Pour le bon sens, suivez les flèches !

par C’est Nabum
mardi 18 décembre 2012

Quand les mots leur manquent !

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Saint truisme, priez pour nous.

Rien ne m'exaspère plus que ce que l'on en appelle au « Bon sens ! » C'est la
farce et attrape des gogos et de tous ceux qui n'ont rien à dire que 
des évidences, des propos qui tournent en boucle de génération en
génération. Car, voyez-vous, la grande particularité du bon sens,
celle qui ne cesse de surprendre les amateurs de géométrie, c'est
 qu'il tourne en rond !
 


Nous venons de sortir d'un quinquennat où ce jeu de piste peuplé de
bonnes intentions et d'idées reçues fut à l'honneur. Le bon sens par-ci, le bon sens par-là, l'ancien président avançait l'argument décisif comme un représentant de commerce du Crédit Agricole. Pour corroborer cette intuition qui l'habitait, il usait, au-delà du raisonnable, du
 sondage d'opinion, ce merveilleux attrape-mouche qui pend au plafond
 de nos idées creuses.
 


Car, voyez vous, on nomme désormais « opinion » ce qui n'est qu'impression 
infondée, réponse approximative ou seulement intuitive. L'opinion 
c'est toute autre chose, c'est une position que l'on prend après un
 examen attentif, argumenté, étayé des tenants et des aboutissants d'un 
sujet donné. Tout le contraire de ce jeu de loterie auxquels de 
braves gens répondent pour se donner de l'importance.
 


Fort de cette mesure aléatoire ou de la direction du vent, nos joyeux 
décideurs, nos analystes experts en tendances profondes, nos princes 
des flux et des reflux du corps électoral, nos chantres de l'opinion 
publique déterminent le sens à prendre, la bonne direction qu'il
 convient de choisir pour flatter les plus vils instincts de l'individu.
 


Alors gardez votre bon sens, messieurs les flèches émoussées, mesdames 
les rombières de 
la bonne conscience. Celui-ci vous conduit dans une impasse, un cul de sac,
 une basse-fosse commune. Aucune issue à cette pensée limitée, à votre 
incapacité à penser autrement, à oser une réflexion complexe et
 dérangeante. Vous n'êtes que les valets de nos plus basses turpitudes 
collectives.
 


Il ne fait pas bon avoir une idée qui diffère, une opinion qui sort
 du rang, un point de vue qui rompt avec les clichés. La pensée unique,
 le conformisme, la tradition, la coutume, la répétition ou la culture 
sont autant de garde-fous devant le risque de la différence, de la 
tentation de la nouveauté, de la folie de rupture. Le bon sens ne va 
jamais dans une direction nouvelle, il ne reprend pas plus une voie 
qui a été oubliée. Il oublie tout simplement de prendre un cap, il 
louvoie, il traîne la patte.
 


Il a besoin de routes balisées, d'un chemin sans risque ni surprise.
 Le bon sens, c'est l'assurance-vie de la prise d'initiative. C'est
 comme ça, ça c'est toujours fait ainsi, c'est la plus sûre manière
 de se donner l'illusion de l'action. C'est désormais la seule option raisonnable dans un monde sans intelligence. Il ne faut pas discuter, il
 n'y a pas lieu de le faire, la majorité silencieuse ne peut se tromper
 quand elle pense comme les élites le lui ont soufflé.

Car voyez-vous, le bon sens a étrangement besoin d'une convergence de
vue entre le peuple et ceux qui prétendent parler en son nom. C'est
 quand la mayonnaise prend, quand la jonction se fait entre l'intuition
 collective et la parole des hautes sphères que la dictature du bon 
sens est au cœur du système. Mais gare au bon peuple quand il pense 
autrement, qu'il nie l'évangile qu'on cherche à lui inculquer de 
force. Si par le plus regrettable des hasards, il se trouve à être
 déboussolé, s'il perd la raison, il ne faut surtout plus s'en
 prévaloir. Nous avons connu ce divorce lors du référendum européen. Le
 bon sens avait perdu la boule.
 


Depuis, fort heureusement, tout est revenu dans l'ordre ! Les tenants 
du pouvoir ont renoncé à demander leur avis au bon peuple dans un 
domaine où manifestement il n'avait rien compris. Le bon sens c'est
 encore de ne pas faire appel à l'opinion publique quand celle-ci ne 
s'est pas ralliée à la sagesse attendue. Car le bon sens ne va que
 dans un seul sens. Il est toujours favorable à l'intérêt de la
 minorité qui profite.
 


Laissons donc nos flèches émoussées nous indiquer la direction à prendre.
 Depuis bien des années, elles n'ont rien appréhendé, rien vu venir, 
rien anticipé, rien prévu. Mais les flèches continuent gaillardement
à nous montrer la voie toute tracée qui continuera à les servir et à
 nous leurrer. Paradoxalement, le bon sens est si ancré dans 
l'inconscient collectif qu'il n'est absolument pas envisageable de 
briser ce cercle infernal qui nous conduit à notre perte au nom soi- disant de notre pensée collective.

Censément vôtre.


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