Les risettes du Mans
par C’est Nabum
jeudi 24 novembre 2016
La quenouille de bénitier
Le sacre du goupillon nous est désormais promis : le père François compte vaincre Marine en battant la campagne sur la droite de la dame, tout en allant plus loin que Sa Sainteté du Vatican pour sauver une France qui va retrouver enfin son statut de « fille aînée de l’Eglise ». La « Manif pour tous » a enfanté d’un président, l’hostie servant alors de bouclier pour combattre les maux d’une société en perdition.
La barre résolument à droite, le nouveau timonier de la Sarthe va hacher menu les droits sociaux, ceux de la famille homosexuelle, le statut des fonctionnaires et la fiscalité des riches. Pour faire des rillettes, il ne faut pas y aller de main molle. Ça va être une véritable boucherie, un sacré tour de cochon qui va trancher dans le gras de la classe moyenne et tailler des croupières aux miséreux.
Les maîtres des forges reviennent en force. On peut s’attendre au retour du droit de cuissage, à la messe obligatoire et au rétablissement de la peine de mort. La droite en loden : celle qui méprise le petit peuple, a réussi ce tour de force de se faire passer pour le recours. La faute, c’est évident, à une gauche Canada Dry, qui se situe, à peu de chose près, sur la même absence de respect de la plèbe, la trahison de classe en plus. Car voyez-vous, le gars de Sablé ne trahira pas ses commanditaires, contrairement à l’homme de Tulle.
Le grand chamboule-tout se profile à l’horizon. Le retour des trente-neuf heures, la retraite repoussée au crématorium, le retour des châtiments corporels … tous les espoirs sont permis pour cette révolution réactionnaire. Les seuls à échapper au massacre seront les fraudeurs fiscaux, les grandes fortunes, les détenteurs de fonds de pensions, le bas-clergé et les écoles confessionnelles.
Dieu reconnaîtra les siens dans cette France qui va faire la queue aux restaurants du cœur. On va virer à tour de bras : des fonctionnaires, des étrangers, des jeunes sans diplômes, des chômeurs, des personnes aux mœurs douteuses, sans que le bon président fronce le moindre sourcil. La charité chrétienne s’arrête au parvis de la cathédrale. Chez ces gens-là, on prie puis on lève les yeux au ciel quand le monde réel vient réclamer sa part de Paradis dans cette vallée de larmes.
La commisération ? Certainement pas pour les miséreux. Il convient d’abord de se soucier des grandes familles, asphyxiées par l’ISF : l’impôt le plus inique qui soit. Il convient d’établir une plus grande justice fiscale en taxant tout le monde avec la TVA : la taxe qui punit les « salauds de pauvres », ceux qui n’ont pas l’esprit d’initiative et la chance d’être bien nés. La charité, quand elle est bien ordonnée, se passe aisément de redistribution. Tous pour les uns et rien pour le plus grand nombre.
Le noyau dur du catholicisme triomphant se range derrière l’atome. Il faut penser encore aux grands desseins du nucléaire français : celui qui, un jour ou l’autre, démontrera à tous ces mécréants que l’enfer existe vraiment sur Terre. Nous n’allons plus jamais parler de réchauffement climatique : le pays va rentrer dans une ère de glaciation sociale. On boira le calice jusqu’à la lie avec le nouveau président, le bon Sarthois pur jus
Je caricature ? Si peu ! Même dans son propre camp idéologique, on crie au loup. C’est la Restauration qui est en marche. On va s’amuser … Nous venons de vivre les vingt-quatre heures du flan ; le roi des rillettes en est sorti vainqueur, promis d'ores et déjà au trône en s’installant à la droite du Dieu Poutine, le nouvel ami de la nation. Le bon pratiquant, l’homme de la foi affichée aime à s’allier à ceux qui bombardent les hôpitaux ; c’est vous dire la force de conviction du bonhomme.
Tout va bien au futur Royaume de France. François du Mans va restaurer l’autorité, la confiance, la liberté, les marges et les bénéfices. Pour une minorité, certes, mais celle qui a le plus de mérite. Nous autres, les mal pensants, mal priants, mal embouchés, mal nés, nous n’avons qu’à pleurer nos espoirs déçus. Nos idéaux de justice sociale sont passés de mode : la reprise en main se fera à coups d'ordonnances pour une potion amère et une purge gigantesque. Un grand merci aux socialistes félons qui ont permis aux réactionnaires de sortir du bois en criant au loup ! Après tout, ces derniers auraient bien tort de se gêner : François le félon leur a déroulé le tapis rouge ….
Désespérément sien.