Présidentielle : le risque et le paradoxe

par Laurent Watrin
mercredi 11 avril 2012

Voter le 22 avril pour des mirages ne produira pas de miracle. N'en déplaise à ceux qui croient aux lendemains qui chantent, mieux vaut choisir l'exigence de vérité et la voie de la rigueur, pour éviter une future austérité après les mensonges de la campagne.

Faire la part des choses. Pas facile. Essayons.

Raisonnablement, ce n'est pas l'élection présidentielle qui réglera tous nos problèmes quotidiens, comme par magie. Le prochain chef de l'Etat ne fera pas de miracles. Même si certains candidats ont tendance à le laisser croire. Démagogie ordinaire. Mais la démagogie de temps de crise constitue un risque majeur.

Lorsque les temps sont difficiles pour une majorité de familles, lorsque les crises entraînent frustrations et peurs à des points culminants, le danger grandit de voir les responsables politiques charrier des rêves impossibles et des délires collectifs. L'Histoire nous le prouve...

Comment retrouver le sens de la mesure ? A l'heure où la dette publique - comme le surendettement dans une famille - menace l'avenir de nos enfants, c'est la question clé. Les affaires de la cité, la conduite de la République doivent retrouver exigence, rigueur et modération.

Exigence de vérité. Rigueur dans la gestion de l'argent public, qui est l'argent de tous. Modération dans l'exercice des pouvoirs. Les trois à la fois ! Pas l'un sans les autres. Un triangle vertueux doit s'affirmer.

Et la rigueur, ce n'est pas l'austérité. C'est l'inverse !

Regardons nos voisins. En Grèce, c'est parce que les gouvernements successifs, droite et gauche, ont manqué de rigueur que le pays berceau de la démocratie est aujourd'hui contraint à la cure d'austérité. C'est par la faute de ces gouvernements corrompus et destructeurs que les jeunes Grecs - ceux qui le peuvent - quittent leur pays pour bâtir leur avenir ailleurs. L'Espagne connaît la même pente à haut risque.

La rigueur, c'est la capacité à organiser efficacement la République pour que les citoyens retrouvent des marges de manoeuvre, des libertés, des raisons d'espérer. La rigueur est aujourd'hui une urgence. Une urgence humaniste qui respecte les personnes en s'appuyant sur la vérité de la situation de l'Etat et la possibilité d'une perspective d'avenir. Car on ne sauvera pas notre modèle social sans la rigueur.

La France est l'un des pays démocratiques où les acteurs de la société - travailleurs, chômeurs, créateurs d'entreprise, syndicalistes sincères, bénévoles d'association... - se sentent oubliés, de moins en moins reconnus par les pouvoirs en place. Tous les pouvoirs : ceux des grandes entreprises, ceux des administrations, ceux des élus politiques du pays et des Institutions européennes insuffisamment démocratiques... La France est aussi l'un des pays du monde où les médicaments anti-dépresseurs se vendent le plus. La France est le dernier Etat démocratique du monde où l'on attend le "médecin" providentiel à chaque élection présidentielle. Si c'est un beau parleur qui raconte des merveilles, le "remède promis" passera encore mieux.

Les électeurs français semblent continuer de croire au "rêve en politique", si l'on se fie aux sondages. C'est l'illusion du discours contre l'intelligence et la raison

Le risque majeur réside dans ce paradoxe : nous savons - tous - raisonnablement quelle voie suivre, mais nous préférons continuer de rêver à des lendemains qui chantent.

Les sondages - faut-il les croire ? - montrent que François Bayrou est à la fois le responsable politique le plus crédible et le plus apprécié (70% de popularité) et le candidat présidentielle raisonnable le moins enthousiasmant (autour de 10% d'intentions de vote). Pourtant...

Le 22 avril, et le 6 mai, si nous voulons éviter le risque, il faudra résoudre le paradoxe.


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