Réveillez-vous bande de décervelés, ne soyez pas enfumés par les mythologiques !

par Bernard Dugué
mardi 1er décembre 2015

Après le choc du 13 novembre et le deuil, la vie doit reprendre et surtout la vie philosophique car voyez-vous, la raison semble quelque peu éteinte, autant après le 13 novembre qu’après le 7 janvier. Si les événements font signe, encore faut-il les faire parler tout en évitant de leur faire dire que qu’ils ne signifient pas. Un certain Barthes avait proposé il y a plus d’un demi-siècle une analyse sur la manière dont nos sociétés modernes se plaisent à inventer des mythes, parfois sans en avoir réellement conscience. Le mythe antique donne un sens à l’existence avait conclu Hermann Broch, opposant de ce fait la mythologie qui fait sens au pseudo-mythe insensé véhiculé par le nazisme. Mais si le mythe fait sens, il faut l’interpréter. Et quand le mythe est devenu limité, les philosophes grecs ont érigé la raison comme outil suprême permettant de comprendre et organiser l’homme et sa cité. Et finalement, je ne sais pas si les mythes antiques étaient vraiment des ouvertures où s’ils n’étaient pas un outil de manipulation. La question reste ouverte. La philosophie a été quant à elle une ouverture. Cela ne fait aucun doute.

Ainsi, je ne sais pas si le mythe antique peut être compris comme un dispositif ouvrant vers l’expérience mais le mythe moderne me paraît être une solution pour achever le sens de l’expérience. Une fois le mythe admis, les choses sont entendues et l’on passe à autre chose. Un célèbre contemporain de Barthes s’est employé à façonner un mythe, celui de la France éternelle et résistante. Le général de Gaulle avait en effet cru nécessaire de produire ce mythe pour permettre à la France d’avancer et de se reconstruire. Mais les historiens savent bien que les blessures de l’Occupation n’ont pas été refermées pour autant. Le mythe arrange en quelque sorte la réalité. Il est même parfois le ressort d’un déni de réalité. Servant quelques fois le pouvoir et le justifiant.

Le 13 novembre d’échappe pas au phénomène de mythification voire même de falsification de la réalité à des fins politiques. Même les intellectuels avertis ne sont pas tous vaccinés contre des dérives interprétatives. Quels sont au juste ces mythologiques post 13 novembre. J’en vois au moins trois.

Michel Wieviorka, en sociologue aguerri, a bien cerné la récupération politicienne de ces tragiques faits par un François Hollande un peu rapide dans l’interprétation d’un possible message envoyé par les terroristes et de la place des victimes censées représenter la France, la jeunesse et un certain art de vivre. En vérité, il n’y a pas de génération Bataclan. Les gens qui s’y trouvaient avec entre 20 et 60 ans. Si on inclut les autres victimes de ces actes atroces, on peut dire que ces gens morts n’étaient pas représentatifs, ni de la société française, ni de la jeunesse française. Néanmoins, c’était bien la France qui était visée.

Second mythe, le schéma de production du terroriste qui aurait été manipulée dans une mosquée salafiste et la thèse du vivre ensemble qui serait malmené uniquement par la faute d’une communauté musulmane. La désinvolture médiatique façonne les idées reçues. Une émission sur la cohésion sociale et voilà que l’on invite un spécialiste du « fait musulman » ayant publié un ouvrage sur la question. Comme si une seule communauté menaçait le vivre ensemble. Oui, une partie des musulmans pose problème, mais ce ne sont pas tous les musulmans et l’effritement du vivre ensemble n’est pas causé par des individus appartenant à une seule communauté. Pour en être certain, il suffit de regarder les politiques de gentrification accompagnées par les élus locaux sans sourciller. Les ménages aisés finissant par chasser des quartiers les gens de conditions modestes. Le vivre ensemble est-il la préoccupation majeure des seniors aisés vivant entre eux dans des résidences surveillées qui leur sont dédiées ? Il ne suffit pas de sauter comme un cabri et de s’exclamer laïcité, laïcité, pour trouver le remède aux maux de la cité !

Manuel Valls veut reconstruire la république sans connaître les ressorts de la déconstruction du vivre ensemble. Et ce vivre ensemble n’est-il pas une sorte de gadget intellectuel servant de prétexte pour maintenir en bon état une société servant les structures de domination ? C’était juste une question qui en amène une autre sur la sincérité des discours politique. Mais les enjeux contemporains dépassent ces débats qui souvent finissent par des polémiques et quelques résolutions populistes. Car il y a deux attitudes face aux élites. L’une populiste et narcissique des gens remontés contre les élites avec parfois des ressentiment envieux. L’autre critique sur les structures de domination et les finalités imposées par la persuasion aux peuples qui deviennent une matière à façonner un monde voulu par une minorité. La reconstruction de la république représente ainsi un mythe servi par quelques habiles politiciens mais les Français ne sont pas dupes. Il y a quelque chose de faux, de bêtement religieux dans toutes ces bonnes paroles.

Et le climat, je n’ose même plus l’évoquer. En d’autres temps, les bourgeois avaient adhéré aux systèmes fascistes en Europe. Je crois que la croyance dans le développement durable est du même acabit. Un délire idéologique basé sur une religion scientifique et climatique avec la déesse terre mère. Une régression étonnante vers un paganisme assorti de calculs mathématiques. Je jette l’éponge. Il n’y a pas de combats possibles quand les hommes sont devenus les esclaves décervelés de l’idéologie. D’ailleurs, la France ne m’inspire plus, je m’y sens étranger. La France s’éloigne de l’universel. La mythologie contemporaine achève le sens et manipule les masses au service d’un pouvoir dévoyé.


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