Sarkozy eugéniste ? Qu’a-t-il dit de si terrible ?
par etarcomed
samedi 21 avril 2007
Que n’a-t-on pas entendu sur le sujet ? Les propos de Nicolas Sarkozy sont-ils dangereux ? Ou tout cela n’est-il que beaucoup de bruit pour rien ?
Que n’a-t-on pas entendu sur le sujet ! Citons la phrase dans son contexte pour commencer. Il s’agit d’une discussion entre Michel Onfray et Nicolas Sarkozy pour Philosophie magazine.
« M.O. : Je ne leur donnerais pas une importance exagérée. Il y a beaucoup de choses que nous ne choisissons pas. Vous n’avez pas choisi votre sexualité parmi plusieurs formules, par exemple. Un pédophile non plus. Il n’a pas décidé un beau matin, parmi toutes les orientations sexuelles possibles, d’être attiré par les enfants. Pour autant, on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile. Je pense que nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement, par les conditions familiales et socio-historiques dans lesquelles nous évoluons.
N. S. : Je ne suis pas d’accord avec vous. J’inclinerais, pour ma part, à penser qu’on naît pédophile, et c’est d’ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1 200 ou 1 300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n’est pas parce que leurs parents s’en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d’autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l’inné est immense. »
Que reproche-t-on à Nicolas Sarkozy ? Plusieurs choses potentiellement contradictoires. On y verrait un discours eugénique d’une part, d’un autre côté on lui reproche de déresponsabiliser les pédophiles. On lui reproche une vision déterministe sans espoir, fataliste. On lui reproche de favoriser outre-mesure l’inné sur l’acquis.
Le reproche le plus modéré et peut-être le plus raisonnable est celui de parler de science alors qu’il faudrait laisser se discours aux scientifiques. Soit, mais ce même reproche pourrait être fait à Michel Onfray ! C’est une discussion de philosophie, elle s’aventure sur un terrain scientifique.
Dans le contexte, il n’y a rien de répréhensible.
Décryptons plus en détail le discours, et surtout définition le mot « pédophile ». En lisant la phrase de Michel Onfray, il paraît évident que la définition ici est bien « quelqu’un attiré sexuellement par des enfants » et non pas d’un criminel sexuel, d’un prédateur ou d’un violeur. Nous parlons bien ici d’attirance sexuelle comme certains sont attirés par des femmes et d’autres par des hommes. Pourtant n’avons-nous pas tous entendu un jour un homosexuel affirmer qu’il était né ainsi qu’il a toujours été homosexuel ? Qu’on soit d’accord ou pas, qu’on pense l’acquis primordial sur l’orientation sexuelle des gens ou pas, ce genre d’affirmation n’a jamais valu, que je sache, une telle levée de bouclier. D’ailleurs si une grande majorité d’hommes est attirée par des femmes alors qu’une grande majorité de femmes est attirée par les hommes, ce ne serait que dû à l’environnement culturel, et aucun élément génétique ne nous pousserait à être attirés par le sexe opposé ?
Comment arrive-t-on de là à l’eugénisme ? Cela suppose qu’on imagine que tous les pédophiles passeront à l’acte ? Ne peut-on pas croire à la nature humaine, au respect des autres qui fait que, malgré des pulsions, un homme pourrait ne pas violer d’enfant ? Quelle vision triste ! Et devant un crime aussi affreux qu’il soit ne peut-on imaginer d’autre solution que l’eugénisme ? Je n’ose croire que si un jour la science trouve le gêne de la pédophilie tous ces gens a priori humanistes vont s’écrier : « Ah ! si c’est vrai alors il faut recourir à l’eugénisme ». J’espère que ce n’est réellement qu’une réaction politicienne, ou au pire une telle diabolisation de Nicolas Sarkozy dans leurs esprits qu’ils ne peuvent lui prêter que les pires intentions.
Reproche suivant, celui d’excuser les pédophiles, de les dépénaliser car ils sont malades. J’entends Ségolène Royal affirmer que les pédophiles sont conscients de leurs actes, sous-entendu « contrairement à Sarkozy ». Qu’elle inversion de discours gauche droite ! On reprocherait à Sarkozy de vouloir trouver des excuses à des criminels ? C’est plutôt un discours de gauche que de dire qu’ils faut soigner les criminels sexuels, discours qui n’a rien de scandaleux et qui est plutôt à l’honneur de la gauche.
Nicolas Sarkozy a depuis reprécisé son discours et indique bien qu’il considère les violeurs d’enfants comme des malades et des criminels. D’ailleurs si on reprend la définition du mot "pédophile", on peut bien comprendre qu’un homme attiré par des enfants de trois ans est un malade, un homme qui viole un enfant de trois ans est un criminel. Un homme qui viole un enfant parce qu’il a une pulsion est un malade et un criminel. Un homme qui est attiré par une très belle femme est a priori normal, s’il la viole c’est un criminel. Le fait d’être attiré par une femme n’a jamais été une excuse pour la violer, je ne vois pas pourquoi ça le deviendrait quand il s’agit d’un viol d’enfant.
Il y a une catégorie de personnes également qui rejettent l’idée au nom de la morale, que cette notion serait trop horrible. « Je voudrais dire à quel point nous avons été choqués, bouleversés même, heurtés par les déclarations du candidat de l’UMP qui estime que la pédophilie est génétique. » dit Ségolène Royal. Alors maintenant à mon tour de m’insurger, et de m’inquiéter : quand les valeurs morales dictent la science nous sommes en danger. C’est bien parce que certains ont été heurtés par l’idée que la Terre puisse ne pas être le centre du monde que Gallilée a dû se taire. Et pour compléter, en quoi le déterminisme social de Marc Onfray, qui nie en partie le libre arbitre, serait plus moral ?
Finalement je voudrais pousser la réflexion quelque peu plus loin. Comme Michel Onfray a mis l’homosexualité, l’hétérosexualité et la pédophilie sur le même plan dans sa phrase, la notion de « malade » peut évoquer des choses peu reluisantes pour certains. Il est vrai que certains milieux très conservateurs considèrent les homosexuels comme des malades qu’il faudrait soigner. J’ai conscience que ce parallélisme peut heurter. J’ai tendance à croire qu’il y a une notion de maladie dépendante de la société, des maladies qui n’atteignent pas le malade en lui-même mais sa capacité à s’intégrer dans la société. On a appris avec le temps à changer la société et à accepter des différences comme n’étant pas des maladies. On arrête de faire des générations de gauchers contrariés. On a appris à changer la société plutôt que de vouloir changer les homosexuels. Mais pour la pédophilie la comparaison s’arrête là, nous ne sommes pas en mesure d’imaginer une pédophilie assouvie sans victimes, il faudra donc continuer à les considérer comme des malades et à en faire des pédophiles contrariés.
La question qui restera posée est la suivante : Si une personne vient voir un jour un médecin en lui disant « docteur aidez-moi j’ai des pulsions quand je vois des enfants, aidez-moi à ne pas faire une bêtise », saura-t-on l’aider réellement, sans le juger, sans le traiter de monstre ? C’est apparemment ce que souhaite Sarkozy et, au-delà des caricatures, c’est ce que souhaite sûrement toute la gauche.