Municipales 2008 : la grande perdante est la laïcité (mais il y a une lueur d’espoir)
par docdory
vendredi 21 mars 2008
Un aspect peu évoqué des résultats électoraux des municipales 2008 est l’accablante défaite du camp laïc. Dans rien moins que quatre capitales régionales, des municipalités ayant violé de façon délibérée la loi de 1905 se sont vues malheureusement reconduites par le suffrage universel. Examinons les faits :
Prenons tout d’abord le cas de Marseille. En 2006, son Conseil municipal avait voté, à la quasi-unanimité (honte à la gauche !) un bail emphytéotique incroyablement avantageux à l’association "La Mosquée de Marseille", qui comprenait la jouissance pour quatre-vingt-dix-neuf ans d’un terrain municipal de 8 600 m2 pour un loyer ridiculement dérisoire de 300 euros mensuels ! Une véritable subvention déguisée à un culte, totalement étrangère à l’esprit et à la lettre de la loi de 1905. Heureusement, le tribunal administratif, saisi (par trois partis d’extrême droite, car malheureusement la gauche n’ose plus défendre la laïcité !) annulait la délibération, à la grande fureur de Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille. Ce tribunal notait à juste titre que "la ville de Marseille n’apportait aucune explication probante sur les modalités de calcul du loyer fixé". Le 16 juillet 2007, le Conseil municipal de Marseille, suite à ce camouflet, diminuait la durée du bail à cinquante ans, avec un loyer annuel de 24 000 euros (prix restant néanmoins dérisoire vu la surface du terrain...). A noter que cette municipalité n’en était pas à son coup d’essai anti-laïc puisqu’elle finance l’association "Marseille espérance" fondée par Vigouroux en 1990 et institutionnalisée par Gaudin, association constituée de responsables de sept cultes. Cette association est subventionnée par la mairie, alors que l’article 2 de la loi de 1905 stipule que la République ne subventionne aucun culte !
Traversons la France et voyons maintenant ce qui ce passe à Lille : Martine Aubry, ancien ministre et actuel maire prétendument socialiste de Lille a poursuivi la mise en place (semble-t-il débutée en 2000 par Pierre Mauroy) d’horaires réservés aux femmes, notamment musulmanes à la piscine de Lille Sud (en 2002, ce créneau horaire a accueilli 70 % de femmes musulmanes). Ces mesures furent prises sous la pression d’associations musulmanes qui jugeaient contraire à leurs principes religieux la mixité dans les piscines. Pendant ces horaires, les baies vitrées sont obturées et le personnel de la piscine est exclusivement féminin. Martine Aubry, tentant à l’époque de se justifier quant à une aussi scandaleuse ségrégation sexiste, contraire aux principes républicains les plus élémentaires et à l’esprit du service public, véritable apartheid téléguidé par des forces obscurantistes parmi les plus rétrogrades, avait osait prétendre que cela donnait aux femmes musulmanes "l’occasion de s’émanciper" ! Quand on pense qu’elle se prétend socialiste, Jaurès et Aristide Briand doivent s’en retourner dans leur tombe : une "socialiste" anti-laïque et anti-féministe, quel abasourdissant oxymoron !
Rendons-nous maintenant à Lyon, où la municipalité, qui, elle aussi, se prétend socialiste, a néanmoins décidé en 2007, au mépris de la loi de 1905 (la République ne reconnaît aucun culte), de prendre l’avis "d’autorités" religieuses et de servir des menus sans viande dans les cantines pour ne pas contrevenir à diverses superstitions religieuses, décision honteuse que j’ai abondamment commentée dans mon article sur Agoravox.
Dernière étape de notre tour de France des capitales régionales anti-laïques : Rennes. Edmond Hervé, maire soi-disant socialiste de Rennes, a trouvé l’artifice pour passer outre la loi de 1905 et financer des lieux de cultes bien cachés. Un "Centre culturel islamique" a été construit aux frais de la ville de Rennes pour la somme énorme d’1 million d’euros et inauguré le 19 septembre 2006. Ce Centre "culturel" contient une vaste "salle de prière" de 200 m², autrement dit un lieu de culte, dissimulé en prétendu "lieu de culture". Edmond Hervé, maire de Rennes, fit à l’époque cette déclaration stupéfiante : "au nom de l’égalité, il me paraît tout à fait normal que les différentes religions puissent bénéficier de notre soutien et de notre participation". Encore un maire qui a complètement oublié l’article 2 de la loi de 1905, votée par ses illustres prédécesseurs socialistes (la République ne subventionne aucun culte) ! Pour lui, la République devrait subventionner tous les cultes, comme le stipule la prétendue "laïcité positive" chère à Sarkozy ! Ceux qui rappellent à la municipalité rennaise la nécessité d’appliquer la loi se font traiter par celle-ci de "racistes". A noter que la ville de Rennes pratique la subvention multicléricale puisqu’elle aide aussi un centre israélite et a fourni des locaux pour le culte bouddhiste !
Quatre villes emblématiques, quatre capitales régionales, quatre municipalités réélues (avec simplement un nouveau maire du même parti à Rennes), malgré quatre violations flagrantes et délibérées de la loi de 1905, au nom d’un clientélisme électoral odieux. Quatre maires n’ayant pas hésité à sacrifier la laïcité pour récupérer un hypothétique vote communautaire dont l’existence n’est même pas prouvée, et ce au prix du déshonneur et de la trahison des valeurs républicaines qu’il était de leur mission de maire de veiller à ce qu’elles soient respectées avec la plus grande vigilance ! Mais, qui plus est, quatre capitales régionales dans lesquelles il n’y avait plus aucun choix électoral possible ou, en tout cas, en position éligible pour le camp laïc ! En effet, à Marseille, la gauche avait trahi toutes ses valeurs en votant, dans une navrante quasi-unanimité municipale ce bail (véritable subvention à un culte) à un prix défiant toute concurrence ! Voter pour la gauche équivalait donc à voter contre la laïcité. Dans les trois autres capitales régionales, la gauche ayant trahi ses fondamentaux laïcs, l’électeur laïc n’avait même pas le loisir de voter pour la droite. L’UMP, comme chacun le sait, est la courroie de transmission du président de la République. Or, celui-ci est de très loin le président le plus anti-laïc de toute la Ve République. Un des fondements de sa "pensée" politique est la rupture, en particulier avec la laïcité, qu’il déteste, et dont il rêve de débarrasser la France (cf. le rapport Machelon et ses discours de Riyad et de Latran). On imagine mal un maire UMP d’une grande ville aller contre les désirs présidentiels en défendant la laïcité... Voter UMP était donc clairement voter contre la laïcité !
Restait à l’électeur laïc le choix éventuel du MoDem. On ne peut certes pas douter de l’engagement laïc résolu de Corinne Lepage, mais pour ce qui est de Bayrou, le moins qu’on puisse dire, c’est que sa conversion à la laïcité est fort récente et paraît des plus fragiles à l’observateur compte tenu de son passé très trouble dans ce domaine. A Lille et à Marseille, le MoDem avait fait en tout cas alliance avec les très anti-laïcs représentants locaux du PS, et ce parti devenait donc un choix impossible pour l’électeur laïc. Devant le renoncement d’une majorité du PS et, encore plus, de ses alliés verts et communistes aux valeurs de la laïcité qui avaient été les siennes depuis toujours, on ne peut qu’espérer la création d’un parti républicain laïc dans lequel ferait alliance ce qui reste de socialistes laïcs (Mélenchon et quelques autres), le MRC, certains radicaux de gauche, le centre et la droite laïcs (Corinne Lepage, Nicolas Dupont-Aignan). Ce mélange sera peut-être difficile à réaliser, mais on ne voit guère d’autre solution pour le camp laïc.
Terminons ce tour de France par un sourire et une lueur d’espoir : à Ploërmel (Morbihan) 9 000 habitants, le très anti-laïc, et que l’on croyait inamovible, maire UMP, Paul Anselin, qui avait défrayé la chronique en faisant édifier dans sa ville à grands frais sur des fonds publics (100 000 euros selon certaines sources) une hideuse statue géante de Jean-Paul II, de plus de 9 mètres de hauteur, exécutée par "l’artiste" russe Zurab Tsereteli, eh bien ce maire a été enfin déboulonné de son poste par la candidate socialiste Béatrice Le Marre, ce qui permet d’espérer que sa statue sera, elle aussi, déboulonnée !