Retraités : la fin de l’âge d’or
par Michel DROUET
lundi 24 juillet 2017
Enfin, l’âge d’or, pas pour tout le monde. Peut-on en parler pour ceux qui touchent 1200 euros par mois après avoir travaillé toute leur vie, ou bien encore ceux qui touchent les minimas sociaux parce qu’ils n’ont pas cotisé en tant que conjoint d’artisans ou de commerçants ou ceux qui touchent une allocation de handicapé ?
Une espèce en voie de disparition
Dans la doxa libérale, un retraité est une charge pour la société, charge qui pénalise l’entreprise qui doit verser des cotisations pour leur entretien. Pas bon pour les profits et les dividendes, tout ça ! Et 1200 euros par mois, pour un retraité c’est encore trop et il faut faire quelque chose pour que les actionnaires et les milliardaires puissent conserver leur train de vie.
Le projet de réforme des régimes de retraites qui figure dans le programme de Macron consistera donc à revoir les pensions à la baisse. Il est inenvisageable en effet de s’aligner vers le haut, c’est-à-dire sur les pensions de retraites du secteur public. Les futurs retraités fonctionnaires et assimilés devront faire le deuil du train de vie de leurs prédécesseurs.
« Ce n’est que justice » diront les salariés du privé qui ne se rendent pas compte qu’ils feront tous partie des 80 % de français qui sont constamment alignés vers le bas au nom de l’équité pendant que les 20 % d’en haut bénéficieront d’allègements sur l’ISF ou sur la fiscalité de l’épargne.
En gros, il faut bien faire les poches des 80 % pour que les 20 % puissent continuer à amasser : c’est la logique du libéralisme et ce qu’on peut appeler également la mutualisation de la pauvreté.
Et comme la réforme des retraites prévoit un système à points basée sur une valeur du point, il suffira de bloquer cette valeur ou bien de la diminuer si on estime que les retraités se gobergent encore trop. Simple, non ?
Une paupérisation annoncée
La baisse des pensions est donc inéluctable, mais c’est déjà une réalité du fait du chômage de masse qui sévit et qui se traduit par des cotisations minimales pendant des périodes plus ou moins longues. Le montant de la pension lors de sa liquidation s’en ressent.
Bonjour le modèle Allemand qui possède les plus gros secteurs à bas salaires en Europe : 22 % des actifs gagnent moins de 10.5 € de l’heure (contre 8.8 % actuellement en France). Eh oui, le modèle Allemand qu’on met en exemple est aussi une trappe à travailleurs et retraités pauvres.
Ce sera une réalité après la réforme du code du travail en France qui ne prévoit rien de bon pour l’avenir des contrats de travail et les rémunérations, mais qui va instituer une précarité encore plus grande.
Bonjour les mini jobs, les contrats à temps partiel et autres CDI de projets qui vont impacter lourdement les pensions si d’aventure le salarié soumis à ce régime se hasardait à demander à partir en retraite à 62 ans. Il faudra donc continuer à bosser à temps partiel et à pas cher si on veut pouvoir subvenir à ses besoins : une aubaine pour les entreprises et autres exploiteurs.
Pas besoin d’agiter le chiffon rouge du départ en retraite à 65 ans, cela se fera de manière naturelle.
Une espérance de vie qui va se dégrader
On sait déjà que les salariés exposés à la pénibilité des conditions de travail ont une espérance de vie moins grande que les cadres et dirigeants. Cela ne s’améliorera pas, d’autant que les facteurs environnementaux (pollution industrielle et agricole) se cumuleront avec des liquidations de pensions plus tardives et un temps passé au travail plus long. La régression du compte pénibilité fait partie de l’objectif global.
La solidarité des enfants, (du fait de la précarisation de leurs emplois et de la pression sur les salaires), en direction de leurs parents âgés, deviendra plus rare et peut-être leur faudra-t-il emprunter pour les placer en structure d’accueil s’ils vivent trop vieux.
Dans vingt-cinq ans les statistiques de l’INSEE (si on ne casse pas le thermomètre), nous montrerons cette baisse de l’espérance de vie dans les catégories les plus faibles (qu’on ne décryptera pas outre mesure) et « en même temps » la bonne santé retrouvée du système de retraite (grâce au « courage politique », bien évidemment). Parallèlement on constatera que la part des revenus salariaux et des pensions dans l’économie se sera encore dégradée contrairement aux profits des entreprises et des banques.
La fin de « l’économie grise »
Souvenez-vous, c’était il n’y a pas si longtemps, les économistes et les politiques qui les suivent aveuglement nous prédisaient de formidables opportunités dans le secteur de l’accompagnement des personnes âgées, de leurs loisirs, de leurs investissements, qui allaient créer des richesses et des emplois à la pelle.
Les investisseurs qui sont tombés dans le panneau vont devoir revoir leur business plan à la baisse. Fini le boom des camping-cars et des résidences services (qui seront réservées à l’élite).
Il faudra également réduire la toile sur l’aide intergénérationnelle (garde des petits-enfants et financement de leurs études, coup de pouce financier aux enfants touchés par le chômage,…) et sur l’investissement des seniors dans le bénévolat associatif.
L’âge d’or des retraités, si tant est qu’il ait existé, est bien fini. Macron et les forces libérales qui le poussent en ont décidé ainsi.