Réélu à sang pour sang

par olivier cabanel
lundi 18 juillet 2011

A 9 mois des présidentielles, la cote au plus bas du candidat présidentiel fait débat dans son camp, et l’on s’interroge sur la pertinence du choix du candidat, certains étant tentés de prendre le relais pour sauver une situation plus qu’incertaine, et pourtant…

Il est certain que le temps n’est pas au beau fixe pour le candidat de l’UMP, et dans les rangs même du parti, d’autres candidats pourraient être tentés par l’aventure. Lien

Il faut reconnaitre que le bilan présidentiel n’est pas des meilleurs, d’abord parce que la France n’a jamais connu un tel déficit dans son histoire : alors que l’Allemagne est positive à +153,3 milliards d’euros », la France est négative à - 33,4 milliards d’euros » et la dette publique a atteint 81,7% fin 2010. lien

On ne peut plus donc accuser « l’euro fort », mais seulement une gestion défaillante. ( p 37)

Le chômage continue sa chute libre, (lien) et on ne peut plus accuser les immigrés de cette situation, le gouvernement ayant arrêté le flux migratoire ainsi que l’a constaté l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique). lien

Et pour finir le tableau l’économiste Philippe Dessertine, assure que la crise de la dette publique en Europe arrive en France. lien

Voilà qui tombe plutôt mal pour l’autocrate présidentiel qui avait promis en 2007 que nous allions gagner plus, et qu’il en finirait avec le chômage.

Et pourtant, certains stratèges pensent qu’il resterait un plan qui permettrait presque à coup sur de faire gagner le clan UMP.

C’est une loi récente qui lève un coin du voile.

Chaque année, on peut le remarquer, c’est au début de l’été, profitant des vacances, que des lois contestables sont discrètement promulguées.

En effet, depuis le 1 juillet, la police est autorisée à tirer à balles réelles sur les éventuels manifestants, et ce n’est pas un premier avril.

Le décret n° 2011-795 du 30 juin 2011 permettant cette scandaleuse décision a été publié, avec entrée en vigueur immédiate : l’article 3 du décret autorise l’usage de « fusil à répétition de précision de calibre 7,62 x 51 mm et ses munitions ». lien

Mais quel rapport cela pourrait-il avoir avec l’élection présidentielle ?

Pour le découvrir, revenons en 2005, alors que Nicolas Sarközi est ministre de l’intérieur. lien

Jean pierre Havrin, commissaire de police a été licencié par celui-ci pour avoir regretté l’abandon de la police de proximité, (lien) et dans une banlieue devenue zone de non droit, Sarközi va lancer quelques provocations devenues célèbres depuis, utilisant les mots « racaille  » et « karcher  », puis une course poursuite entre policiers et jeunes finit dans un transfo dans lequel deux gamins trouvent la mort.

La suite, on la connait, 12 jours d’émeutes, 10 000 voitures brulées dans 300 villes et couvre feu. lien

L’état d’urgence, déclaré le 8 novembre 2005 et sera prolongé pendant 3 longues semaines. lien

6 ans après, la situation s’est encore dégradée, et 40 % des jeunes de banlieue d’origine, même ancienne, maghrébine, sont au chômage, quelque soit leur niveau d’étude. lien

Achille Mbembe, professeur d’histoire et de sciences politiques à l’université du Witwatersrand, à Johannesburg évoque plusieurs raisons à cette situation, évoquant la banalisation du racisme : « la Bête, que dans l’ordre de la démagogie l’on déployait de préférence à l’encontre des étrangers, aujourd’hui se retourne contre le corps politique lui-même et menace de le diviser en « Français de pure souche » et « Français pas tout à fait comme les autres  ».

Il affirme que le Lepenisme a été relayé par le Sarkozysme. lien

C’est l’occasion de découvrir l’humour grinçant d’une certaine Bénédicte Frousson qui donne sa vision du racisme français. vidéo

D’autre part, dans ces banlieues abandonnées, pour subvenir à leurs besoins, les « laissés pour compte » se sont tournés vers les commerces illégaux, et notamment celui de la drogue.

On le sait, de tout temps, le commerce de la drogue a été l’une des plus importante source de revenus de la Maffia, et le refus présidentiel de légiférer sur le sujet, permet un trafic plus que juteux.

Un véritable réseau est organisé, avec des guetteurs, des vendeurs, des planques, des « nourrices » des trésoriers, des revendeurs, des règlements de compte et l’argent de la drogue permet tout : achat d’armes lourdes, grosse cylindrées… vidéo

Si l’on prend l’exemple du haschich, le kilo est vendu 250 € au Maroc, en France, il en vaut 1200 €, puis les grossistes le coupent avec des produits frelatés en fabricant 5 kg de produit fini avec 1 kg de départ : au final, une barrette de 5 gr est vendue entre 25 à 40 € ce qui met le kilo à 8000 €, multipliant ainsi par plus de 30 le prix de départ, et le marché est encore plus profitable pour la cocaïne. lien

Arrêter tout ça serait assez facile si ces drogues étaient libres à la vente, sous contrôle d’état, et surtout si les drogués étaient d’abord considérés comme des malades, plutôt que comme des délinquants.

Mais revenons au scénario hypothétique.

Nous avons donc d’un coté des gangs en banlieues, dotés d’armes lourdes, (vidéo) et de l’autre coté, un président sortant qui fait sa campagne sur l’insécurité, choix contradictoire avec la réalité, puisque c’est Brice Hortefeux en personne qui déclarait en janvier 2011 : « pour la huitième année, l’insécurité recule en France ». lien

De plus, la Cour des Comptes a critiqué avec virulence dans son rapport paru le 7 juillet dernier la politique sécuritaire de Sarközy. lien

Cet automne, à la rentrée, la situation se sera encore plus dégradée, et une simple étincelle mettrait le feu aux poudres.

La police est bien renseignée : elle connait les dealers, et ce ne sont pas tous des gamins, certains ont un casier chargé, la trentaine d’année, et sont prêts à en découdre.

De plus Claude Guéant, veut remettre en place la délation, appelée pudiquement « participation citoyenne », rappelant les pages sombres de l’occupation.  lien

De l’autre coté, il y a les forces spéciales, formées à la guerre en banlieue à St Astier, en Dordogne, (lien), armées pour une vraie guerre, et qui ont le droit de tirer à balles réelles sur les manifestants.

Sur place, le commissaire Christian Hirsoil, directeur départemental adjoint de la sécurité publique de Seine et Marne décrit le dispositif : « pour maintenir l’ordre public (…) on peut utiliser un passage d’hélico qui dispose d’un zoom énorme (…) est-ce qu’ils ont mis des bouteilles sur les toits des immeubles, est ce que les trappes d’accès sont pétées ? (…) (…) s’immerger dans le quartier en se faisant passer pendant un mois ou deux pour un ouvrier spécialisé d’une régie de quartier (…) utiliser des unités de surveillance très spécialisées de l’armée pour monter pendant plusieurs jours des surveillances physiques enterrées (…) formés pour pénétrer un dispositif ennemi en profondeur ».

La France préparerait donc son armée à intervenir contre le peuple ? lien

C’est ce que prétend David Servenay dans « Rue 89 » le 3 octobre 2010 écrivant « L’état se prépare à une guerre dans les citées  ». lien

Il a interviewé le chercheur Hacène Belmessous, lequel a d’abord remarqué que les opérations de rénovation urbaine se font sur les conseils de la police qui estime s’il faut détruire telle barre d’immeuble plutôt qu’une autre. lien

Il ajoute « 10 000 hommes ont été formés, et on trouve dans «  le livre blanc de la défense de 2008  » le détail du plan présidentiel ». lien

Il s’est interrogé sur la venue en France, en 2005, de soldats de Tsahal, spécialisés dans la guérilla urbaine, venus manifestement faire profiter aux soldats français leur expérience.

Pour Hacène Belmessous dans son livre « génération banlieues  » (éditions la Découverte) (lien) « la banlieue est un brasier qui sert le pouvoir  ».

Voyons comment cela pourrait se passer.

A l’automne, des gendarmes sont envoyés dans un quartier sensible afin de multiplier les contrôles, ça dégénère et il y a mort d’homme.

Emoi présidentiel, qui, accompagné de médias, et de ses forces spéciales va jouer au matamore dans la banlieue en question.

Faisons lui confiance pour renouveler son répertoire au-delà de « racaille » et « karcher ».

La suite est prévisible.

Emballement et émeutes en hiver dans toutes les banlieues de France et de Navarre.

Sarkozy, en « libérateur du territoire », envoie au début 2012 ses 10 000 membres des forces spéciales, et les Français terrorisés se calfeutrent dans leurs logements.

L’opposition tergiverse, Marine le Pen dénonce les 7 années perdues, jugeant la situation plus que prévisible, des bâtiments brulent, il y a des morts de part et d’autre dans une France plongée dans un long couvre feu, puis, au bout de plusieurs semaines d’une guerre acharnée, l’armée finit bien sur par triompher des gangs, les prisons se remplissent, et les immeubles se vident.

C’est le printemps, on repeint les façades, on bouche les trous, on enlève les carcasses de voitures, on plante quelques arbres, et la campagne présidentielle prend un tour nouveau dont l’issue ne fait plus de doutes.

A moins que !… car comme dit souvent mon vieil ami africain « la merde plongée dans l’eau remonte toujours à la surface ».

L’image illustrant l’article provient de « owen-75.blogspot.com »

Articles anciens sur le sujet : Sarközi, le pompier pyromane, Tout ça pour une réélection, vous avez demandé la police ?


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