Sarkozy : plus qu’un dieu, une idole

par Citizen-Web
samedi 13 septembre 2014

Petit à petit, l'oiseau Sarkozy fait son nid. Au sein de l'UMP, ou d'un nouveau rassemblement rebaptisé pour l'occasion, celui-ci compte ses fidèles, toujours accompagné de la même bande d'apôtres.

L'exil et le désert seront bientôt derrière lui.

Orwell

 

Préliminaires...

Il n'y a rien de pire pour moi que de ne pas comprendre quelque chose, de n'être pas à même de percevoir les liens, parfois complexes, qui unissent ensemble des faits ou encore des idées. Lorsqu'une telle situation se produit, le sentiment de frustration qui m'anime alors se transforme rapidement en panique et me noue le ventre. L'obsession commence ici, et mon esprit n'aura aucun répit tant que je n'aurai pas trouvé une explication valable, un lien de causalité satisfaisant qui m'apaise.

La religion est de ces choses qui m'obsèdent. Je ne connais pas grand chose sur ce sujet, mais me documente à l'occasion de la parution d'un livre qui propose une approche originale. Michel Onfray, Paul Veyne ou encore René Girard m'ont nourri l'esprit mais n'ont, malheureusement, guère apaisé celui-ci. Chacun, finalement, construit une théorie sur la base de faits, d'éléments de preuves mais aussi d'hypothèses, dont l'agencement nous fait prendre un chemin qui serpente de la première à la dernière page.

Malgré tous les efforts de ces grands auteurs, rien n'y fait. La religion reste pour moi un mystère dans la mesure où les hommes doivent s'inventer un système déshumanisé, une divinité ou un panthéon, pour trouver des bonnes raisons de vivre ensemble. Pour certains de nos semblables, la croyance en une vie après la mort est la carotte qui va guider leurs actes de leur vivant. Ils pensent, par exemple, qu'en faisant le bien autour d'eux, en aimant leur prochain, ils travaillent jour après jour à l'obtention d'une place au paradis, si possible "à la droite du Père". Ce qui est pour moi incompréhensible, c'est qu'ils le fassent pour eux, par pour leur prochain. Dans la même veine, d'autre se font sauter en activant une ceinture d'explosifs avec, comme ultime motivation, une place au paradis où les attendraient, entre autre, soixante-douze vierges. Or, un minimum de bon sens démontrerait sans difficulté aucune que cette croyance est illusoire car, si l'on comptabilisait le nombre de candidats au suicide et de ceintures consommés, on dépasserait allègrement le nombre de 72, et l'on aboutirait à ce constat que, là-haut, plus personne n'est vierge depuis longtemps.

Conclusion : un "god'ceinture" leur apporterait plus de satisfactions au présent que 72 salopes épuisées , CQFD.

 

Aimer votre prochain comme vous-mêmes

A l'occasion de la parution d'une étude de l'INSEE sur le développement de la pauvreté en France, France Culture a diffusé un numéro de son émission "Du grain à moudre" intitulée Savons-nous parler des pauvres ?

L'une des invités, Axelle Brodiez, chargée de recherche au CNRS-LARHRA (LAboratoire de Recherche Historique Rhône-Alpes), déclarait dans cette émission 3 choses essentielles :

  1. "il y a toujours eu des bons pauvres et des mauvais pauvres"

  2. "jusqu'aux années 1945, on a une approche très prosélite du pauvre et, quand on les aime, c'est pour son propre salut"

  3. "depuis 1945, petit à petit, les mentalités ont énormément évolué et les associations sont là pour témoigner qu'on aime les pauvres, [...] on a une approche plus empathique et bienveillante, voire compréhensive, de la pauvreté, et plus du tout prosélite"

 

Le point n°2 est totalement en accord avec notre propos liminaire : l'espérance d'une récompense après la mort pervertit les actions accomplies de notre vivant dans la mesure où elle ne sont guidées que par notre intérêt bien senti, l'intérêt de celui auquel elle s'adresse n'étant qu'un prétexte, un vecteur.

Le point n°1, dans lequel sont distingués les bons pauvres des mauvais pauvres, est d'une actualité criante. Le discours du F-Haine, et de la droite en général, en dégouline. Il y a d'un côté "nos chers compatriotes", les petits, les sans-grade, durement touchés par la crise, ceux qu'il faut aider parce qu'ils n'ont rien même s'ils se lèvent tôt. Et puis il y a les mauvais pauvres, ceux qui sont d'ailleurs. Charité bien ordonné commence par soi-même...

Axelle Brodier précise que nos lois nationales sont très claires sur cette distinction qu'elles avalisent :

Tout l'édifice de la protection sociale française jusqu'en 1988, c'est à dire le RMI, [...] ce sont uniquement les bons pauvres qui sont visés : les vieillards, les handicapés, les femmes en couche, etc. Les autres, c'est le système de l'assurance qui doit s'en occuper : c'est la Sécurité Sociale, c'est les Allocations Familiales et basta, vous n'avez qu'à vous mettre au travail. La loi a exclusivement visé les bons pauvres, et le critère de résidence a toujours été historiquement inscrit dans la loi.

→ On remerciera au passage Michel Rocard, homme de gauche s'il en est, qui a su par son action en faveur du RMI, "inverser le regard sur le pauvre et la pauvreté", changer les mentalités.

Le point n°3, relatif à la bienveillance moderne est plus sujet à caution. La société civile est en effet partagée entre 2 attitudes contradictoires. D'un côté on constate qu'elle s'empare de certains sujets insuffisamment pris en charge par l'état : ATD Quart-Monde, DAL (association Droit Au Logement) ou AC (Action contre le Chômage), pour ne citer que ceux-là, incarnent ce sursaut citoyen en faveur des plus démunis.

D'un autre côté, depuis la crise de 2008, cette solidarité s'émoussent, en partie à cause des disours ostracisants de certains partis politiques (de droite), mais également parce que ceux qui, justement, ne sont pas pauvres ou, c'est presque pareil, ont oncore un travail, subissent l'appauvrissement généralisé au travers de prélèvements de plus en plus élevés et de diminutions des prestations sociales.

De fait, ils imputent cette dégradation de leurs situations respectives à une frange de la population pointée du doigt au prétexte qu'elle serait constituée de profiteurs et de fainéants. Ce discours, généralement de droite, en faveur de la méritocratie, a un impact réel sur la solidarité et le sentiment d'appartenance à une communauté de destins.

Un article du Monde, reprenant les conclusions d'une enquête réalisée par le Crédoc, souligne que :

  • 37 % des Français pensent que les personnes qui vivent dans la pauvreté n'ont pas fait d'effort pour s'en sortir. En 2009, au lendemain du déclenchement de la crise, ils n'étaient que 25 %.
  • 64 % pensent que, s'ils le voulaient, les chômeurs pourraient retrouver un emploi et 44 % estiment que l'aide de la collectivité aux familles aux ressources insuffisantes les déresponsabilisent.
  • 53 % considèrent que le RSA incite les gens à ne pas travailler… Ils n'étaient que 31 % en 2009.

 

Les conclusions de l'étude du Crédoc sont édifiantes :

« Il est à prévoir que la solidarité fléchisse même au sein des familles, prévient Jorg Muller. Aujourd'hui, les soixante-huitards, qui arrivent à la retraite, encore aisés soutiennent leurs enfants et amortissent les chocs mais la génération suivante, moins dotée, ne sera pas en mesure de le faire. »

Corrélativement, l'idée que les plus riches doivent donner aux plus modestes perd du terrain : en 2012 les trois quarts des français (71 %) souhaitaient une plus grande redistribution des riches ; deux ans plus tard, ce taux est tombé en dessous, à 55 %. « L' actualité politique avec le sentiments que les riches sont déjà suffisamment taxés n'est pas sans lien avec l'arrivée de la gauche à la tête de l'Etat ».

Pour Jorg Muller, « la crise de représentativité, de scepticisme sur l'action politique, conduit au retrait des individus de la société, au repli sur soi ».

→ Et, devrait-on ajouter, au vote Front National.

Ces conclusions rejoignent clairement celles de l'INSEE sur la pauvreté, et il est à prévoir une cassure dans le lien social et familial du même type que celle rencontrée en Grèce, où le taux de suicides a bondi depuis la crise de 2008 et la très sévère cure d'austérité imposée par l'UE et le FMI.

 

Le retour annoncé des marchands du Temple

L'épisode au cours duquel Jésus chasse les marchands du Temple est très connu, et son explication tout ausi simple. Les holocaustes étaient à cette époque une pratique courante qui consistait à sacrifier un animal à Dieu afin d'obtenir de lui quelque chose en retour. Dans l'Ancien testament, Dieu lui-même avait éprouvé la fidélité d'Abraham en lui demandant de sacrifier son fils Isaac. Plus le sacrifice était important (colombe, agneau ou boeuf), plus celui-ci était coûteux, et plus on était en droit d'attendre un retour sur investissement. Ces pratiques enrichissaient à la fois le clergé et les changeurs de monnaies installés au coeur du Temple. Bref, rien à voir avec la vision idéaliste d'un Jésus dont la vie fut un long combat contre l'application stricte et inintelligente de la Loi à laquelle il préférait l'esprit de la loi.

Si la gauche "PS", au pouvoir depuis 2012, a échoué au point d'enterrer la cohésion sociale dans notre république à force de marteler que l'austérité était le seul chemin pour retrouver la croissance et l'emploi, on peut légitimement se demander ce que d'aucuns attendent de plus d'un retour de la droite au pouvoir et de celui de Sarkozy en particulier.

Car en effet, quand on considère la posture idéologique de la droite, toujours en faveur d'une oligarchie économique principalement incarnée par le MEDEF (les marchands du temple) et les banques (les changeurs de monnaies), il est impossible d'expliquer l'engouement de ses sympathisants, des français normaux au demeurant, qui, au quotidien, sont touchés au même titre que les autres par le chômage et le recul de l'état social qui ne profitent qu'à une infime minorité et au clergé politique qui lui sert la soupe.

Il y a là un mystère qui me sidère, et je sens d'ores et déjà l'angoisse produire cette boule au ventre caractéristique des choses que je ne parviens pas à m'expliquer. Comment peut-on voter en son âme et conscience en faveur de politiques économiques qui, jours après jours, sacrifient les individus sur l'autel du libéralisme ? Quel bénéfice attendent des électeurs de droite, si ce n'est, peut-être, la satisfaction de bien servir leurs maîtres ?

On se trouve donc en présence d'un phénomène quasi-mystique, une idéologie, pire : une religion, dont personne ne peut démontrer la pertinence du contenu ni la solidité des thèses. L'actualité dément chaque jour le bien-fondé de ces croyances dont les victimes sont légions mais qui engraissent quelques happy-few qui n'ont d'autres ambitions que d'occuper le temple et d'être assis à la droite du Père.

A-t-on besoin de prouver que Dieu existe quand il suffit d'y croire ?

 

Wake up.

Lovegiver


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