Sarkozy, un boulet pour l’UMP

par Fergus
lundi 16 juin 2014

Il est clair désormais que Nicolas Sarkozy a pour objectif de reprendre, d’une manière ou d’une autre, le contrôle de l’UMP afin d’asseoir sa candidature en vue de la présidentielle de 2017. Ce serait, pour son parti, le pire des scénarios. N’en déplaise aux sympathisants de l’UMP nostalgiques du quinquennat passé, l’ex-président de la République deviendrait en effet un terrible boulet pour son camp...

Les récentes déclarations de Brice Hortefeux et Nadine Morano – porte-paroles habituels de Nicolas Sarkozy depuis le vrai-faux « retrait de la vie politique » annoncé au lendemain de la défaite de 2012 – ont exprimé sans ambiguïté le désir viscéral de l’ex-président de revenir aux affaires pour briguer un nouveau mandat élyséen en 2017. Un retour qui pourrait se faire lors du Congrès du parti qui se tiendra durant l’automne, en recourant à la technique du bulldozer. But de l’opération pour Sarkozy : imposer aux militants sa « stature présidentielle » au nez et à la barbe de tous les autres caciques de l’UMP. Principaux visés : messieurs « Ducon » et « Durien », autrement dit Alain Juppé et François Fillon en langage sarkozyste.

Cette stratégie de reconquête à la hussarde ne doit rien au hasard : il en va de la survie politique de l’homme aux 600 millions d’euros de déficit. Et pour cause : son image ne cesse de s’effriter, y compris chez les sympathisants de l’UMP, tandis que celle d’Alain Juppé prend toujours plus de hauteur. Résultat : le maire de Bordeaux vient désormais talonner Sarkozy dans les sondages. Mais il y a pire encore : quoi qu’ils en disent, la plupart des ténors de l’UMP sont en effet d’ores et déjà dans les starting-blocks pour la course au titre de candidat officiel du parti. Et tous, sans exception, sont bien décidés à faire respecter l’organisation de primaires actée par une très large majorité des militants le 30 juin 2013. Or, Sarkozy sait qu’une fois ce processus des primaires lancé, il serait définitivement hors-jeu, sauf à envisager une candidature parallèle suicidaire, tant pour lui que pour les chances de la droite de reconquérir le pouvoir, malgré la déconfiture envisageable du Parti Socialiste.

Précisément, parlons-en de cette probable déconfiture du PS. À l’évidence, elle ne sert pas les intérêts de Sarkozy. Et pour cause : sauf retournement spectaculaire de la conjoncture économique et baisse significative du nombre des chômeurs, le candidat socialiste en 2017, qu’il s’agisse de François Hollande ou de tout autre champion suffisamment téméraire pour relever le défi, devrait être largement distancé au 1er tour de la présidentielle. Distancé, mais surtout éliminé du duel de 2e tour où l’on devrait logiquement retrouver Marine Le Pen face au candidat de l’UMP. Avec une conséquence évidente : le candidat de la droite républicaine devrait être élu sans difficulté président de la République, et cela même si la victoire est acquise de manière nettement plus étriquée qu’en 2002, eu égard au profond ressentiment des électeurs populaires à l’encontre des partis dits « de gouvernement ». Énoncé d’une manière différente et quelque peu triviale, cela revient à dire que même un âne aux couleurs de l’UMP a toutes les chances de gagner la présidentielle de 2017 !

Dans de telles conditions, Sarkozy ne peut, comme il en forme le projet, se présenter comme le seul véritable espoir d’un retour de la droite au pouvoir. Et moins encore comme le seul recours pour enrayer la menace frontiste, n’importe quel clampin estampillé UMP ayant toutes les chances de ravir la mise. Comble de la difficulté pour Sarkozy, les ténors Juppé et Fillon, ainsi que l’armada des quadras aux dents longues sont fondés à croire que leur tour est venu. Avec, à la clé, de solides ambitions que le parcours de Hollande, parti de 3 % dans les sondages en 2011, et la certitude d’une victoire UMP au 2e tour de 2017 attisent comme jamais. Ceux-là feront tout pour barrer la route à Sarkozy et ne pas se laisser imposer un abandon des primaires de la droite qui pourrait ouvrir un boulevard à un retour du battu de 2012, malgré cet échec et sans que le bilan de son quinquennat ait été soldé.

Au-delà des ambitions et des postures actuelles des nombreux « présidentiables » de l’UMP, ce sont les militants de la droite (et peut-être du centre-droit si un accord peut être passé avec l’UDI) qui, par leurs votes, décideront quelle route doit être suivie en vue de l’échéance de 2017. Des militants qui, dès avant le Congrès de l’UMP, devront se poser les bonnes questions, et notamment celles-ci :

Faut-il, dans l’optique de la présidentielle de 2017, repartir avec un Nicolas Sarkozy dont le bilan politique et économique a été médiocre, et de surcroît pollué par des dérives comportementales indignes de la fonction présidentielle, au risque d’alourdir le climat par des réactions virulentes d’opposition, voire de haine d’une partie de la population française ?

Faut-il, au contraire, s’engager résolument dans la voie, décidée en 2013, de primaires à droite qui permettront de faire émerger un candidat au caractère affirmé mais nettement moins clivant, capable de réunir sur son nom une large partie de l’électorat républicain, et cela dans un contexte très favorable à une alternance politique ?

Poser ces questions, c’est y répondre. Comment croire raisonnablement que les militants de l’UMP prendront le risque de redonner les clés de leur parti à l’homme dont le quinquennat a été marqué par une suite d’échecs électoraux et par un bilan socioéconomique ayant largement contribué à la défaite de leur camp lors de la dernière présidentielle ? Comment, de surcroît, ne pas prendre en compte les multiples dossiers judiciaires qui menacent Sarkozy, à commencer par les développements de l’affaire Bygmalion et les révélations corrélatives sur le financement illégal de la campagne de 2012 dont nul ne peut croire que le principal bénéficiaire a tout ignoré comme il cherche à le faire gober aux naïfs ?

Ce n’est pas une, mais plusieurs épées de Damoclès qui tiennent à un fil sur la tête de Sarkozy et peuvent, à tout moment, hypothéquer son avenir, voire le stopper net comme Strauss-Kahn en 2011 pour d’autres raisons. Avec le risque concomitant de laisser le parti désemparé au pire moment alors qu’il a toutes les chances de rafler la mise lors de la présidentielle et des législatives de 2017. Il est clair que Sarkozy est devenu un boulet pour l’UMP.

Un boulet pour l’UMP, mais aussi un boulet pour la France, si Sarkozy est rattrapé par les affaires après avoir réussi à mener à bien son OPA sur le parti. Si tel était le cas, c’est un boulevard qui s’ouvrirait pour Marine Le Pen et le Font National !

  


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