Lettre ouverte aux manifestants du 5 mai

par taktak
mardi 30 avril 2013

Le 5 mai prochain, le FdG appelle à manifester pour une 6e République. Pour "donner un coup de balai" sur ce système pourri et dire le refus de l'austérité. Certes face au dégout que peut inspirer l'affaire Cahuzac, face à la mise en oeuvre d'une politique austéritaire que ne renierait pas Sarkozy par un gouvernement pourtant élu sur le mot d'ordre du changement, face à l'union d'une droite si décomplexée qu'elle n'hésite plus à manifester main dans la main avec l'extrème droite, une réaction des progressistes est indispensable. Le 1er mai constitue une première occasion. Mais réagir ne suffit pas et certains à gauche interrogent le contenu de cette initiative du FdG qui oublie déliberement la question du carcan de l'UE. Dans son appel à la manifestation le FdG indique que "Redéfinir les règles sociales et démocratiques est le moyen pour que le peuple reprenne le pouvoir. La VIe République visera à élargir le socle des droits, à étendre la souveraineté populaire, à favoriser la démocratie sociale" soulignant ainsi explicitement l'urgence de la nécessité de rendre sa souveraineté au peuple et d'engager une politique de progrès social. Mais c'est oublier un peu vite que cette souveraineté est confisquée par une construction européenne qui par construction ne connait que la souveraineté des marchés (ie de la classe capitaliste) et méprise celle des travailleurs.

J Nikonoff, économiste et président du M'PEP le souligne dans un billet récent dont voici une citation :

"Je serai le 5 mai dans la rue aux côtés des sympathisants du Front de gauche. Mais pas pour les mêmes raisons qu’eux. La situation que connaît la France actuellement impose en effet, plus que jamais, qu’elle recouvre sa souveraineté dans tous les domaines. C’est la condition nécessaire de la sortie de crise, même si elle n’est pas suffisante. À cet égard, la sortie de l’Union européenne et de l’euro sont les mesures les plus décisives qu’il convient de prendre. C’est pour cette raison, essentielle, qu’il convient de manifester, dans l’union la plus large, bien au-delà des seules forces qui se qualifient de « gauche de gauche ». Manifester pour « la 6e République » n’est ni adapté à la situation, ni rassembleur. Il faut donc participer à cette manifestation, mais avec d’autres mots d’ordre."

Et J Sapir, économiste, fait en substance la même critique dans son blog ( russeurope.hypotheses.org/1149) dans sa note intitulée VIe République ou Souveraineté, Une porte doit être ouverte ou fermée. JL Mélenchon se propose seulement de l'entrebailler., analyse très argumentée dont voici deux courtes citations.

"Oui, qu’il s’agisse de l’affaire Cahuzac, ou des comportements du trésorier de campagne de François Hollande, il s’agit moins de cas individuels que d’un système. Mais alors, le remède se trouve dans les maux dont nous souffrons. Il faut rétablir la souveraineté de la Nation, et pour cela abroger l’inscription dans la Constitution des différents traités européens. En un mot, il faut rétablir l’État. Cette tâche est à la fois bien plus vaste et bien plus simple que le changement de régime qui nous est proposé"

"en vérité, on évite un problème car on ne veut pas trancher. Et l’on est d’autant plus démuni face à un gouvernement qui met en place, les une après les autres, les mesures découlant de cet abandon de souveraineté et qui se traduisent alors par l’austérité et la financiarisation croissante de la société. Alors, que faire (air connu) ? Je ne me joindrai pas à cet appel, que j’estime confus et démobilisateur, mais je souhaite qu’il y ait le plus de monde possible à la manifestation du 5 mai, et que ce monde ne se limite pas aux militants du Front de Gauche."

Cette exigence de voir plus large et de poser cette question centrale de la nécessaire souveraineté de la Nation - c'est à dire de la souveraineté des travailleurs de ce pays - est également défendue par le PRCF dont une délégation participera à la manifestation parisienne du 5 mai (Le PRCF organise de longue date une conférence internationale à cette date) et y diffusera la lettre ouverte suivante :

Cher(e)s concitoyen(ne)s, cher(e)s camarades,

Face à la crise politique, économique et morale qui ébranle notre pays, vous avez décidé d’une manif dite coup de balai le 5 mai. Alors que la droite ultra, sous l’œil des « Cop’ Pen » et des coquins de l’UMP et du FN s’agite pour récupérer la colère populaire, il est vital de clarifier les objectifs communs que doivent se donner les progressistes. L’heure est grave en effet pour le peuple français, pris en étau entre les frères ennemis du Parti Maastrichtien Unique (formé du PS, de l’UMP, du Centre et d’Europe-Ecologie, qui cassent la République au profit de l’Europe fédérale des régions) et lUM’Pen qui se consolide au fil des rassemblements fascisants (homophobie, xénophobie, mépris pour les fonctionnaires, haine des prétendus « assistés », etc..).

Il serait insuffisant et trompeur de limiter la protestation à l’aspect « éthique » de la crise. Comme les multiples coups tordus (Karachi, Bettencourt, etc.) reprochés à Sarkozy, l’affaire Cahuzac est révélatrice d’un système. A l’abri d’un verbiage « libéral » prolifère ce que le PCF appelait justement, avant sa « mutation » des années 90, le capitalisme monopoliste d’Etat : en fait, derrière le mirage de la « concurrence libre et non faussée », les monopoles capitalistes et l’Etat bourgeois fusionnent plus que jamais à l’avantage des premiers. On le voit avec Cahuzac, l’ami de DSK et des labos pharmaceutiques qui orchestrait les déremboursements Sécu mais planquerait ses étranges millions à Singapour. Dénoncer le « libéralisme » comme le fait le PS est un leurre idéologique typique de la social-démocratie : en réalité il n’y a pas d’issue progressiste capitaliste à la crise du capitalisme ; pour s’en sortir, la France devra sortir du capitalisme et le plus tôt sera le mieux !

Mais mettre en cause abstraitement le capitalisme, comme le font les d’anticapitalistes de parade, ne suffit pas si l’on n’ose pas AUSSI accuser frontalement la « construction » européenne et son euro de malheur. Quelques temps avant le congrès du Parti de gauche, M. Mélenchon, vous aviezit déclaré – prenant soudain conscience de la radicalisation des peuples contre l’UE ? – qu’entre l’euro et le peuple souverain, vous choisirez le secondBravo !Mais immédiatement l’ex-candidat du Front de gauche aux présidentielles s’est fait tancer par la direction du PCF – qui s’identifie désormais à celle de laGauche Européenne (pro-UE et pro-euro !) pour voler au secours de la mensongère « Europe sociale ». En outre une polémique publique a opposé le PG à la direction du PC-PGE (M. Mélenchon a cité MM. Dartigolles et Chassaigne sur son blogue) sur l’idée de listes Front de gauche indépendantes ou pas du PS aux municipales : là aussi la direction du PC-PGE a mis le holà : pas touche aux alliances vitales pour les appareils, fût-ce avec le PS en perdition de MM.Hollandréou et Zapat-Ayrault ! Sous la pression des dirigeants du PC-PGE, qui répudient le combat patriotique de Jacques Duclos et de Georges Marchais contre l’Europe atlantique et supranationale, M. Mélenchon a finalement appelé le PG à s’en tenir à l’utopique réorientation progressiste de l’euro ; et, pour rassurer les militants, une attaque à grand spectacle a été lancée contre le « salopard » Moscovici : certes, cet homme du capital ne l’a pas volé ; mais est-ce un individu qu’il faut cibler ou bien la politique antinationale qu’il applique sous la direction d’Angela Merkel ? Une politique qui, au nom de l’Europe fédérale et du sauvetage à tout prix de l’euro, vide de tout contenu les conquêtes de 1789, 1905, 36, 45 et 68 !

Au final cette agitation à la gauche de la gauche n’a rien produit. Le PS social-maastrichtien accentue la politique d’euro-austérité en complicité avec l’UMP (Traité de Lisbonne, « euro-gouvernance », allégeance à l’OTAN, guerres néocoloniales du Mali à la Syrie, etc.) ; une politique qui creuse le lit des « ennemis » désormais inséparables de l’UMP et du FN. Et pendant que les directions syndicales confédérales s’obstinent à soutenir la « construction » européenne (la CGT, la CFDT, FO, et – s’il ne tenait que d’elle, la FSU – sont affiliées à la Confédération Européenne des syndicats), l’Axe Berlin-Washington, applaudi par les nouveaux collabos du CAC-40, programme l’« évaporation » de la France, de ses acquis, de sa production, voire de sa langue sacrifiée au tout-anglais, tout cela au profit d’une poignée de « bons Français » richissimes à la Bernard Arnault. Tout militant se doit à ce propos d’avoir lu par lui-même le manifeste du MEDEF intitulé Besoin d’aire (jadis on disait – en allemand – espace vital…) : le MEDEF veut ouvertement substituer à la République française la « reconfiguration des territoires » (Acte III de la décentralisation, effacement des départements et des communes au profit des métropoles, des régions transfrontalières, « Charte européenne des langues régionales et minoritaires » visant en réalité à officialiser en sourdine le tout-anglais impérial), les « Etats-Unis d’Europe, notre nouvelle patrie » et l’ « Union transatlantique » officiellement lancée par Obama : cela au mépris complet du Non cinglant opposé par les Français à la Constitution européenne en 2005. Mais pourquoi les dirigeants de la gauche médiatique ne parlent-ils jamais de tout cela à leurs militants ?

On comprend alors le désarroi du peuple français auquel on demande au fond de choisir son genre de mort  : une mort par le démantèlement «  soft » (en fait VEULE) des acquis hérités des Sans-Culotte, des Communards, de Jaurès, du Front populaire, de la Résistance, des ministres communistes de 45-47 et de mai 68, OU la mort déshonorante au moyen d’un « sursaut » fascisant livrant la France aux guerres communautaires et mettant notre pays au ban de l’humanité ?

Alors, si modeste que soit notre organisation franchement communiste, anti-Maastricht et antifasciste, nous demandons à chacun de réfléchir sans a priori à la stratégie neuve, indépendante du PS et de son Europe fédérale, que nous proposons.

Si nous restons dans l’UE et l’euro, c’est sûr, nous « y resterons » ! Mais si nous en sortons par le combat de classe et par la voie patriotique et antifasciste tracée par le CNR, c’est tous ensemble que nous nous en sortirons !

Alors, « PMU » maastrichtien, UM’ Pen, U.E. du capital, euro, OTAN, FMI, OMC, SORTONS-LES, SORTONS-EN … pour que vive la France Indépendante et la République Sociale en marche vers le socialisme !

Le secrétariat national du PRCF 

Léon Landini, ancien officier des FTP-MOI, grand mutilé de Guerre, Médaille de la Résistance, président du PRCF ; Pierre Pranchère, ancien maquisard FTPF, a. député de la nation, ancien m. du CC du PCF, C.V. de la Résistance ; Jean-Pierre Hemmen, fils de Fusillé de la Résistance, directeur de la revue politique Etincelles ; Georges Gastaud, fils de résistant, philosophe, secrétaire national du PRCF ; Jany Sanfelieu, fille de républicain espagnol, secrétaire à l’organisation du PRCF ; Annette Mateu, fille de républicain espagnol, trésorière nationale ; Benoît Foucambert, syndicaliste ; Vincent Flament, rédacteur en chef du mensuel PRCF « Initiative communiste », Antoine Manessis, responsable international du PRCF, fils de résistant grec.

 

Interview de Léon Landini, président du PRCF par l'association pour une constituante  : extrait

 

Question : Que pensez-vous de l’idée d’élire une Assemblée Constituante telle que la propose l’Association pour une Constituante qui en fait le point de passage préalable à toute refondation politique ?

Réponse : A condition d’associer cette proposition politique à l’idée d’une rupture progressiste, y compris unilatérale, avec l’Empire européen, la Constituante est une bonne idée que défend le PRCF, l’organisation que j’ai l’honneur de présider.

Bien entendu, dans le cadre européen supranational et néolibéral, on pourra « constituer » tout ce que l’on voudra, cela ne changera rien. La Constituante qui vise à rétablir la souveraineté populaire, va de pair avec la sortie de l’UE. Tout cela est solidaire.

Pour ne pas me dérober à votre question, bien sûr que la Constituante, si les conditions sont créées pour qu’elle soit réellement l’émanation du peuple, peut être un levier décisif de l’intervention populaire.(...)

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