Philippe Poutou, candidat du NPA, pour une immigration sans compter : le gauchisme au secours du patronat européen et du capitalisme !

par guylain chevrier
vendredi 4 novembre 2011

Le candidat du NPA aux Présidentielles, Philippe Poutou, invité lors de la dernière de « On n’est pas couché » sur France 2 (29 octobre), répond à la question de savoir "pourquoi tant d’ouvriers" se retrouveraient "dans le discours de Marine Le Pen ?" Il explique qu’ils se feraient escroquer par un discours de stigmatisation de l’immigré rendu responsable de tous les problèmes, parce qu’ils auraient perdu l’espoir à tort, de la possibilité d’être des millions dans la rue pour imposer une autre politique… Jusque-là, on suit à peu près quoi que, précisément, on puisse s’interroger de savoir de quelle politique il pourrait bien parler ? C’est effectivement plus loin que les choses se gâtent…

Le NPA, en combattant la nation à laquelle il oppose l’icône de l’immigré, fait le jeu du F. N.

Qu’est-ce qu’a donc trouvé comme « arme fatale » le programme des trotskistes aux présidentielles pour nourrir cet espoir susceptible de contrer une Marine Le Pen en verve ou un Sarkozy tout-puissant ? Le NPA, pense au contraire de cette désignation comme bouc-émissaire de l’immigré, que la réponse serait d’abattre les frontières et de régulariser tous les sans-papiers, plus encore, leur donner aussi le droit de vote parce qu’ils paieraient des impôts (Entendu en lien avec la création de richesses - Quoi que les sans-papiers qui ne sont en général pas déclarés ne puissent en payer, une des moindres contradictions de ce discours simpliste)… Rappelons-nous au passage que le vote de l’impôt détermine une démocratie censitaire qui est à l’homme moderne ce qu’est le pithécanthrope à la politique. Ce type de citoyenneté attachée à l’impôt était le propre de régimes bourgeois, heureusement effacés de l’histoire, où le suffrage universel devait échapper à ceux qui, trop pauvres, ne pouvaient le payer. Si nous nous arrêtions à ce seul critère, cela exclurait une partie non négligeable de la population française d’origine immigrée ou non.

Chercher donc l’erreur ! Quel programme révolutionnaire effectivement et tellement nouveau que celui-là qui, au contraire de l‘effet d’annonce, en prenant le contre-pied d’une marine Le Pen en joue le jeu, car quoi de meilleur pour lui faire gagner des voix, que d’opposer ainsi l’immigré à la nation de façon aussi radicale et fantasmatique ?

On oublierait presque, derrière les bons sentiments qui raflent trop facilement la mise ici (Poutou évidement applaudi par le public de l’émission) de la même façon vendeuse que le populisme ailleurs, le fait que la libéralisation des frontières au nom de la liberté de circulation des immigrés et la fin de la citoyenneté française, que signifierait le droit de vote sans condition donné à ceux de nationalité étrangère, convergent dans un effacement de deux conditions essentielles qui fondent la nation : 1-Ses frontières, qui lui permettent de faire valoir le caractère unitaire de notre pays, une loi-un territoire-un peuple, donc l’égalité de traitement devant le droit et la loi avec tous les avantages sociaux pour tous que cela signifie ; le droit de vote qui va avec l’accès à la citoyenneté politique et la nationalité, qui a à voir avec la notion de peuple conscient de ses responsabilités et de l’appartenance à une identité, s’identifiant avec des valeurs, des symboles, des libertés, un modèle social etc. On retire à la nation deux de ses attributs essentiels sans lesquels elle n’est plus et avec elle ce qui l’identifie, car la France a bien une identité, ce pays qui dispose de la législation sociale et du code du travail les plus avancés au monde...

D’ailleurs, à quel pays d’origine de ces personnes migrantes oserait-on demander de renoncer au principe de nationalité, de faire ce que le NPA demande à la France avec l’oubli de son identité ? Peu importe pour ce gauchiste qui dans la pure tradition d’un internationalisme dogmatique qui est plus proche de la religion que de la raison, s’attaque à la nation que le NPA identifie à une discrimination, de la même façon qu’il défend le voile et la burqa contre la République et identifie la laïcité à un racisme !

Derrière les fausses évidences, NPA et patronat même combat…

De l’autre côté, les spéculateurs qui animent les marchés et le grand patronat européen rêvent de lever l’obstacle régulateur des Etats sur l’économie (le fameux moins d’Etat des libéraux) pour mieux livrer sans contrainte à toutes les spoliations, des travailleurs ainsi dépourvus du cadre dans lequel ils ont conquis leur acquis et où ils ont leurs repères, leurs appuis pour se défendre.

Comme le souligne Philipe Lévy, fondateur de Bastille République Nation (BRN)1 : « Classiquement, les représentants du capital plaident sans relâche pour plus d’immigration. L’affaire est aussi vieille que le capitalisme lui-même, qui a « libéré » le marché du travail. Dès lors, plus l’offre de celui-ci est abondante, plus son prix est bas. Concrètement, plus la file au bureau d’embauche est longue, plus ceux qui ont « la chance » d’avoir un emploi sont poussés à accepter des rémunérations et des garanties au rabais. Ainsi, en 2006, le patronat européen (l’UNICE, à cette époque) avait exercé une forte pression sur les pays de l’Ouest de l’UE en demandant « la levée immédiate des restrictions à l’accès des citoyens des nouveaux Etats membres au marché du travail » (1), non sans avoir rappelé que « la libre circulation des travailleurs est une liberté fondamentale garantie par le Traité ». Cinq ans plus tard, cette « liberté » (non de « circulation », mais en réalité d’embauche) étant acquise au sein de l’UE, il plaide pour accélérer l’immigration en provenance de pays tiers. Business Europe (le nouveau nom de l’UNICE) affirmait ainsi, dans une déclaration du 16 février 2011, que « les migrations économiques jouent un rôle clé pour les besoins de l’actuel et du futur marché du travail ». Le texte poursuit : « la Commission (européenne) a pleinement raison de souligner la contribution de politiques d’immigration flexibles et déterminées par la demande (de main d’œuvre) » (…) On s’en doute, en France, le Medef n’est pas en reste. Dans un entretien récent (2), sa présidente stigmatisme « le populisme » en affirmant que « les pays qui se sont repliés sur eux-mêmes se sont appauvris ». A Bercy, Christine Lagarde ne dit pas autre chose. Plaidant pour « protéger et sécuriser » l’immigration légale, elle soulignait récemment que « dans le long terme, on aura besoin de main d’œuvre ». (…) Mais la palme revient sans doute à Jean-Louis Bourlanges, président de la Fondation du Centre. Pour l’ancien eurodéputé, « le refus de toute immigration est une aberration intellectuelle et politique, une sorte d’utopie fasciste » (6). Qui dit mieux ? ». Voilà, la boucle est bouclée !

Le but du patronat européen, facilité l’immigration pour flexibiliser le travail dans un contexte d’effacement des nations et de régression des garanties sociales. On voit bien que les bons sentiments du NPA desservent la cause des immigrés eux-mêmes, qui viennent en France chercher du travail sous une législation sociale unique du point de vue des droits, ou des conditions sociales qui ont à voir avec un modèle social français unique au monde en termes de couverture des risques sociaux, de politiques sociales, de santé publique mais aussi de libertés. Autant de chose qui, avec la fin des frontières et du principe de nationalité, signifierait la disparition de la France comme nation à la faveur de l’intégration libérale européenne, verrait immédiatement cette législation sociale et ce modèle politique qui la soutient se fondre dans un nivellement vers le bas en Europe des systèmes de protection, comme cela en est le projet de plus en plus clairement énoncé à travers ce que nous dit le gouvernement par la voie, entre autres, de Bruno Lemaire. Sur France-Infos, invité le lendemain du dernier sommet européen, saluant le "discours de vérité" du président de la République, il explique :"Je pense qu’on a parfois dissimulé un peu la gravité de la situation aux Français (…) Quoi qu’il en soit, il est urgent aujourd’hui de changer de modèle de croissance et de contrat social français » Tout est dit !

Ainsi, suivre le NPA, en applaudissant à ses bons sentiments en matière d’immigration qui jouent sur un simplisme qui est tout le contraire d’une pensée révolutionnaire, c’est ni plus ni moins donner un sacré coup de main à ceux qu’il dit combattre et c’est trahir la cause du peuple. La haine que vouent ces trotskistes à la nation en raison d’une idéologie internationaliste dogmatique rejoint celle de ceux qui sont les tenants du capitalisme mondialisé et ne veulent plus entendre parler de nations, à l’image de l’évolution que Nicolas Sarkozy fait subir à la France à travers l’Europe du Traité de Lisbonne et les dernières décisions prise pour sauver la zone euro, promouvant un gouvernement économique européen dessaisissant les peuples, entre plus d’intégration et de convergences avec l’Allemagne, de pertes de souveraineté qui en sont solidaires, pour l’affaiblir dans son indépendance, et ce qu’elle a de résistance à travers sa démocratie sociale à une Europe qui la piétine. C’est aussi vouloir affaiblir le rôle de la France en regard de ce modèle opposable au modèle anglo-saxon, intégrateur en contrepoint du second qui sépare en évitant tout mélange. Un modèle dont, il n’y a pas si longtemps, notre cher président disait qu’il avait en France permis d’amortir les effets de la crise de 2008 mieux qu’ailleurs. Précisément, Monsieur le Président, parce que notre protection sociale n’est pas un produit financier soumis aux aléas du marché.

Les extrêmes se rejoignent toujours pour servir le système en dévoyant la volonté du peuple

On ne voit ainsi, pas très bien, ce qu’il y a d’espoir nouveau dans les réponses du NPA qui se montre dans toute l’étendue de son gauchisme totalement à côté de la plaque en regard des vrais enjeux, des intérêts du peuple, immigrés et français confondus. On voit aussi que les bons sentiments sont tout aussi dangereux que la haine de l’autre dans leur fourvoiement, ils sont du côté de l’irrationnel et de la déraison. Les enjeux politiques sous-tendus par la situation actuelle nécessitent autre chose que de l’indignation ou des bons sentiments qui ne sont que l’aspect émotionnelle de la politique qui ne sauraient tenir lieu d’explication ou de programme, encore moins de projet. Avec cette logique de l’émotion on nie la complexité des enjeux politiques et on interdit de les penser, le gauchisme servant ici une fois de plus, les intérêts de classe des dominants, par son extrémisme et son dogmatisme irréformable, tout en contribuant à limiter la pensée à gauche qui pourrait permettre de poser le bon logiciel.

Comme toujours, les extrêmes servent les intérêts des puissants, de ceux qui entendent asservir les peuples, l’une en tentant de les entraîner par l’escroquerie du populisme dans l’impasse du nationalisme et de l’exclusion de toute altérité, désignée comme bouc-émissaire au service de la haine, l’autre en prônant l’altérité comme réponse à tout, obsédé par la destruction de la nation, l’immigré ayant remplacé l’ouvrier dans l’ordre du sacré de la révolution prolétarienne au nom de la quelle on doit libéraliser les frontières pour laisser librement circuler les hommes comme les capitaux. C’est tout simplement servir au capitalisme mondialisé sur un plateau la liberté d’utiliser les travailleurs les uns contre les autres sur un grand marché sans règles.

N’oublions pas que la gauche a abandonné depuis longtemps le peuple qui, justement, ne voit que dans un vote protestataire du type Le Pen, l’opportunité de se faire entendre. La responsabilité en revient à d’autres. L’usage qui est fait de l’immigré par le NPA, contribue un peu plus à ce sentiment général d’une partie non négligeable des couches populaires. Des couches populaires dont les conditions de vie dégradées, l’absence d’espoir, dépassent de loin les différences culturelles ou d’origine qui sont le fonds de commerce de certains.

Plus d’intégration plutôt que plus d’immigration, c’est évident !

La France a toujours été une terre d’immigration, d’accueil, et défendre cela s’inscrit dans l’héritage de la Nation, qui a toujours été généreuse (droit du sol 1889 en France), et l’immigration continuera de contribuer à l’enrichir dans tous les sens du terme, mais pour tout il est question de bonne mesure, d’équilibre. Ainsi, pour que ceux qui entendent venir chercher en France une nouvelle chance la trouve, il faut aussi que les conditions en soient réunies, et cela a à voir directement avec les possibilités d’insertion sociale, de l’intégration de façon plus générale, pour justement éviter que l’argument de mise en concurrence des travailleurs français avec les travailleurs immigrés ne puisse être un recours pour ce patronat qu’il est question de combattre ensemble : travailleurs Français et immigrés même combat !

Il faut donc, pour pouvoir accueillir, un certain espace vital qui, s’il n’est pas respecté en en étouffant les possibilités, condamnent tous ceux qui migrent vers la France à être de plus en plus rejetés aux marges, en mal d’intégration, en mal de trouver leur place parmi les autres. Nous sommes passés de 45000 naturalisation par an en 1995 à 108.000 aujourd’hui, rien qui ne ressemble à un repli raciste de la France.

La question de l’immigration est une grande question politique qui demande responsabilité et une vraie vision de la nation, des choses qui manquent irrémédiablement à ce candidat. La seule réponse viable à la situation c’est plus de nation et plus de république, plus de liberté, d’égalité et de fraternité dans la responsabilité. C’est pousser jusqu’au bout la portée et le sens des attributs de cette République démocratique, laïque, sociale, indivisible bien que décentralisée. C’est défendre cela, Monsieur Poutou, qu’être un révolutionnaire de notre temps !

Guylain Chevrier.

 

1-http://www.diasporaenligne.net/index.php?option=com_content&view=article&id=1532 :-le-patronat-europeen-veut-plus-dimmigration-pierre-levy-du-nouveau-brn


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