Quand planifier les législatives ?

par Fergus
mercredi 13 juin 2012

Depuis la réforme voulue par Lionel Jospin, la logique du quinquennat place les élections législatives dans le sillage de la présidentielle, au risque de démobiliser les Français, saturés par des mois de campagne visant à désigner le locataire de l’Élysée. Faut-il organiser ces législatives en même temps que l’élection présidentielle ? Certains le préconisent. Ce serait pourtant une fausse bonne idée...

La morne campagne des législatives 2012 mais plus encore le fort taux d’abstention enregistré lors du 1er tour du scrutin (42,77 %) suscitent débats et interrogations dans la classe politique et les médias. Le faible taux de participation – moins de 6 électeurs inscrits sur 10 – devrait logiquement amener le pouvoir politique à se pencher sur la question pour enrayer dans l’avenir la désaffection croissante des urnes.

 

En choisissant de s’abstenir à un tel niveau – le plus élevé de la Ve République pour un scrutin législatif –, les Français ont en effet contribué à rogner un peu plus la légitimité des parlementaires, une légitimité déjà mise à mal dans l’opinion par la médiatisation des privilèges et la publicité de quelques affaires peu reluisantes. Il semble donc urgent de redynamiser les élections législatives en vue des prochains scrutins.

 

Différentes idées sont avancées, allant du vote obligatoire – un serpent de mer – à l’organisation concomitante des scrutins présidentiel et législatif. Á la lecture des éditoriaux, c’est cette dernière suggestion qui semblerait avoir la cote, y compris, murmure-t-on ici et là, au sein même de la présidence, François Hollande ayant été à juste titre interpellé par le faible taux de participation du 10 juin.

 

A priori, il s’agit là d’une excellente idée : elle aurait en effet le mérite de limiter à deux dimanches le nombre des jours de scrutin là ou il en faut actuellement au minimum trois et le plus souvent quatre selon les circonscriptions ; cette innovation constitutionnelle permettrait en outre de mener en parallèle les campagnes présidentielle et législative, avec à la clé un moindre risque de saturation d’un électorat désormais sollicité depuis les primaires.

 

Dans un pays où le résultat de la présidentielle est en général serré, cette suggestion souffre pourtant d’un grave défaut qui pourrait bien se révéler rédhibitoire aux yeux des constitutionnalistes : faute de connaître le Président élu, le vote législatif se ferait de manière aveugle, avec pour possible résultat au soir du 2e dimanche une aberrante cohabitation, en contradiction avec les réflexes légitimistes de nos concitoyens, mais également en contradiction avec l’esprit de la Ve République new-look.

 

Dès lors, de deux choses l’une : ou l’on décide de sauter le pas vers un régime parlementaire Primo-ministériel, et l’élection concomitante du président ne sert plus qu’à désigner le titulaire d’un rôle secondaire de gardien des institutions à l’anglo-saxonne ; ou l’on maintient les législatives dans le sillage de la présidentielle afin que les électeurs puissent, comme aujourd’hui, se prononcer en fonction de la couleur du Chef de l’exécutif élu lors de la présidentielle.

 

Encore faudrait-il dans ce cas réduire le délai séparant les deux scrutins pour limiter le phénomène de démobilisation. Actuellement il est de cinq semaines, et c’est évidemment beaucoup trop long. Sans doute faudrait-il ramener ce délai à deux semaines, un temps amplement suffisant pour mener campagne sur les idées nationales que sont censés porter les députés dont on oublie trop souvent dans l’opinion que, contrairement aux élus locaux, ils ne sont pas au service des questions locales, mais au service de l’intérêt général.

Dans quel sens ira l’inévitable réforme qu’impose le bon fonctionnement du couplage présidentielle-législatives voulu par Lionel Jospin ? Sans doute faudra-t-il attendre quelques mois pour en avoir une idée après que François Hollande en ait débattu avec ses proches collaborateurs et les constitutionnalistes. Mais une chose est sûre : les choses ne peuvent plus rester en l’état, et cette question devra impérativement être réglée, comme devra être réglé, de manière tout aussi impérieuse, la question des parrainages visant à sélectionner les candidats à l’Élysée.


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