Ségolène Royal et la souveraineté du Québec : improvisation ou ingérence politique assumée ?

par Algy
mardi 23 janvier 2007

En matière de politique étrangère, les critiques de Ségolène Royal avaient eu beau jeu, lors de ses déplacements au Proche-Orient et en Chine, de souligner son amateurisme, ses bourdes, ses dérapages linguistiques. Décidément, Ségolène Royal se fait épingler sur presque tous les dossiers de politique étrangère sur lesquels elle est amenée à se prononcer, depuis le début de cette campagne.

Au terme d’une rencontre de quinze minutes avec le chef du Parti québécois, André Boisclair, en visite à Paris, Ségolène Royal, interrogée par un journaliste de Radio Canada, s’est déclarée favorable à la souveraineté du Québec.

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A la question : Quelles sont vos affinités avec la souveraineté du Québec ?, Ségolène Royal a ainsi répondu : Elles sont conformes aux valeurs qui nous sont communes, c’est-à-dire la souveraineté et liberté du Québec. Je pense que le rayonnement du Québec et la place qu’il occupe dans le coeur des Français va dans ce sens.

Le moins que l’on puisse dire c’est que ce début de phrase semble un peu alambiqué et pourrait bien refléter une certaine improvisation (cela paraît surtout dans le reportage), mais une improvisation qui confine à la maladresse... Avec cette déclaration, Ségolène Royal est allée au-delà du credo auquel se raccrochent officiellement la gauche et la droite depuis toujours. A moins que ce ne soit une position mûrement réfléchie... mais j’en doute.

Le « diplomatiquement correct » exige normalement que le verbe soit mesuré et qu’en pareille circonstance, on souligne qu’une telle décision ne peut revenir qu’à la population concernée et en l’occurrence aux Québécois eux-mêmes.

Pour rappel, les Québécois ont rejeté l’option de la souveraineté et ont préféré rester au sein de la Fédération canadienne à l’occasion de deux référendums en 1980 et en 1995 ; la preuve que tous les Québécois sont loin d’être souverainistes. Une donnée que Ségolène Royal ne devrait pas (ou n’aurait pas dù) méconnaître.

Une chose est certaine, si la candidate socialiste est élue, il faudra vite dissiper ce nuage dans les relations entre Ottawa et Paris. Comme on pouvait s’y attendre, la réaction ne s’est pas fait attendre du côté du Premier ministre canadien Stephen Harper, qui pourtant, lui non plus, n’est pas toujours un as de la politique étrangère (sauf quand il s’agit de parler à la Maison-Blanche !). Il lui a ainsi donné, une petite leçon de politique étrangère « 101 » comme on dit ici, en un mot, il lui a rappelé quelques notions élémentaires :

« L’expérience enseigne qu’il est tout à fait inapproprié pour un leader étranger de se mêler des affaires démocratiques d’un autre pays (...). Nous nous attendons à ce que le prochain président comprenne l’histoire que nous partageons et le respect qu’un tel partenariat important exige à l’égard du Canada et de la population canadienne ».

Pour couronner le tout, le chef du Parti libéral canadien, Stéphane Dion y est allé également de sa petite remontrance : « Ça nuit à sa crédibilité, elle ne comprend pas, je pense. On ne s’ingère pas dans les affaires d’un pays ami, on ne souhaite pas le démantèlement d’un pays ami. Le Canada ne souhaite pas le démantèlement de la France ; la France certainement ne souhaite pas le démantèlement du Canada ».

Mais il faut peut-être relativiser car, après tout, ce genre de déclaration et les petites polémiques qu’elles soulèvent s’oublient vite. Un certain Jacques Chirac, alors maire de Paris, s’était prononcé en faveur de la reconnaissance internationale d’un éventuel Québec souverain, devant un ancien chef péquiste (Jacques Parizeau). Arrivé à l’Élysée, le même Jacques Chirac était devenu très ami avec le Premier Ministre canadien d’alors, Jean Chrétien.


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