Sénat : entre gifle électorale et torgnole historique, vers de nouveaux horizons

par Renaud Bouchard
mardi 27 septembre 2011

A désormais sept mois de la prochaine consultation présidentielle, le basculement historique du Sénat dans l’opposition ouvre de nouvelles perspectives. Non pas tant celle d’un bicamérisme monocolore aux mains de la gauche, en lieu et place de la droite si celle-ci vient à mordre la poussière en 2012 après une double défaite aux élections présidentielle et aux législatives qui s’ensuivront, mais plutôt celle d’une possible mutation constitutionnelle en lieu et place de celle rêvée par le président de la République.

Trois paramètres se dessinent en effet, qui posent les termes d’une cohabitation temporaire, de mutations constitutionnelles possibles, mais aussi de réformes politiques anticipées. 

La période qui s’ouvre jusqu’au terme de l’élection présidentielle ouvre de manière certaine sept mois de pouvoir dont la gauche va se servir pour asseoir les fondations d’une prise de pouvoir effective en 2012 en cas de victoire aux élections présidentielle et législatives. Si en matière de révision constitutionnelle le veto du Sénat est imparable, on mesure en effet dès à présent l’avantage que présenterait pour la gauche, en cas de victoire, une majorité supplémentaire à l’Assemblée nationale pour conduire une révision constitutionnelle et promulguer les lois organiques nécessaires à la mise en œuvre des dispositions utiles pour réformer la Loi fondamentale de la République, ses institutions et par là-même le Sénat, son mode de recrutement et son fonctionnement. L’option est désormais envisageable. 

Après la perte du contrôle d’un bastion qui la rendait inexpugnable depuis 1958 – créant de fait une anomalie avec une absence d’alternance politique durant cinquante ans - la situation de la droite est brusquement devenue critique. Quand bien-même réussirait-elle à conserver la présidence d’un Sénat qui lui échappera malgré tout pour un bon moment. essorée par ce retournement électoral majeur, cette même droite dispose toutefois d’un avantage qu’elle peut soit laisser filer entre ses doigts, soit mettre à profit pour tenter de minimiser les dégâts et rétablir une contenance. 

De quelle manière ? Par une révolution de palais, une sorte de pronunciamiento interne qui verrait la mise à la trappe définitive des caciques qui conduisent l’UMP à sa perte, et avec à sa tête le premier d’entre-eux, le président de la République et son entourage. On imagine mal que les membres du Sénat et de l’Assemblée nationale jusqu’alors acquis à l’UMP hésitent encore à envisager une stratégie de rechange pour, à défaut de pouvoir donner le coup de pied qui les ramènera du fond de la piscine, ne pas tenter à tout le moins d’enrayer le processus de dégradation politique en passe de les emporter tous s’ils ne réagissent pas et dont un nouveau pan vient de s’écrouler sous leurs yeux. 

Sauf à attendre l’effondrement complet du plancher sous ses pieds, la future opposition – n’ayons pas peur des mots au regard de la réalité du moment – serait fort inspirée de se doter sans plus tarder d’un nouveau chef qui soit capable d’élaguer les branches mortes, de débarrasser la scène des planches pourries et des traîtres aux aguets et d’adresser un message fort à son électorat pour répondre efficacement aux dégradations politiques, économiques, sociales dont chacun prend quotidiennement la mesure.

En est-elle capable ? 

Aucunement, sauf à imaginer que la lame de fond qui est en train de gonfler vienne très vite signifier son licenciement immédiat pour insuffisance professionnelle et mise en péril du pays à la camarilla politique et gouvernementale actuelle. 

Certainement, si l’électorat de droite décide sans tarder de ne plus écouter les distorsions et effets Larsen de porte-voix politiques de plus en plus inaudibles face à la défiance et à la perte de légitimité du président de la République et de toute sa cour dont une partie risque fort d’être désormais appelée à de longs et pénibles entretiens devant des juges d’instruction. 

Le constat est en effet sans appel avec la désaffection que vient de manifester la France rurale, mais aussi celle des élus des petites communes, des bourgs et des villages, tous ces grands électeurs traditionnellement de sensibilité droitière mais qui ne se reconnaissent plus dans un « rassemblement » dont la manifestation palpable est à la fois celle d’une réforme territoriale et fiscale impopulaire et de la promesse trahie d’une « République irréprochable ».

 

Une période de règlements de comptes commence, et avec elle la chute de la Maison Sarkozy :

- salutaire, car elle signifiera la disqualification de ceux qui ne manqueront pas de s’entre-déchirer en s’imputant responsabilités, rancœurs et défaites au sein d’un pouvoir et d’une majorité dévoyés et délégitimés,

- positive, car susceptible d’ouvrir le chemin à un outsider suffisamment désireux, capable et volontaire pour chasser un personnel politique mité, donner un coup de boutoir à un édifice vermoulu, en raser les fondations et reconstruire du neuf, non pas pour un parti quel qu’il soit, y compris pour celui qui crie aujourd'hui victoire, mais pour le bien-être du pays tout entier et de ses habitants. 

Le champ est libre pour un changement politique anticipé et avec elle la réflexion pour l'instauration d'une VIè République, avec de nouvelles institutions en phase avec le XXIè siècle.


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