NPA : Nouveau Parti d’Action directe

par LM
samedi 4 octobre 2008

Olivier Besancenot n’en démord pas : l’ancien terroriste Jean Marc Rouillan, encarté au NPA, demeure son ami, n’en déplaise aux juges, au PS ou à la bonne morale. Il appelle à une manifestation de soutien au condamné, au nom de la « liberté d’expression ». Sans rire.

Il était une fois une gentil postier, rond de joue et discret de sourire, énervé pour tout ce qui touche aux inégalités sociales, batteur de pavé et agitateur de banderole, qui avait rejoint un parti pseudo révolutionnaire, rouge sombre et suranné, dénommé « Ligue Communiste Révolutionnaire ». Une sorte de gauche de la gauche, ou gauche ultra, comme dirait Emmanuelli. Le gentil postier, toujours facteur malgré ses activités médiatiques, candidat tout le temps et agacé en permanence contre ce méchant capital dont le sang impur abreuve nos campagnes, qui n’avaient rien demandé, Olivier Besancenot, puisque c’est son nom, devint en moins de temps qu’il n’en faut pour madame Royal de changer de tunique bleue, un des piliers de cette gauche dite caduque, antique, préhistorique qui d’un seul coup d’un seul se révéla porteuse de jeunesse, d’espoir et de promesse, même pour Joey Starr, poteau du postier, fan de NTM. Jusqu’ici tout allait de soi pour l’employé PTT, qui additionnait les bons points tandis qu’à ses côtés la gauche se divisait, s’aplatissait, et finissait presque par disparaître à force d’invraisemblances. Le jeune Olivier, désormais bien rodé aux questions des journalistes, se permit même le luxe d’effacer le « révolutionnaire » de la Ligue, histoire de balayer d’anciens fantômes moches et lourds, pensait-on. Jusqu’ici tout allait bien…jusqu’à ce que Jean Marc Rouillan se mette à parler.

Jean Marc Rouillan, révolutionnaire d’opérette, rejeton légèrement attardé d’un soi disant élan libertaire des années 68, qui s’était compromis avec sa compagne et quelques amis dans un groupuscule anarcho-intégriste qui avait pour objectif de faire payer ces salauds de grands capitalistes pour le mal qu’ils faisaient, aux usines ou dans les têtes. Action Directe, puisque c’était le nom du mouvement, fit régner une certaine terreur chez les politiques et les policiers jusqu’au début des années 80, jusqu’à l’assassinat lâche et injustifiable de George Besse, alors patron de la régie Renault. Les membres d’Action Directe furent arrêtés dans une ferme du Loiret en 1987, puis condamné, plusieurs fois, à de lourdes peines de la prison, dont la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 18 ans. Mais aujourd’hui, Rouillan, est libre. Enfin, était libre. Régime de semi liberté depuis septembre 2007. Régime assortie d’une obligation de ne pas évoquer en public son passé de terroriste. Rouillan d’abord se tait, adhère au mouvement de Besancennot, puis accepte une interview à l’Express. Et là, patatras, l’homme, plus méchant qu’intelligent, se laisse emballer et à une question sur l’assassinat de George Besse et explique confusément qu’il ne peut en parler puisqu’il ne le regrette pas. : "Le fait que je ne m’exprime pas est une réponse. Car il est évident que, si je crachais sur tout ce qu’on avait fait, je pourrais m’exprimer. Par cette obligation de silence, on empêche aussi notre expérience de tirer son vrai bilan critique", dit-il. Une phrase pas nette, interprétée comme une absence totale de regrets par les journalistes, la gauche, la droite, et beaucoup d’amis de Besancenot. Plus loin dans l’interview Rouillan affirme qu’il pense encore aujourd’hui que dans certains cas la lutte armée est nécessaire.

Rouillan ne se renie pas, la belle affaire : a-t-on jamais vu 20 ans de placard rendre un homme meilleur, plus juste, plus tolérant, plus philosophe ? Entre les murs une bête demeure une bête. Là donc n’est pas le problème. Le problème c’est de savoir ce que le gentil facteur Besancenot, soutien depuis pas mal de temps des détenus d’Action Directe, compte faire de son invité bruyant, mal embouché et sulfureux ? Lui qui venait d’effacer le syndrome révolutionnaire de son parti devra-t-il retourner en arrière ou au contraire demander à Rouillan de rendre sa carte ? Dans un premier temps, le facteur se tait. Qui ne dit mot consent hurlent alors les loups socialistes, trop heureux de tenir enfin une lourde casserole à accrocher aux basques du facteur. Besancenot continue à se taire, coupe son portable, refuse de condamner les propos de Rouillan, refuse de l’exclure de son mouvement. Les juges, eux, voient rouge et annulent la mesure de semi liberté de Rouillan, redirigé vers la case prison. Là, Besancenot parle enfin, comme on pouvait s’y attendre, stigmatisant ce qu’il appelle un « acharnement judiciaire » et convoquant tous ses amis à manifester avec lui au nom de la liberté d’expression ! Deuxième lourde erreur du postier, qui a tort de s’obstiner. Hollande boit du petit lait, les socialistes s’imaginent déjà débarrassé pour un temps du gêneur et l’UMP, pour une fois distrait de la crise, se régale.

L’UMP, justement…Que n’aurait-on entendu si dans l’état major de Sarkozy ou encarté à l’UMP on avait déniché un quelconque bandit, terroriste notoire ou assassin pas vraiment repenti ! Que n’aurait-on entendu Besancenot geindre et se plaindre de ce mélange des genres délicat voire extrêmement limite. Les pères la morale se seraient déchaînés, à la pelle et au mortier, sur ce pays qui marche sur la tête voire cette énième « dérive monarchique ». Mais là, pas grand-chose. Laurent Joffrin n’en parle pas trop, Bernard Henri Lévy s’occupe de son livre, Royal répète son prochain show et Emmanuelle Béart doit être en tournage. Les manipulateurs de bonne conscience crient du bout des lèvres, qu’on les entende pas trop, surtout. Le NPA, devenu Nouveau Parti d’Action directe, prétend ne pas s’inquiéter du passé de ses troupes. Bon grain, ivraie, tous ensemble pour le Grand Soir ? En tout cas, selon le facteur Besancenot, le banquier irresponsable est moins fréquentable que le criminel de droit commun. C’est cela, sans doute, la Révolution : l’art d’enterrer la vérité pour mieux recycler les cadavres.


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