On ne pourra pas dire que l’on ne savait pas !

par Robert GIL
samedi 26 mars 2016

   A gauche, on se souvient des désastres et des crimes, des vies brisées au nom du profit insatiable, pour cette « apothéose du coffre-fort » qu’évoque Balzac. Nous n’oublions pas, par exemple, que le Code du travail naît en 1910 après l’horreur de Courrières, dans le Pas-de-Calais. Après qu’en 1906, 1 099 mineurs avaient perdu la vie au fond des puits. Le patron exige alors que le travail reprenne immédiatement. Il stoppe la recherche des victimes… Motif : les actionnaires perdent de l’argent ! Cachez ces misères qui entravent l’entreprise. Et puis, douze jours plus tard, 14 survivants enfouis réapparaissent. Après des nuits de terreur et d’efforts. Miraculés. Enterrés vivants. Ouvriers morts avant d’être morts.

L’émotion est immense. Elle force à créer le ministère du Travail. Pourquoi ? Pour que ce ministère échappe aux diktats des employeurs et au ministère de l’Économie. Avec quel point d’appui, quelle barricade juridique pour résister ? Le Code du travail.

Aujourd’hui, l’inverse est à l’œuvre : le ministère de l’Économie règle de nouveau la politique du ministère du Travail, réduit à n’être que son DRH.

Des 35 heures aux 60 heures : retour au XIXème siècle !

Dans le projet de loi, c’est toujours à partir de la 36ème heure hebdomadaire que se déclenchent les heures supplémentaires. Mais c’est désormais la négociation à l’échelle de l’entreprise qui s’imposera à la loi. Le temps de travail sera donc distribué à la carte en fonction de l’entreprise .jusqu’à présent, on ne pouvait pas dépasser 48 heures de travail par semaine, le projet de loi prévoit la possibilité d’étendre le temps de travail jusqu’à 60 heures ! Les apprentis mineurs pourraient également se voir imposer de travailler jusqu’à 10 heures par jours (contre 8 maximums aujourd’hui) et 40 heures par semaine, sans l’avis de l’inspection du travail.

De plus, sans que l’employeur ait besoin d’obtenir l’accord du salarié, ce dernier pourrait se voir contraint de travailler 12 heures par jour.

On baisse ton salaire ou on te vire !

Sous prétexte de compétitivité et de » préservation de l’emploi », l’entreprise pourra décider de moduler le temps de travail et …. Les salaires (à la baisse évidement) !

Si cela va une fois de plus satisfaire le MEDEF, pas sûr que les salariés l’acceptent. Justement, tout est prévu : ceux qui refusent seront licenciés pour « causes réelles et sérieuses », donc sans les indemnités et les avantages d’un licenciement économique .Nous seront ainsi des salariés plus jetables que jamais !

Le contournement des syndicats !

L’accord d’entreprise va primer. Or jusqu’à présent un accord d’entreprise doit être signé par les organisations syndicales représentatives (30 % des suffrages aux élections professionnelles). Ces organisations peuvent aussi s’y opposer et bloquer le processus s’il est défavorable aux salariés. Cela ne sera plus le cas ! Désormais, le seuil serait relevé à 50%. Mais surtout, en cas de désaccord, le recours au référendum, dans lequel le patron peut user de tous les moyens pour convaincre, pourrait être imposé.

Ça a été le cas dans l’entreprise SMART en Moselle ou depuis on y travaille plus longtemps mais moins payé !

Le licenciement abusif encouragé 

Un patron pourra licencier sans raison, il suffira qu’il s’en paie la possibilité. Jusqu’à aujourd’hui, les indemnités pour le salarié en cas de litige sont fixées à la hauteur du préjudice subi. Le projet de loi instaure un plafonnement en fonction de l’ancienneté du travailleur, permettant donc au patron de budgétiser tranquillement la destruction injustifiée des emplois ! C’est tout simplement la remise en cause même de l’existence du CDI.

Se mobiliser sur internet c’est bien, dans la rue c’est mieux !

Notre choix de civilisation fut depuis Courrières d’adapter le travail aux humains et non pas les humains au travail. Quand F. Hollande veut « adapter le droit au travail aux besoins des entreprises », il écrit l’histoire à l’envers… Il est temps de dire stop !

’’Derrière chaque enfant qui meurt de faim se cache un assassin’’… Jean Ziegler


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