Quand La France insoumise devient L’union populaire
par Fergus
mardi 31 août 2021
Réunis en Université d’été, les militants de La France Insoumise ont acté le fait que le nom de leur mouvement laisse désormais la place à « L’union populaire autour du programme L’avenir en commun », plus simplement L’union populaire. Ils ont également été informés des résultats d’un sondage qui montre que les idées contenues dans le programme L’avenir en commun sont très largement soutenues dans notre pays…
Faut-il voir un symbole dans le fait que c’est à équidistance de l’Équateur et du Pôle nord – sur le territoire rural de Châteauneuf-sur-Isère – que les militants du mouvement se sont réunis du 26 au 29 août ? Probablement pas, même si Mélenchon et ses amis entendent bien, durant la campagne présidentielle, faire souffler le chaud sur les attentes des classes populaires et le froid sur celles des profiteurs d’un système dur avec les faibles et tellement complaisant à l’égard des puissants.
En tout état de cause, c’est sur les bords du plan d’eau de ce sympathique village drômois que les militants ont eu la confirmation que La France insoumise s’efface désormais derrière la nouvelle appellation voulue par Mélenchon pour élargir son socle électoral : L’union populaire. Rien n’est pour autant modifié au niveau du programme porté par le mouvement : il reste centré sur les propositions contenues dans L’avenir en commun. Ce changement n’est pourtant pas anecdotique. Il vise, veut croire le candidat à la présidentielle, à démarquer le mouvement du fonctionnement partisan afin de parler directement aux trop nombreux abstentionnistes des classes populaires sans lesquels il ne peut y avoir de victoire, ni même de qualification au 2e tour du scrutin.
Changer le nom d’un parti est-il pour autant une garantie de réussite ? À l’évidence non, si l’on se réfère aux deux principaux changements qui sont intervenus ces dernières années : ni Les Républicains en lieu et place de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) en 2015, ni le Rassemblement national qui a succédé au Front national en 2018 n’ont tiré un profit électoral de ces changements de dénomination. En ira-t-il de même pour la nouvelle France insoumise rebaptisée ? Nul ne peut évidemment formuler le moindre pronostic. Mais un constat semble d’ores et déjà s’imposer : cette initiative risque d’engendrer une confusion dans une partie de l’électorat, entre L’union populaire de Mélenchon (qui sera très probablement siglée UP) et l’Union populaire républicaine d’Asselineau (UPR).
Quelque peu dubitatifs sur le changement de nom du mouvement, les militants n’ont en revanche pas boudé leur plaisir en prenant connaissance des résultats d’une enquête qui tombe à point nommé pour leur redonner de l’énergie à moins de 8 mois du premier tour de l’élection présidentielle. Réalisée en ligne du 9 au 12 juillet par l’institut Harris Interactive auprès d’« un échantillon de 1241 internautes représentatif de la population française », cette enquête portant sur le programme L’Avenir en commun montre de manière éclatante que « les 42 principales propositions recueillent une majorité d’opinions favorables ».
79 % des personnes questionnées approuvent notamment l’« augmentation du SMIC à 1 400 euros ». Et 69 % la « mise en place d’une semaine de travail de 32 heures ». Autre mesure phare, l’« instauration d’une VIe République » est soutenue par 63 % des internautes interrogés. Avec 89 % de réponses positives, c’est toutefois le « plan de relocalisation en France des produits essentiels à la vie quotidienne » qui obtient la plus forte adhésion, à égalité avec « l’allongement de la durée de vie des objets que vendent les entreprises », une proposition dont le succès n’a rien de surprenant tant nos compatriotes sont exaspérés par l’obsolescence programmée des produits de consommation. D’autres mesures, telles l’« augmentation de l’imposition des GAFAM », la « réouverture de lits d’hôpitaux » fermés ces dernières années, ou la création d’un service public dédié au « maintien à domicile des séniors » sont également plébiscitées à 86 % par les internautes.
Il n’en demeure pas moins un inquiétant hiatus aux yeux des militants et des sympathisants de L’union populaire : malgré cette enquête, très positive pour le programme du mouvement et euphorisante pour les troupes de campagne, les sondages réalisés en vue de la prochaine présidentielle persistent, quels que soient les aléas de la vie publique et la pugnacité des opposants au chef de l’état, à annoncer pour 2022 un nouvel duel Macron / Le Pen. Pire : le candidat Mélenchon – dont l’image reste, il est vrai, dégradée dans l’opinion – n’obtiendrait au mieux que la 4e place lors du premier tour, loin derrière ses principaux adversaires.
Le passage du label La France insoumise à celui de L’union populaire sur les affiches de campagne suffira-t-il à entraîner une large adhésion aux idées de L’avenir en commun, condition sine qua non d’une qualification au 2e tour ? Nous le saurons dans les prochains mois. Mais comme l’a souligné avec lucidité Mélenchon ce week-end, « L’abstention (…) est un piège à cons ! » Un constat qu’il a fait suivre d’une vigoureuse interpellation des abstentionnistes : « Alors quoi, c’est trop d’efforts de se bouger ? », avant d’enfoncer le clou pour les mettre face à leurs responsabilités : « Les esclaves [eux-mêmes] se bougeaient » pour se libérer de leurs chaînes.
À méditer par tous ces anciens électeurs des classes populaires qui ont déserté les bureaux de vote…