nomination (électoral ?), mais alors faut-il aussi protéger tous ceux qui pourraient se présenter pour assumer cette tâche ? Sans protection qui se présenterait ? Sans protection qui se permettrait de contrer son propre patron ? Dans une négociation sociale, tous les partenaires sont au même niveau, le lien de subordination n’existe plus.


Actuellement, tout manquement à la loi, tout employeur se soustrayant à cette obligation est passible de sanctions pénales. Certes les sanctions peuvent s’alourdir encore et encore, mais est-ce bien raisonnable ?

Concernant la sanction pour ceux ne négociant pas les salaires, nous l’avons vu et le journal l’explicite aussi, cela risque bien d’être sans effet ou si peu. La plupart des salariés souffrant du manque d’augmentations de salaires sont principalement ceux des TPE et certaines petites PME ; même si leur salaire d’embauche est légèrement supérieur au Smic, ils sont vite rattrapés par l’évolution du Smic.


La participation

La participation aux bénéfices ne s’applique obligatoirement qu’aux entreprises de plus de 50 salariés. La législation fournit une formule de calcul 1/2 x (BN - 5% x CP) x MS/VA avec : Par défaut cette formulation est le minima obligatoire. Si un accord d’entreprise ou d’établissement est signé par les délégués syndicaux, il ne peut qu’être au minimum à ce niveau sauf dérogation. Cette formule met en évidence que si le bénéfice net fiscal ne dépasse pas 5 % des capitaux propres, le résultat est nul ou négatif ; le volume de participation est de 0. La participation est bloquée durant cinq ans. Elle peut être débloquée pour 9 raisons justifiées. La participation possède, par son blocage de 5 ans, un statut fiscal particulier.

Concernant le blocage ou non de la participation, c’est avant tout un problème fiscal du point de vue du salarié. Le blocage donne au salarié un revenu différé défiscalisé non soumis à l’impôt sur le revenu ni aux charges sociales. L’impôt sur le revenu serait donc, a priori, le poids d’un déblocage anticipé en contrepartie d’une disponibilité immédiate. Il n’y a donc pas d’effet négatif dans cette mesure et cela me paraît être une mesure favorable aux salariés qui nécessitent plus de disponibilité.


L’intéressement

Aucune obligation ne s’applique à l’intéressement. Il peut être proposé par l’entreprise ou être négocié entre les partenaires sociaux. Il ne possède aucune contrainte de blocage, il est disponible immédiatement. L’intéressement peut prendre deux formes : Concernant le crédit d’impôt, il me semble que cette mesure est favorable pour les entreprises n’ayant pas encore d’accord d’intéressement. Par contre, pour celles qui en ont un, s’appuyer sur le surplus de versement d’une année sur l’autre n’est guère pertinent. Un accord d’intéressement est soumis aux fluctuations selon les modalités définies dans l’accord (obligation législative) ; une année peut être bonne, une autre moins et la réserve d’intéressement suivra la même tendance.

Pour la mise en place d’un dispositif d’intéressement dans les PME, l’idée est bonne, même s’il y a confusion dans l’article de presse. Si un accord d’intéressement est contractualisé avant juin 2009, il ne peut tenir compte que des résultats futurs, à savoir les résultats de l’exercice 2009 dont le versement aura lieu en 2010. Il existe en la matière une contrainte fiscale qui oblige à négocier sur des paramètres (financiers ou non) pas encore connus.


Avancement de la revalorisation du Smic

La revalorisation du Smic au 1er janvier plutôt que le 1er juillet est une décision appréciable pour ceux qui connaissent bien les rouages des calculs d’impact de masse salariale lors d’augmentations en niveau des salaires. Il faut savoir que l’effet masse salarial et un niveau d’augmentation applicable au 1er janvier sont identiques. Lorsqu’une augmentation en niveau intervient en dehors de cette date, elle a une influence masse salariale partielle en comparaison du niveau. Le complément est calculé par un effet report sur l’année suivante.


En conclusion

Les mesures, du point de vue des salariés peuvent être favorables. Il reste cependant deux catégories de salariés qui ne seront pas touchées, ceux des TPE et les fonctionnaires et personnels des collectivités territoriales.

Pour l’Etat, il serait bon qu’il instaure et respecte les mêmes règles qu’il impose aux autres ; c’est une question d’honnêteté intellectuelle ; un accord d’intéressement pouvant prendre différentes formes. Pour les TPE, elles ne semblent pas concernées par les mesures.

Pour les PME, cela dépendra des cas, mais il est fort à parier que même si l’incitation existe, beaucoup ne prendront pas le risque de mettre à mal leur entreprise dans le temps (un intéressement a une durée de trois ans) s’ils n’ont pas des garanties sur la durée des aides après la mise en place d’un intéressement. Il faut aussi souligner que si cela améliore le pouvoir d’achat ponctuellement, il n’est pas certain que les PME réactivent un accord d’intéressement après la caducité des trois ans sans un minimum d’aide garanti.

Il nous manque certes les mesures clairement explicitées, mais il me semble prématuré d’émettre de fortes critiques à l’égard de cette direction. L’idée me semble assez bonne, mais il ne faut pas que cela influence par trop les évolutions de salaires ; à suivre donc...

Pour ce qui concerne les interventions, dans l’article de presse, j’ai du mal à comprendre celle de M. Chérèque. En effet, la participation, si elle est débloquée immédiatement n’est pas soumise à cotisation sociale ; ce qui est aussi le cas en cas de déblocage après 5 ans. Où est le problème ?

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