Programme européen pour Strasbourg et sus aux Anglais récalcitrants
par A. Spohr
jeudi 17 octobre 2013
Assez naturellement c’est au Centre, jadis l’UDF aujourd’hui un de ces nouveaux avatars avec la création de l‘ UDI, que les questions européennes sont les plus prégnantes. Alors évidemment, à Strasbourg, c’est une priorité des priorités. Le candidat François Loos, premier déclaré dans la course à la mairie, est aussi le premier à décliner son programme sur ce thème. Ambitieuses ces propositions ! Et on ne copie pas, svp ! Prem’s ! Faudra-t-il déposer des brevets ? Ou souhaiter que les autres citent leurs sources ?
En effet de nombreux points de ce programme font déjà consensus, forcément, au moins en parole dans d’autres camps. Quelques innovations de taille dans le menu pourraient bien logiquement être reprises, même si on change la sauce.
Que ne l’ont-ils fait ? Mais, dit le possible impétrant Loos : « je ne suis pas à l’heure des reproches, je suis dans l’action ». Modéré mais ferme une fois de plus. Ceux qui attendent une vilaine bagarre en seront pour une cruelle déception. Il est vrai que nous ne sommes pas encore dans la confrontation du dernier round. Mais à Strasbourg le sang ne ruisselle pas sur les tribunes surtout depuis l’abandon de la meute de chien de Me Kornmann ex-candidat du FN.
Les postures dépendront-elles alors des états-majors parisiens ? Pour Loos, cela ne sera sûrement pas le cas. Il chemine en paisible cavalier solitaire avec dans ses sacoches, ses projets. Et puis, somme toute, les structures si récentes de l’UDI ne se sont pas encore donné le Stetson ou le Fléchet jacobin pour couvre-chef.
Alors voici une invitation à un rêve… réalisable.
« Il faut casser l’image de Strasbourg constamment sur la défensive ». Défensive pour conserver des institutions que les traités, en principe intangibles sauf à l’unanimité des 28, ont installées à Strasbourg. Parmi elles, le Parlement Européen étant trop souvent l’objet d’attaques de la part d’un lobby puissant mais strictement interne, piloté par des parlementaires britanniques voir ci-dessous, une « task force » est créée en réplique, soit un lobby pro-strasbourgeois, cette fois piloté par la Ville, armé d’une dotation de 50 000 euros. Bonne idée enfin mais pauvreté désolante des moyens !
Selon F.Loos, se targuant d’être en mesure de constituer un exécutif fort, il faut une cellule européenne, interface entre les ministères français et les capitales européennes, à la tête de laquelle sera nommé un « ambassadeur », en fait une sorte d’office de liaison, comprenant des membres du monde socio-économique et surtout des partenaires allemands de l’Eurodistrict car « le rayonnement international de Strasbourg concerne évidemment les deux rives du Rhin ». Force d’attaque aussi pour faire valoir des ambitions non seulement de renforcement des acquis mais encore de leur extension.
« Il faut demander instamment » pour accueillir à Strasbourg de nouvelles institutions comme la Cour pénale internationale pour crimes et délits financiers, le prévisible Secrétariat Permanent de l’Euroroupe mais surtout tout ce qui concerne les relations bilatérales avec l’Allemagne.
De son expérience de ministre ayant siégé au Conseil des ministres de l’UE, le candidat a acquis la certitude que tout ce qui est décidé en commun par l’axe Paris-Berlin est suivi par les autres partenaires, ce qui n’a pas été le cas lors d’un tel essai de rapprochement avec le Royaume-Uni. Il est donc persuadé que ce qui se fait au niveau des Etats doit se faire plus localement dans la future Eurométropole prolongée de l’autre côté du Rhin. Les relations entre cette nouvelle entité dont on ne connaît pas encore les attributions, et l’Eurodistrict devant être clarifiées.
Il propose par exemple qu’une Réunion des Parlements allemand et français ait son siège permanent dans cette zone, Strasbourg devenant le lieu privilégié des Sommets franco-allemands. On l’a vu avec Giscard d’Estaing et le chancelier Schmitt, avec Mitterrand et Helmut Kohl… En bref, il s’agit de faire valoir à la fois la proximité et l’histoire biculturelle pour en faire la capitale des peuples d’Europe, capitale reconnue par les Etats du Nord ( plus proches de l’Allemagne) et ceux du Sud ( plus proches de la France).
Et Strasbourg sera une fête.
« Une fête des Européens sera instaurée annuellement au Jardin des Deux-Rives ».
Le but est davantage d’ordre culturel qu’économique, domaine où Strasbourg est indépassable car, biculturelle par son histoire, elle est devenue véritablement polyculturelle avec ses attributions internationales et les représentations permanentes des 47 pays du Conseil de l’Europe qui englobent évidemment les pays de l’UE.
La participation au Forum Mondial de la Démocratie initié par le Conseil de l’Europe, sera confirmée et étoffée ; un « défilé des Européens » verra le jour pour présenter les pays membres dans des aspects dépassant la seule économie et allant de la culture et des arts à la gastronomie.
D’une façon générale « les écoles, les quartiers, les associations et autres forces vives y seront associés » Attention, il ne suffira pas de « sauter sur sa chaise comme un cabri, en criant Europe, Europe » comme le disait De Gaulle, il faudra participer. Et l’Eurodistrict doit y être impliqué.
En gros voilà donc ouvert un thème essentiel du débat des municipales. Peut-être s’agit-t-il là d’une possibilité de consensus aux contours légèrement fluctuants, ce qui donne la priorité à la considération des électeurs pour la personnalité : une femme ou un homme charismatique, compétent et expérimenté sur le plan national et international, polyglotte de préférence trilingue, sachant s’entourer sans préjugés sectaires des collaborateurs compétents ad hoc.
Messieurs les Anglais, rendez nous notre Europe d’avant votre adhésion.
We want our Europe back. Et shit à la partie europhobe de la perfide Albion !
En raison de l’actualité au Parlement, cette digression de dernière minute que nous osons soumettre ici à tous les candidats y compris ceux dits extrêmes. Ils peuvent y répondre.
En effet on prévoit à nouveau pour la session plénière de novembre le vote au Parlement d’un nouveau rapport sur le siège.( cf ci-dessus)
Cette bataille du siège revient non seulement comme un marronnier dans la presse (Que de temps passé…,titre, excédée, l’excellente spécialiste des affaires européennes des DNA, ACB) mais aussi comme un rituel sacrificiel dans l’hémicycle du Parlement. Tortionnaires en chef : des europarlementaires britanniques qu’on finit par connaître uniquement pour leur obstination bornée à vouloir loger totalement le Parlement de l’UE à Bruxelles alors qu’il a été créé à Strasbourg et qu’ a été toujours confirmé par les traités. Programme de ces francophobes et eurosceptiques Ashley Fox et Edward McMillan-Scott : a single seat (un seul siège). Avec des études bidonnées et des arguments fallacieux ces élus qui, paradoxalement voudraient se retirer de l’Union et qui d’ailleurs, comme tous les autres, n’ont pas la certitude d’être réélus l’année prochaine, consacrent vraisemblablement tout leur temps à cette ridicule bataille qui, même si elle avait une chance d’aboutir, durerait encore quelques longues années. Azincourt à l’envers cette fois !
Si toutefois avec de telles pratiques tolérées, l’Europe perdure, sans changement radical. Ce serait miraculeux.
A Strasbourg certains sont rassurés par les traités et d’autres désespérés par ces alertes répétées, persuadés que le Parlement peut tout. Ce ne serait même pas le cas dans une Europe la plus fédérale possible.
Imaginons le Congrès US décider de siéger à Las Vegas ou à Miami ! Enfin, les Américains n’ont pas la même perception des distances que nous les petit-continentaux et particulièrement les insulaires.
Nous avons dit Parlement ? Nous aurions pu dire Assemblée de notables, la plupart en péril pour d’autres élections ( parachutes dorés) avec quelques dizaines de vrais européens convaincus et actifs et quelques dizaines d’anti-européens du moins sur leurs terres d’élection aussi actifs que les précédents et dans le même sens.
Une fois de plus, le couple franco-allemand peut endiguer ces petites tentatives d’érosion progressive de l’idéal européen, quitte à s’en remettre à un Eurogroupe beaucoup plus puissant qui laisserait dans une longue attente de retour ceux qui n’en feraient pas partie. Question de volonté politique et, en démocratie, volonté des peuples.
Et pendant ce temps là, l’Europe intergouvernementale s’enlise dans les nationalismes, bien loin de l’idéal des pères fondateurs.
Antoine Spohr. (article paru sur Médiapart et Eurojournal également)