Martine Aubry évite le procès de l’amiante mais loupe encore Matignon
par Denis Thomas
vendredi 17 mai 2013
La cour d’appel de Paris a annulé la mise en examen de Martine Aubry dans le terrible dossier de l’amiante, elle peut souffler un tantinet. Pour autant, la maire de Lille, meilleure ennemie de François Hollande, si elle voit son avenir politique éclairci par le juge, ne mettra toujours pas les pied à Matignon comme elle en rêve encore. Ayrault a été conforté par l’Elysée.
La justice a également dégagé le moral des six autres fonctionnaires impliqués avec Martine Aubry dans l'exposition à l'amiante des salariés de l'usine normande de Ferdoro-Valeo de Condé-sur-Noireau.
Et c’est dernière cette « relaxe » qui se retrouve coincée dans la gorge des plaignants. L'association nationale des victimes de l'amiante (Andeva) a d’ores et déjà annoncé un recours au Conseil supérieur de la magistrature pour "violation du secret du délibéré". L'association voit dans ces fuites un "motif évident de cassation ».
Dans cette instruction, la juge Bertella-Geoffroy s'est intéressée en particulier à la réponse des pouvoirs publics face au scandale de l'amiante et à l'influence du Comité permanent amiante (CPA), lobby des industriels qui aurait efficacement défendu "l'usage contrôlé" de cette substance pour délayer au maximum son interdiction, finalement intervenue en 1997.
OPINION PUBLIQUE TROMPEE
Marie-Odile Bertella-Geffroy, qui a depuis quitté ses fonctions, avait estimé que Martine Aubry n'avait pas pris les mesures à même d'éviter les conséquences dramatiques de l'exposition des travailleurs à l'amiante, ce que l'ex-patronne du PS conteste avec force.
Plusieurs responsables de l'Andeva – soutien objectif de la juge – se sont montrés dubitatifs quant à la solidité juridique des poursuites à l’encontre de Martine Aubry. A raison, donc.
Andeva, partie civile, n'avait en revanche aucun doute en ce qui concerne la responsabilité des autres mis en examen, en particulier les fonctionnaires et scientifiques qui auraient contribué à "tromper l'opinion publique et les décideurs sur la réalité des dangers" de l'amiante.
En 2005, un rapport sénatorial avait épinglé l'Etat français pour sa "gestion défaillante" du dossier de l'amiante, jugée responsable par les autorités sanitaires de 10 % à 20 % des cancers du poumon et qui pourrait être la cause de 100 000 décès d'ici à 2025.
Fin février, le parquet général avait requis l'annulation de toutes ces mises en examen, estimant notamment que la responsabilité des fonctionnaires ne pouvait être engagée car le pouvoir réglementaire appartient aux ministres.