Les propositions de Marianne (1)
par Laurent Metais
mercredi 10 janvier 2007
Dans son numéro 507 du 6 au 12 janvier 2007, l’hebdomadaire politique Marianne dresse une liste de réformes qu’il considère comme étant inéluctables pour le fonctionnement correct de la France.
Il sépare cela en sept parties distinctes :
- Rétablir la démocratie
- Rendre à la France à tous les Français
- Restaurer la république
- Réhabiliter l’égalité fiscale
- Revenir aux fondements du libéralisme
- Défendre et rénover le service public
- Refaire la nuit du 4 août
Il est rare, sauf dans les milieux réformateurs ou
d’extrême gauche, de voir des journaux faire leurs propositions
concernant l’Etat. Le journalisme, dans son état actuel, a plus
tendance à analyser/critiquer les propositions des politiciens, sans
pour autant dire ce qu’il pense. Car dans ces propositions, il est bien
marqué au début du dossier que cela a été rédigé par la rédaction de Marianne.
Le journalisme actuellement fait soit la critique soit un rapport
d’information sur l’actualité, en rien il ne participe au débat, sauf
en omettant ou en surexposant volontairement un fait ou une personne.
C’est donc pour cette différence qu’il faut s’attarder peut-être plus
activement sur ces propositions, que sur celles des politiciens qui ont
un intérêt électoral. Avant ses propositions, Marianne fait état de trois conditions minimum pour que ces changements se fassent et puissent fonctionner.
1."Que les citoyens désireux de redevenir
acteurs de leur destin collectif se sentent partie prenante d’une telle
ambition, se mobilisent à cet effet et ne se contentent pas de déléguer
leur pouvoir civique pour cinq ans à un mandataire suprême."
2. "Que toute action
dans le sens de cette révolution « humaniste » s’inscrive elle-même dans
un contexte d’abord européen, et plus largement planétaire- ce qui
implique qu’y soit intégré le refus des diktats et des pressions
hégémoniques."
3. « Que les clivages obsolètes soient dépassés ».
Si l’on veut synthétiser schématiquement, ces
propositions ne pourront fonctionner que si les citoyens s’intéressent
à la politique tout en voulant y participer, en se rendant compte que
cela les touche dans la vie de tous les jours, en essayant de
sortir de la vision franco-française, c’est-à-dire en essayant de voir
ces changements en plus grand et tout cela en abandonnant l’idée qu’une
gauche ou une droite est plus à même de pouvoir résoudre le problème.
(On respire.)
Pour la mise en contexte et compréhension de ce qui pourrait découler de la mise en place des réformes souhaitées par Marianne,
il faut savoir que c’est un hebdomadaire que l’on place au centre de
l’échiquier politique français. Oscillation entre l’UDF (par son
président) et PS (pour les propos en général de l’hebdomadaire, voire
les Verts). Libéral, proche du gaullisme social, mais républicain et
social-démocrate dans l’âme. (Dire démocrate tout court serait biaisé,
car il existe plusieurs systèmes politiques se réclamant d’une vraie
démocratie.)
Concernant les deux premières conditions, il va de
soi qu’elles sont obligatoires pour que cela fonctionne. Bien que l’on
puisse considérer cela comme un cercle vicieux. Car, de l’avis général, les gens en ont assez de la politique, mais pour
que les réformes puissent fonctionner, il faut que les gens s’y
investissent. Or comment s’investir dans une chose à laquelle on ne
croit plus ? Cela, cependant, découle bien plus de l’éducation populaire
et de politiciens francs et honnêtes que d’exemple théorique. Donc
considérons cela comme vrai, mais n’oublions que les gens ne s’y
intéresseront pas tout seuls et sans retour immédiat.
Pour ce qui concerne le point 3, le dépassement
des clivages gauche/droite. Problème. Il est vrai que dans le
fonctionnement d’un système social démocrate et républicain, cela n’a
aucun sens. Gauche-droite ? Mais le but est de faire que l’ensemble de
la population d’une nation aille mieux, il n’y a donc pas plusieurs
points de vue possible, mais un ensemble de discussions et d’analyses à
faire. Or, il ne faut pas oublier que d’autres systèmes et
organisations politique existent. Que tant que l’on n’aura pas trouvé le
système parfait, faire abstraction des autres est complètement farfelu
et irrévérencieux envers l’intelligence de leurs partisans. La monarchie, le communisme, l’autonomie, l’anarchisme, la dictature sont des systèmes possibles dans la multitude qui existent.
Considérer comme extrémistes les anarchistes, c’est ne pas connaître leur
théorie politique.
Les systèmes politiques n’étant pas républicain
sont tout de suite taxés d’extrémistes, pourquoi ? Parce qu’ils ne
considèrent pas la social-démocratie comme étant le meilleur système ?
Pouvons-nous leur prouver par A+B que c’est le cas ? Le dictateur éclairé est
souvent cité comme étant sûrement le meilleur système puisque c’est un
être intelligent qui dirige une masse de moutons. La démocratie directe
alliée à l’autogestion est aussi considérée par d’autres comme étant la
meilleure chose puisque la liberté est le principe premier.
Il faut donc revoir ce point 3, du dépassement des
clivages. Peut-être faudrait-il justement se l’approprier encore plus,
pour que des discussions encore plus profondes puissent s’effectuer.
Essayer de voir pourquoi certains problèmes créés par l’idée de nation
existent actuellement : empêcher le mouvement des hommes, tuer
en son nom, et l’irrespect/haine d’autres personnes juste parce qu’elles
viennent d’un autre pays. Donc le clivage gauche/droite républicaine,
on oublie, mais omettre des penseurs tels que Rousseau, Stirner, Debord,
Rancière et Bourdieu me paraît osé. C’est par des discussions et des
analyses que l’on pourra s’en sortir. C’est pour cela qu’omettre des
gens pensant qu’un autre système serait mieux n’est pas une bonne
solution. Il faut voir comment et pourquoi ces idées ont pu naître,
l’évolution qu’elles subissent et quels sont les changements qu’elles
apportent.