Mariage pour tous : débattre de quoi ? et pourquoi ?
par voxpopuli
mercredi 17 avril 2013
L'idée d'étendre le mariage aux couples de même sexe n'a rien d'une invention de François Hollande, il s'agit en effet d'un débat récurrent du monde politique français, un serpent de mer, diront certains, qui resurgit de temps à autre au même titre que le débat sur le non-cumul des mandats ou le droit de vote des étrangers.
Ce genre de thèmes a le mérite de tout de suite enflammer aussi bien l'opinion publique, que les médias et que toutes la classe politique et ce pour qu'après quelques semaines de brouhaha on passe à autre chose sans que rien n'ait changé .
François Hollande fidèle à cette tradition avait abordé ces 3 thèmes durant sa campagne présidentielle en promettant du changement, il avait promis de limiter le cumul des mandats ( proposition n°29 de son programme ), il avait promis le mariage pour tous ( proposition n°26 ) et il avait déclaré à de nombreuses reprises sa volonté d'accorder le droit de vote aux élections locales sous conditions aux ressortissants étrangers hors U.E.
Ayant été élu dans les conditions prévues par notre constitution et sans qu'aucune contestation ne soit possible, on pouvait donc légitimement s'attendre à ce que François Hollande tiennent ses engagements sur ces sujets. Mais très vite, invoquant une absence de majorité en cas de révision de la constitution ( masquant l'absence de courage politique de proposer le référendum ), le droit de vote des étrangers a été jeté aux oubliettes. Concernant le cumul des mandats, face à l'hostilité de nombreux élus souvent issu de sa propre majorité, le président à une fois de plus reculé et même aujourd'hui en pleine affaire Cahuzac, moment idéal pour obtenir le soutien des français sur cette réforme, elle n'est toujours pas au programme.
Le mariage pour tous apparaît donc comme le seul rescapé des promesses de François Hollande, et que l'on soit favorable ou non à ce projet, on ne peut que se réjouir de voir un président mettre en place une des réformes qu'il avait promis dans l'hypothèse de son élection. Cependant, ce débat sur le mariage pour tous qui auparavant n'était qu'un serpent de mer, un diversion dans la vie politique, a pris une toute autre nature dès lors que sa mise en oeuvre est apparue crédible.
Pour comprendre le climat actuel autour de cette réforme, il faut revenir au début de la campagne présidentielle de 2012, le 26 janvier 2012, François Hollande présente son projet politique dans lequel se trouve clairement affichée la volonté d'étendre le mariage à tous les couples. Dès lors, l'élection du candidat socialiste étant probable, l'un des principaux débats de la campagne a été celui relatif à la légitimité du mariage pour tous et surtout de sa corrolaire immédiate, le droit à l'adoption pour les couples de même sexe.
Après son élection François Hollande annonce son intention de mettre rapidement en oeuvre la réforme du mariage pour tous relançant ainsi le débat dans l'opinion, le projet a été présenté en conseil des ministres le 7 novembre 2012, après quoi il a donné lieu à des auditions d'opposants et de soutiens au texte par la commission des lois et dès le 29 janvier 2013, il a été débatu à l'assemblée nationale. Parallèlement au processus législatif, cette réforme a également donné lieu à débat dans la rue avec de très nombreuses manifestations de soutien ou d'opposition, mais aussi à débat sur les plateaux télé, à la radio, dans les journaux, au point que cela fait aujourd'hui plus d'un an que l'on entend parler tous les jours du mariage pour tous, probablement plus que de la crise économique, problème autrement plus grave.
Face à ce constat, on ne peut que s'intérroger lorsque après la décision de l'exécutif d'accélerer le processus législatif, les ténors de l'UMP crient au " putsch législatif " sous entendant par là que cette décision aurait pour effet d'empêcher tout débat sur ce texte et que ce changement de calendrier faciliterait l'adoption de la réforme.
On ne peut que se demander de quoi veulent tant débattre les opposants à la réforme, en effet les termes du débat sont relativement simple et le débat a débuté, il y a de cela déjà plus d'un an. Pour les soutiens au texte, l'argumentaire réside dans la volonté d'égalité des droits pour tous les couples, pour les opposants, il s'agit de la défense de l'idée traditionnelle de la famille et l'intérêt de l'enfant. Les arguments de part et d'autre semble donc assez rapidement épuisable et si les députés opposés au texte voulaient faire valoir leurs arguments, ils en avaient largement le temps lors du premier passage du texte à l'assemblée, mais ils ont préférés faire de lobstruction parlementaire en déposant plus de 5000 amendements, la plupart n'étant que des inepties parlant de mariage incestueux voir même avec des animaux, preuve du niveau des débats dont aujourd'hui certains élus se plaignent de se voir privés.
Ensuite, il importe aussi de se demander pourquoi les opposants veulent encore débattre de ce projet, après tout, les institutions sont faites de tel manière que de toute façon ce texte sera adopté selon la volonté de l'exécutif et que les parlementaires ny apporteront que quelques modifications à la marge. Alors, aujourd'hui, plus d'un an après le début de ce débat, maintenant que chacun a pu développer maintes fois son opinion sur le sujet et que la société française dans son ensemble sait à quoi s'en tenir, il n'y a plus rien de sain à poursuivre éternellement ce débat.
En effet, ce débat qui perdure n'apporte plus rien au sujet lui même, les arguments acceptables de part et d'autre ont été épuisés et le débat tend désormais à s'enliser dans l'extrémisme, agression d'homosexuel, arrestation de manifestants, récupération par des groupuscules dangereux, sans oublier bien sur que le temps consacré à ce sujet est du temps en moins consacré au chômage, au pouvoir d'achat, à la pauvreté...