Remettre en perspective la victoire du FN à Brignoles

par Laurent Herblay
mardi 15 octobre 2013

Dimanche, le FN a repris le canton de Brignoles, gagné en 2011, puis perdu en 2012. Si le succès du parti de la famille Le Pen est indéniable, parler d’échec du front républicain reste néanmoins un peu abusif si on prend en compte l’histoire et les reports de voix, comme le rapporte le Monde.

Un vrai succès pour le Front National
 
Certains, comme Libération, voulaient se rassurer à bon compte en évoquant la stabilité du nombre de voix qui s’étaient portées sur le candidat frontiste en 2011, puis en 2012, et enfin en 2013. Cependant, une telle analyse est à courte vue. Il ne faut pas oublier que le candidat FN a progressé régulièrement, passant de 33% il y a deux ans et demi, à 35% l’an dernier, pour dépasser les 40% cette année. Et encore, il ne faut pas oublier la candidature d’un dissident du Front National, présent sous les couleurs du Parti de France, qui a réuni 9% des suffrages (mais qui a appelé à voter UMP).
 
Cependant, entre temps, la participation a progressé de 12 points, passant de 33 à 45%. Du coup, Laurent Lopez a recueilli plus de 5000 voix, contre 2700 le dimanche précédent. Le candidat du Front National a réussi à gagner plus de 80% de suffrages supplémentaires en une seule semaine. C’est encore mieux qu’en 2011, où il était passé de 2700 à 4400 voix, avec une participation de 48%. Le FN n’a pas seulement réussi à attirer les électeurs du candidat du Parti de France, mais également des abstentionnistes qui se sont spécialement déplacés pour permettre sa victoire.
 
Un plafond de verre pas remis en question

Malgré tout, le front républicain n’est pas mort. Après tout, le total des voix d’extrême-droite était déjà proche de 50% au premier tour. Le candidat frontiste ne gagne que 4 points, ce qui montre, contrairement au cas de Villeneuve-sur-Lot, sa difficulté à aller au-delà de son socle du premier tour. En effet, la candidate de l’UMP est passée de 1400 à 4300 voix en une semaine, soit une progression encore supérieure à celle du futur vainqueur. Mieux, en additionnant le total des voix de droite et de gauche, le potentiel théorique n’était que de 3400 voix, signe qu’elle a, elle aussi, mobilisé des abstentionnistes.

Bref, l’examen des chiffres aboutit à un jugement plus équilibré. Le Front National démontre une capacité de mobilisation, notamment auprès des abstentionnistes, supérieure à 2011. Mais cela est-il si surprenant étant donné le spectacle lamentable donné par le PS et l’UMP depuis l’élection présidentielle  ? Et il faut noter que sur ces terres qui lui ont pourtant très favorables, il suscite encore une vraie mobilisation contre lui, comme l’indique le triplement du nombre de scrutins portés sur son opposante au second tour. En outre, il ne faut pas oublier que ces terres lui sont très favorables : en 1988, le Front National avait eu un député lors des élections législatives, avec ce même mode de scrutin à deux tours.

Bref, il ne faut pas sous-estimer le succès du FN, dont le vote repose sur des raisons fortes. Mais il ne faut pas non plus surestimer la percée réalisée à Brignoles, dans un canton qu’il avait déjà gagné en 2011 et une région où il est fort depuis longtemps. Le front républicain n’était vraiment pas mort dimanche dernier.


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