Présidentielle Académy : le 4e pouvoir sert-il la démocratie ?
par cholet
jeudi 14 septembre 2006
« Staracadémisation », « peoplelisation » et dépolitisation de la vie politique française à l’orée de la campagne présidentielle de 2007.
Alors que les Français désespèrent de la classe politique (un sondage récent indiquait que la moitié des Français ne faisaient confiance ni à la gauche, ni à la droite, pour résoudre leurs problèmes quotidiens), les présidentiables de gauche et de droite jouent du ping-pong médiatique, s’affichant tour à tour en couple ou avec des personnalités du sport ou de la culture... qui sont censées faire bénéficier leur candidature d’un crédit supplémentaire, notamment de sympathie. Mais si c’est le résultat escompté, les électeurs les suivront-ils jusque dans les urnes ?
- La « staracadémisation » de la vie politique française, pour reprendre la formule de Marie-George Buffet, fonctionne à plein depuis que le Ken français, ministre de l’Intérieur et président de l’UMP, et sa principale rivale (selon un sondage d’Expression publique, 62% d’internautes donnent raison à François Bayrou qui accuse les médias d’orienter les Français « vers un choix tout fait entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal en 2007 »), la Barbie socialiste, sont officieusement entrés en campagne. Chacun des deux protagonistes se prêtant évidemment au jeu, se répondant par plateaux télé ou par couvertures de magazine interposés. Le premier, bien qu’à l’Intérieur, n’hésitant pas à aller à l’extérieur, rencontrer G. W. Bush dans sa Maison-Blanche, pour le convaincre de s’encarter à l’UMP avec l’argent du contribuable français. La seconde faisant assaut de « sourires chauds » (J.-P. Raffarin), telle la Joconde en Italie et si l’on a le malheur d’insister, alors là, elle craque...« Elle perd ses nerfs », reconnaît l’éléphant DSK. C’est que dans la Star-Ac’politique, on brille à l’ombre des projecteurs, trop près, on brûle. Jack Lang l’a compris, c’est pourquoi, il essaie de monnayer en poste gouvernemental un éventuel ralliement à Ségolène.
- Autre phénomène notable de la précampagne, celui de « peoplelisation ». Dire que l’on a le soutien de telle ou telle personnalité qui n’a rien à voir avec la politique, est-ce véritablement servir son image de présidentiable ? Commençons par l’UMP qui a fait venir à son université d’été « bras dessus, bras dessous, un vieux rocker et un jeune rappeur », comme l’a noté Ph. de Villiers. Est-ce qu’il suffit que je sois fan de Johnny pour voter automatiquement Sarkozy, ou ne plus acheter aucun disque du rockeur ? Ou encore, est-ce qu’il suffit que Sarkozy embrasse Doc Gyneco (un sondage d’Expression publique donnait 50% d’internautes pensant que Sarkozy avait eu tort de s’afficher avec Doc Gyneco) pour ne plus voter pour lui ou pour devenir fan du rappeur ? Voyons ce qu’il en est pour les artistes et sportifs porte-voix de l’opposition (PS). Ségolène Royal peut compter sur Renaud, lui, l’anti-bobo, votera pour elle si elle passe au second tour. Il y a aussi Balasko et Benabar posant avec les squatteurs de Cachan, et les footballeurs Thuram et Viera les invitant à un match au « SDF », qui font, d’ailleurs, moins de cas des SDF, ce qui ne les empêche pas de placer leurs milliers de bas de laine au Luxembourg à l’abri du fisc français. Mais, là, on rejoint peut-être une préoccupation de Johnny, le sans-papier belge, qui pense payer moins d’impôt avec Sarko en 2007. Donc, résultat du match : UMP-PS, 1 partout.
- Le troisième phénomène, qui est peut-être une conséquence des deux premiers, est la « dépolitisation » qui conduit à une adhésion molle à des principes, à des idées, à des valeurs. Ainsi, on peut se demander si cette surenchère dans le racolage politique du show-biz est vraiment une solution au désamour de la moitié du peuple français envers ses politiques, qui ne place plus qu’un maigre espoir dans les extrêmes, ou qui est totalement indifférent à la vie de la cité. En effet, n’appartiennent-ils pas déjà au même « monde », ces gens riches et célèbres, celui des élites, malgré leur talent ? Le non du 29 mai au projet de traité européen a montré l’ampleur du fossé qui les séparait des Français, nul besoin de remonter au 21 avril, il n’y a pour cela qu’à regarder encore une fameuse couverture de magazine caricaturé en « Ils (Hollande/Sarkozy) se sont dit oui, dites-leur non ».