Matignon : l’erreur de Jean-Luc Mélenchon

par Henry Moreigne
vendredi 26 avril 2013

Invité de l'émission politique de France 2 Des Paroles et Des Actes, jeudi 25 avril Jean-Luc Mélenchon a indiqué qu'il était "candidat à Matignon" pour appliquer "une autre politique". Cette revendication interpelle au regard des croupières que n'a jamais cessé de tailler le co-président du Front de Gauche aux socialistes en général et à François Hollande en particulier.

La prestation de Jean-Luc Mélenchon, fidèle au personnage, n'aura au final suscité aucune réaction passionnée. Non pas que l'ancien sénateur socialiste ait été moins bon que d'habitude mais peut être, parce le film est toujours le même et que les ficelles sont connues. Voix forte, geste agressif, le disque du leader de la gauche de la gauche semble rayé.

Seule vraie nouveauté, l'apparition dans le vocabulaire du tribun du terme de "solférinien". Comme si finalement après avoir jeté l'opprobre sur tous les socialistes et leur capitaine de pédalo, Jean-Luc Mélenchon tentait de renouer des liens avec ses anciens camarades en n'en stigmatisant plus qu'une poignée.

Il faut dire que le champ politique du député européen s'est considérablement réduit ces derniers temps en raison notamment de la cristallisation des mécontentements au PS à l'égard de la politique gouvernementale. Débordé contre toute attente à sa droite par l'aile gauche du PS, Mélenchon a dû réviser ses plans d'autant que son agitation ne semble pas mobiliser les foules. Le ressort n'est pas brisé mais apparaît comme essoufflé, un peu comme si le leader du Front de Gauche ne croyait plus lui-même en sa capacité à monter les blancs en neige.

A cet égard le rendez-vous donné aux mécontents de gauche le 5 mai prochain sera déterminant. Une sorte de roulette russe car si la mobilisation n'est pas à la hauteur, le FG en sortira durablement affaibli au moment où commence à se construire les alliances électorales pour les municipales.

Or, en se présentant comme candidat à Matignon, Mélenchon se tire une balle dans le pied en donnant le sentiment de donner la préférence à une trajectoire personnelle marquée par l'ambition au détriment d'une cohérence politique qui l'enfermerait pour longtemps dans l'opposition. Un peu comme un cheval qui lassé d'avoir le ventre vide finirait par rentrer manger son foin aux écuries.

Jean-Luc Mélenchon aurait pu réussir son OPA théorique sur Matignon s'il avait été en capacité de donner un sens concret à ses propos. Or derrière les affirmations "Je veux qu'on change le centre de gravité, qu'on applique une autre politique", "Je sais quoi faire", Mélenchon a laissé les spectateurs sur leur faim en développant des propositions creuses plus proche du "il n'y a qu'à" que d'un programme gouvernemental qui intègre les contraintes et la réalité économiques.

Et comme le naturel revient toujours au galop, le caudillo du Front de Gauche n'a pu s'empêcher une nouvelle saillie contre ses amis socialistes. "Il me faut pour ça une majorité qui fasse autre chose que d'attendre en rang les consignes de l'Elysée" a-t-il déclaré. Histoire de mettre de l'ambiance sans doute.

Crédit photo : Wikipédia


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