Royal krach
par LM
mardi 30 septembre 2008
Le monde s’enfonce dans la crise et Ségolène n’y échappe pas : gros krach au Zénith samedi soir, devant un maigre public acquis, aveugle et sourd. Un sommet de ridicule et de démagogie qui dépasse de très loin ce qu’elle avait déjà réalisé en 2007. Le PS est effondré.
Il faudra plus tard, peut-être, chercher quelques circonstances atténuantes à Ségolène Royal. Tant de meetings ratés, tant de phrases peu pensées, tant d’envolées pathétiques, on tentera bien, un jour ou l’autre par tenter d’atténuer la sanction de l’Histoire. Il faudra bien, tout rideau tiré, tout isoloir clos, chercher un tant soit peu à défendre l’ex-espoir de la gauche de ce début de XXIe siècle. Dans l’immédiat, non. Dans l’immédiat, on évitera de comprendre, de couper en quatre les cheveux bouclés, on se gardera bien de rester courtois et mesuré envers la sainte matrone du PS. Elle ne le mérite pas ou plus. La façon dont samedi soir elle a lancé officiellement sa campagne pour 2012 ne mérite nulle indulgence. Faire n’importe quoi, d’accord, mais il y a quand même certaines limites, à commencer par celles du bon goût, de l’à-propos, de l’honnêteté. Ces « fra-ter-ni-té », scandés messianiquement par cette quinquagénaire lookée façon jeune vedette de la pop musique, resteront longtemps dans les zappings. Depuis Sarah Palin, on n’avait pas connu si grotesque gesticulation. Mais Sarah Palin est Américaine. Chez nous, ce genre de prêchi-prêcha pudibond et larmoyant, c’est assez inédit. Et déplorable.
Samedi soir, en plus d’une mise en scène délirante, déplacée et au-delà du ridicule, on eut droit une millième fois aux geignardises de la dame du Poitou sur le soi-disant mauvais traitement qu’elle aurait subi lors de la dernière présidentielle. La dame n’a pas avalé, n’a pas digéré, ne s’en est pas remise. Elle revient sans cesse sur les primaires (fin 2006) puis sur la campagne électorale (début 2007) jusqu’à son écrasante défaite face aux forces de l’esprit du fric incarnées magnifiquement par le petit Nicolas de Neuilly, riche et déjà relativement célèbre. Ségolène Royal ressasse sans cesse ces moments terribles, n’a toujours pas fait son deuil de sa présidentielle perdue, tellement perdue. Elle vit dans ce passé-là, comme si elle s’était persuadée qu’à force de le rabâcher ce passé-là finirait bien un jour ou l’autre par tourner en sa faveur. Un de ses nombreux signes d’instabilité. Elle revit cet échec-là, devant ses pauvres, maigres et peu représentatifs supporters, tous gagas de la reine des gogos, qui boivent ses paroles, ses gesticulations théâtrales ratées, ses blagues pas drôles et ses amis du show-biz barbants. Ségolène s’appuie sur Trust et Cali pour convaincre ce qu’elle appelle « le peuple de gauche » (c’est quoi ça) qu’une autre politique est possible, avec elle bien sûr aux commandes.
Mais quelle politique ? Là encore, toujours les mêmes sornettes navrantes et illusoires, mièvres et utopiques : en résumé, moins de pauvre, plus de riche, moins de pluie, plus de beau temps, moins de licenciements, plus d’emplois, mois de mensonge plus de vérité, moins de Sarkozy, plus de Royal. Rien de très réfléchi là-dedans, rien de très pensé, rien de vraiment étudié, juste un catalogue d’idées reçues, de philosophie de comptoir, agrémenté de citations de penseurs profonds (Coluche, l’abbé Pierre, le Dalaï-Lama) et de quelques emprunts mal tournés aux classiques : qu’est-ce que Cyrano est venu faire dans cette galère ? En fait, Ségolène ne se risque jamais sur le terrain politique, elle l’esquive par des idées larges, informes, elle balaie un grand champ d’actions, mais sans entrer jamais dans le concret, elle esquive l’essentiel pour se dissimuler derrière un charabia déplacé. Vu la crise qui nous secoue aujourd’hui, et qui n’a pas fini de faire des dégâts, sa position est intenable. Elle aura beau danser, gesticuler, chanter ou jouer quelque comédie que ce soit, rien n’y fera : elle apparaît comme la plus mauvaise solution envisageable, et de loin.
Le fait-elle exprès ? Oui, sans aucun doute, on ne lui fera pas grâce de lui prêter quelque trouble mental dont on ne la sait pas atteinte. On laissera Emmanuelli s’en charger. Elle le fait exprès et sciemment, avançant sur deux axes majeurs : l’un ayant pour objectif la ringardise extrême du reste du PS (et elle y arrive plutôt bien, les indignations séniles des « éléphants » évoquant régulièrement un troupeaux de vieux schnoks aigris) et l’autre ayant pour but de calquer sa course sur celle de sa référence ultime en termes de victoire, j’ai nommé notre grandeur à talonnettes, Nicolas Sarkozy. Royal n’est pas aveugle, elle a bien vu, de ses yeux vus, comment le maire de Neuilly a réussi à l’écrabouiller en mai 2007 : à coup de peopleries et d’épate bourgeois, d’émotions à vendre et de démagogie bruyante. Ségolène cherche à suivre cette voie-là, en pire. Si, en 2007, elle assaisonnait encore de quelques grains de pragmatisme « de gauche » ses épanchements mystico-poétiques, ou lyrico-hystériques, désormais elle ne fait plus place qu’à l’émotionnel, à la sensiblerie, laissant à Julien Dray le sale boulot « politique », s’il veut bien s’en occuper.
Le monde est en crise, Ségolène aussi. A l’instar des différentes places boursières hier, elle a dévissé samedi soir au Zénith, et ce n’est pas une question de style ou de génération : personne ne peut désormais penser une seule seconde confier à cette personne la charge d’un pays. Fut-il celui de Nicolas Sarkozy.