Quelques homards plus tard, où en est l’écologie gouvernementale ?

par Michel DROUET
dimanche 28 juillet 2019

 

Après le départ de Hulot, la création d’un Conseil de défense écologique, le départ d’un marquis aux petits pieds pourtant blanc comme neige près à se rallier à toutes les causes pour peu que cela lui permette de faire briller sa particule au firmament de la vacuité politique, et enfin la nomination d’une techno qui cumule transports et écologie, essayons de faire un point.

Depuis que Macron a décidé que le bon niveau pour l’écologie, c’était l’Europe c’est peu de dire que la présence d’un Ministre de l’écologie dans le gouvernement n’est pas utile sinon pour signer en catimini des arrêtés favorables à la chasse et autres dérogations à la règle pour des agriculteurs qui construisent des retenues sans autorisations.

Tout se décide donc (ou pas) au Conseil de défense écologique qui est à l’écologie ce qu’est l’IGPN à la police, c’est-à-dire que cela permet de ne plus traiter les questions à chaud mais de les délayer dans le temps en espérant que les victimes oublieront.

Nous sommes dans la gestion du temps politique, donc court, alors, on bricole, on diffère, on analyse, on créé des groupes de travail dans lesquels les défenseurs de l’environnement seront minoritaires, on met en avant le bio en oubliant de verser les aides, ou bien les circuits courts qui n’offrent pas toujours les garanties sanitaires nécessaires, on communique sur la nécessité de fermer le robinet quand on se brosse les dents.

Devant la presse, on s’interroge sur le modèle agricole, les cultures gourmandes en eau, ou les systèmes d’irrigation plus économes, mais sans jamais se donner les moyens de réformer la politique agricole. On pose des questions juste pour dire qu’on est bien au courant des difficultés mais qu’on n’y peut rien, la FNSEA et les Chambres d’agricultures dirigeant de fait la politique agricole du pays.

Cela donne des choses cocasses comme le creusement en toute illégalité d’une retenue d’eau financée par la chambre d’agriculture du Lot et Garonne sans que les autorités ne bronchent ou si peu : tout cela devrait être régularisé a posteriori…

Autre cocasserie, l’assèchement progressif de la Gartempe dans la Creuse a conduit le Maire d’une commune a inciter ses administrés à acheter le l’eau en bouteilles plastiques : elle est pas belle la vie ? Les industriels comme Nestlé qui pompent sans retenue nos nappes phréatiques (alors que l’eau devrait être un bien commun) et se font des bénéfices importants, vont pouvoir les accroitre sur le dos des consommateurs, sans que l’on se pose la question des responsabilités du manque d’eau. Comble de l’humour noir, il se trouve des habitants concernés se disant prêts à faire un effort, et donc à payer, sans se poser de questions.

Autre bel exemple de la gestion à court terme, mais qui commence à s’éterniser (plus de trente ans tout de même, que le problème existe), les algues vertes qui prolifèrent sur le terreau des rejets et de la pollution agricole. Chaque année, on entend dire que les choses s’améliorent, sauf que cette année, c’est la cata et que même l’usine de traitement de Lantic (22) a dû fermer ses portes devant l’afflux de déchets ramassés sur les plages. A part le décès reconnu imputable aux algues vertes d’un conducteur de camion affecté au ramassage des algues vertes échouées sur les plages, les autres incidents (mort d’un cheval, d’une harde de sangliers) démontrant bien la dangerosité de l’hydrogène sulfuré que dégagent les algues en pourrissant sur les plages sont largement sous-estimés. Ce sont donc des panneaux interdisant l’accès aux plages, l’argent dépensé par les communes et le manque de recettes du tourisme qui font office de réponse définitive aux questions.

L’agriculture, les ressources en eau, les méfaits des pollutions liées aux rejets et traitements des sols, tout cela fait déjà beaucoup, mais il y a une contrainte moins connue concernant l’agriculture : préserver les terres en évitant l’étalement urbain… Les établissements publics fonciers prélèvent une taxe sur les ménages affectée à des aménagements dans le domaine de l’habitat destiné à préserver (donc, densification urbaine) le terrain de jeu de l’agriculture intensive.

Tout cela serait bien si ce dogme de la préservation n’avait pas d’effets pervers. Comment faire comprendre au pékin moyen que préserver des terres agricoles chargées en nitrates, glyphosates et autre pesticides s’inscrit dans une démarche écologique ? Comment faire comprendre à ce même pékin que cette politique provoque une hausse des coûts de l’immobilier et la raréfaction des biens ? Ce qu’il comprend très bien ce pékin moyen, c’est qu’obligé de se loger en périphérie à 20 bornes de son travail, il devra prendre sa bagnole, en changer souvent s’il veut avoir la bonne vignette crit’air. Au final ça lui coûtera cher, parce que le dogme de la préservation des terres agricoles empêchera la construction de voies dédiées aux transports collectifs qui lui rendraient bien service pourtant… La trottinette et le vélo ne sont pas une réponse à tout.

Autre effet pervers, la rénovation urbaine qui touche désormais toutes les communes situées dans des grosses intercommunalités et qui aboutit à la densification de l’urbanisme et l’accroissement des populations (sans solutions nouvelles de transports collectifs) par la suppression de zones vertes et par conséquent à la création d’ilots de chaleur lors des canicules. Bel exemple d’incompatibilité entre les projets d’urbanisme et la gestion au quotidien des effets du réchauffement et l’absence de réponse en matière de mobilités.

Bon, ne soyons pas complètement pessimistes, le CETA et le Mercosur, vont bientôt mettre de l’ordre dans tout cela puisque la pollution liée à notre modèle d’agriculture intensive sera externalisée dans les pays de ces nouveaux partenaires commerciaux. Le problème sera réglé puisque nous importerons les mêmes produits pollués que nous continuerons de manger et nous en ferons subir les conséquences à des populations lointaines. Cela s’appelle externaliser. Notre pays sera bientôt un éden, pays de référence en matière de culture bio moins gourmande en eau et en espaces. Nous pourrons à nouveau investir dans des voies réservées pour les transports en commun et sur nos routes ne circulerons plus que des véhicules électriques qui seront bientôt les seuls à bénéficier de la prime à la conversion… De nouvelles opportunités s’ouvriront peut être alors pour le transport ferroviaire permettant l’accroissement du fret et la diminution du nombre de camions avec ferroutage obligatoire. Bon, nous sommes loin de tout cela mais c’est peut-être ce schéma qui est en germe chez nos docteurs Folamour gouvernementaux. Pour l’instant, constatons simplement que la nouvelle Ministre de l’écologie est en train de torpiller la ligne du train des fruits et légumes entre Perpignan et Rungis. Le court terme, toujours…

Que faire pour diminuer les gaz à effets de serre liée aux bâtiments ? Dans ce domaine il suffit de décortiquer les dispositifs mis en place pour prévoir un fiasco en ce domaine. La gestion de fait du dispositif a été déléguée au secteur privé. Un véritable harcèlement téléphonique est en œuvre pour vous proposer l’isolation à 1 euro et les méthodes sont loin d’être honnêtes puisque les appelants se font passer pour des autorités administratives (Etat, Région, département, agence,…) pour vous convaincre d’isoler votre maison même si c’est déjà fait et même si vous n’y avez pas droit (plafond de ressources). Ils oublient de vous dire qu’une fois la surface (limitée) prévue isolée, il vous faudra passer à la caisse si vous voulez faire le reste. Grosse arnaque, donc, et tout cela avec l’accord de l’Etat et grâce à l’incompétence du système Bloctel qui ne régule absolument pas ces appels téléphoniques litigieux.

Et si on voulait définitivement se convaincre de l’inefficacité du dispositif, il suffit de constater que Mme Borne, la nouvelle Ministre de l’Ecologie (sic) s’est opposée à un amendement parlementaire au projet de loi Climat Energie, interdisant la mise en location des passoires thermiques à partir de 2023. Il ne faut surtout pas désespérer les bailleurs privés vont donc pouvoir continuer à louer leurs taudis thermiques. Ce sera pour plus tard, après la prochaine échéance électorale… avec une date de mise en œuvre dépassant la fin du prochain mandat pour que les nouveaux venus au pouvoir puissent abroger le texte, ce qui permettra aux tenants actuels du pouvoir de dénoncer « une forfaiture » et « une attaque sans précédent contre la planète »…

Interchangeables, et toujours sous l’influence des lobbies qui leur promettent les pires conséquences en matière d’emplois si des mesures trop contraignantes sont mises en œuvres, nos petits marquis ministériels et leurs godillots parlementaires sont juste là pour parler et dire que demain on rasera gratis et pour se faire réélire et profiter de la cantine, pas pour être efficace. 

C’est le Ministère de la Parole qui s’agite et produit du vent. Pas besoin de crédits affectés à ce Ministère. A défaut de mesures cohérentes, on continuera de taxer en faisant croire que c’est bon pour la planète.

C’est la politique du brumisateur, de la gourde, de la fin du coton-tige et des pailles en plastique, du mousseur de robinet, et de la brosse à dents au manche en bambou. C’est dire si le climat va s’améliorer !

 


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