Trouver 40 à 50 milliards d’euros d’économies : un débat biaisé
par Michel DROUET
mardi 22 avril 2025
A écouter les différents points de vue, c’est très simple : pas chez moi mais chez les autres, et les médias relaient complaisamment des points de vue qui vont tous dans le même sens, celui décidé par l’Etat et la sphère économique.
Patronat vs salariés et retraités
Pour le Medef, c’est notre système de protection sociale qui est trop généreux et affaiblit la « compétitivité des entreprises », c’est-à-dire celles qui exportent. Mais quid des autres entreprises, de l’artisan à l’ETI en passant par la PME, qui n’exportent pas, et bénéficient des mêmes allègements de charges ? Quelle est l’efficacité réelle de ces allègements sur l’économie (pas loin de 100 Milliards d’euros, plus que le budget de l’Education Nationale, tout de même) ? Cette question est taboue.
Chez certains « économistes » et « experts » bien intentionnés, on vante le système de retraite par capitalisation, sans parler des dégâts potentiels liées au yoyo des cours de bourse, et on invite les actifs à montrer du doigt ces affreux « boomers » qui jouissent grassement de leur retraite en polluant la planète, en appelant à augmenter leur impôt, pour ceux qui en payent, tout en minorant celui des plus aisés (les dernières tranches du barème).
Des pistes bien « contenues »
Au gouvernement, on nous ressort les marronniers habituels, depuis au moins 3 décennies, à savoir la fraude fiscale et la fraude sociale qu’il faut combattre et dont on n’arrive jamais à bout pour des raisons obscures. On nous ressasse également la fameuse saga des niches fiscales, toujours bien protégées par ceux qui en profitent, on vous rassure... On ne croit plus, ni à la volonté, ni à la capacité des gouvernements à s’attaquer à ces questions. Aujourd’hui encore, dans mon quotidien, un article qui va dans le sens de la pensée unique, consacré aux niches fiscales (« les 10 niches fiscales qui pourraient rapporter gros à l’Etat »). A part le crédit impôt recherche qui est cité, ces niches concernent principalement les particuliers, actifs et retraités, c’est très clair !
Et les dépenses de l’Etat et des Collectivités locales ?
Nulle part il n’est question des surcoûts engendré par l’enchevêtrement des compétences entre les collectivités territoriales et pourtant un rapport demandé à un élu local par le Ministère des comptes publics et rendu en 2024 fait état d’un surcoût minimum de 7,5 Milliards d’euros par an (presqu’autant que la niche fiscale du crédit impôt recherche cité dans les pistes d’économies…). Il est vrai que cette gabegie ne concerne que les élus locaux, en recherche, eux de la stabilité pour leurs mandats et de leurs pré carrés locaux.
Parlons des multiples couches du mille feuilles administratif coûteux, avec ses 500 000 élus locaux, système auquel il ne faudrait rien toucher alors même que des rapports et des propositions nous montrent les voies de réforme indispensables ? Chacun dans son couloir, là aussi, aucune réflexion d’ensemble, juste le statu quo, en tapant au passage sur l’Etat qui ne donnerait pas à ces élus suffisamment de moyens pour conserver leurs baronnies.
Au passage, peut être demander à l’Etat de se réformer, de faire des économies sur son propre fonctionnement de revoir les doublons administratifs en regroupant ou supprimant des agences, d’étudier la suppression de normes ? Vœux pieux quand on connait la fragilité du gouvernement menacé par la censure et le climat politique délétère qui prédomine dans le pays qui n’est jamais, bien évidemment, propice à la réforme de l’Etat.
Touche pas à mes privilèges !
Chacun sa partition, chacun une bonne raison de ne pas bouger, de surtout ne rien concéder aux autres. Le pays fonce droit dans le mur, en attendant une nouvelle crise économique ou géopolitique qui nécessitera des mesures drastiques. Tous nos élus, du local au national, seront là pour nous demander en chœur des efforts qu’ils se refusent à faire pour eux-mêmes. La seule boussole qu’ils nous proposent est celle de la procrastination pour eux, et pour les citoyens, du rabot sur les dépenses publiques en coupant les subventions aux associations sportives et culturelles localement, tout en étant d’une écoute exemplaire vis-à-vis des grandes entreprises et de leurs patrons nantis.