Libérez la croissance !

par damocles
vendredi 31 août 2007

Après la mise en place officielle de la commission chargée d’enquêter sur les freins actuels à la croissance française, présidée par Jacques Attali, les premières interrogations émergent.

"Libérez la croissance !" Non, ceci n’est pas le slogan de la prochaine manifestation de la CGT. C’est par contre le souhait exprimé par le président de la République dans sa lettre de mission adressée à Jacques Attali, disponible sur le site liberationdelacroissance.fr créé pour l’occasion.

J’apprécie la démarche d’Attali à l’intérieur de sa mission. Voici comment il la définit sur la page d’accueil du site :

« Notre pays est en panne. Sa croissance est une des plus faibles du monde.

La commission pour la Libération de la croissance française va travailler pendant quatre mois pour proposer les réformes permettant de sortir de cette situation. Tous les sujets y seront abordés. Toutes les propositions seront étudiées, chiffrées, analysées. Vous trouverez sur ce site la lettre de mission qui définit notre mandat et la composition de la commission.

35 blogs vous permettent, sur chacun des thèmes, de nous faire des propositions. Soyez assurés que nous les étudierons et les discuterons. Certaines seront sans doute retenues. Merci de votre contribution à cet effort essentiel. »

Suivent ensuite les 35 blogs en question, répartis en 4 grands ensembles :

  • Pouvoir d’achat
  • Compétitivité
  • Travail
  • Politiques et culture de la croissance

L’installation de la commission et sa méthode annoncée fait pourtant de nombreux sceptiques, dont les premiers sont... les économistes, ou en tout cas certains d’entre eux. Dans trois de ses derniers billets, l’illustre Olivier Bouba-Olga se désespère de la composition, trop fantaisiste à son goût (entendez pas assez relevée en économistes), de la commission.

Et c’est vrai qu’en parcourant la liste des membres, j’ai eu la surprise (heureuse, en ce qui me concerne) d’y trouver des personnes que je n’attendais pas ici. De ceux-là sont notamment Boris Cyrulnik, psychiatre auquel on attribue généralement la théorisation de la résilience, mais aussi Eric Le Boucher, journaliste au Monde, spécialisé sur les sujets économiques, ainsi que l’écrivain Erik Orsenna, dont j’apprends à cette occasion qu’il a mené onze ans de recherche sur la finance internationale, ou encore Théodore Zeldin, historien et sociologue à l’université d’Oxford.

De cette liste, je retiens deux aspects :

  • Son hétérogénéité professionnelle. Du milieu de la finance à celui de la littérature, en passant par la politique, la médecine, ou le droit, Jacques Attali s’est entouré de personnalités reconnues dans leur domaine, et, gageons-le, capables d’en analyser le fonctionnement avec un recul constructif. Car la croissance, n’en déplaise aux économistes, n’est une affaire de chiffres qu’au niveau de sa mesure : son moteur est infiniment plus complexe, et détient des soupapes dans chaque infime parcelle d’une société donnée.
  • Sa diversité géographique. Loin de limiter le problème de la croissance française à un débat franco-français, Attali a eu cette intelligence d’intégrer dans sa commission non seulement des entrepreneurs ou professeurs exerçant à l’étranger, mais aussi des personnalités étrangères, à l’image d’Ana Palacio, ancienne ministre espagnole des Affaires étrangères et vice-présidente de la Banque mondiale. N’oublions pas à ce propos, en passant et l’air de rien, que Jacques Attali est lui-même président de PlaNet Finance. Excusez du peu.

Alors certes, il y a les blogs, qui donnent à cette entreprise comme un parfum de démocratie économiste participative. Mais je ne pense pas que l’on puisse comparer ceci à la démarche de Ségolène Royal lors de la dernière présidentielle. Celle-ci voulait en effet consulter les français comme SEULS experts de la situation française, et rédiger un programme A PARTIR d’eux. De son côté, Attali réunit son équipe pour une réflexion intense de quatre mois, et se propose d’éventuellement y inclure les aspects singuliers et inédits que les blogs livreraient. Outre l’humilité que cela suppose par rapport à la tâche entreprise, j’y vois aussi une volonté d’inclure le maximum de Français dans ce mouvement large de libération de la croissance.

Il faut donc attendre quatre mois pour en avoir les résultats définitifs. Je sais, d’autres rapports ont été « pondus », à d’autres époques, sur ce sujet comme sur d’autres. Mais pardonnez-moi cette naïveté de croire que quelque chose a changé en France ces derniers mois. Quelque chose qui fait que désormais, gauche et droite peuvent travailler ensemble pour le bien du pays, que les experts sont écoutés, que les forces intellectuelles et exécutives ne sont plus cloisonnées chacune dans sa bulle sociétale, que les efforts consentis ne sont plus vains. Car à ce sujet, Nicolas Sarkozy a été plus que clair :

« Ce n’est pas un exercice de style. Je vous demande d’être très attentifs, ce que vous proposerez, nous le ferons. Ces solutions concrètes viendront nourrir le projet de loi de modernisation de l’économie que prépare Christine Lagarde pour le début 2008. Si vous voulez aller plus loin et préparer vous-mêmes des textes, allez-y ! Mais sachez que vos travaux seront utiles. Il ne s’agit pas de faire un rapport de plus. »

Enfin.


Lire l'article complet, et les commentaires