Un président honnête…

par Michel DROUET
samedi 3 décembre 2016

Hollande laissera sans doute la trace d’un homme honnête dans la vie politique française et on ne pourra pas lui enlever l’envie de bien faire qui l’a animé, même si comme tous les hommes politiques il aura pris de larges libertés avec ses engagements de campagnes.

En réécoutant le bilan qu’il a dressé lors de son allocution télévisée on peut souscrire à quelques affirmations mais on reste perplexe sur d’autres.

La France plus juste et le modèle social conforté

Hollande nous a parlé des comptes assainis, de l’équilibre de la Sécurité Sociale et de la stabilisation de la dette… Fort bien ! Il faut reconnaître tout de même que tout cela repose sur un équilibre fragile et que la moindre remontée des taux se traduira par quelques milliards supplémentaires sur la dette et que l’équilibre de la Sécurité sociale doit beaucoup aux déremboursements au détriment des français les plus faibles et aux économies drastiques dans les hôpitaux.

Les départs en retraite anticipés et la complémentaire santé pour tous sont une réalité et seront mis à l’actif du bilan présidentiel

L’école

Mettre des moyens supplémentaires ne suffira pas à redresser le niveau des élèves français bon derniers en Europe sur les mathématiques et pas très bon en Français et en langue. Il aura manqué une révolution complète au Ministère de l’Education noyauté par le pédagogisme et peuplé de « sachants » au sabir déconnecté des réalités.

Les libertés

Oui, le mariage pour tous, l’égalité homme/femme ainsi que les luttes contre les discriminations ont connu des avancées notables pendant ce quinquennat et cela doit être mis à l’actif de Hollande et de son gouvernement.

On mettra tout de même au débit le calamiteux projet de déchéance de nationalité qui a provoqué le départ de Mme Taubira.

La modernisation de la démocratie

D’accord pour dire qu’il y a eu des avancées réelles en matière de non-cumul des mandats. Le hic, c’est que l’application de cette loi a été prévue en 2017, c’est-à-dire qu’elle n’a aucune chance de voir le jour avec le retour de la droite au pouvoir.

La réforme des collectivités territoriale est un véritable échec : brouillonne en début de mandat (fin des conseillers territoriaux initiés par Sarkozy) elle a tourné ensuite à la cacophonie avec la disparition annoncée puis le maintien des départements pour aboutir à quelques transferts de compétences cosmétiques et le maintien de conseils départementaux inutiles.

La réforme des régions est incompréhensible et ne produira aucune des économies annoncées, mais plutôt des surcoûts.

En filigrane de cette réforme territoriale on perçoit le refus net des partis et le corporatisme des élus de voir diminuer le nombre de mandats, alors que le pays est suradministré et que cela coûte très cher aux contribuables.

Total manque de fermeté de Hollande sur le sujet et très mauvais bilan.

Le monde, l’Europe et la France

On reconnaîtra à François Hollande les initiatives prises pour combattre le terrorisme, hors et à l’intérieur de nos frontières. Cela s’est traduit matériellement par des recrutements dans l’armée, la police et la gendarmerie mises à mal pendant le précédent quinquennat et également par une posture adaptée à la situation intérieure.

Par contre, s’agissant de l’Europe, on ne retiendra que le suivisme vis-à-vis de l’Allemagne et à la doctrine libérale de la commission européenne. On regrettera également la posture vis-à-vis de la Grèce, totalement dévastée après les injonctions de la commission.

On regrettera surtout que la grande envolée du Bourget sur « la renégociation du traité européen » soit restée lettre morte alors même que l’Europe, s’apercevant aujourd’hui des méfaits de l’austérité, s’apprête à desserrer les cordons de la bourse. On aurait pu gagner 4 ans…

L’économie

C’est le gros point noir, celui qui par ses effets mortifères annule tous les acquis dans les autres domaines.

Comment parler de « modèle social conforté », « d’accroissement des libertés » de « modernisation de la démocratie » lorsque la première des libertés est celle de subvenir à ses besoins sans assistance, uniquement par le fruit d’un travail ?

Hollande a donc fait une « politique de l’offre », qui a consisté à déverser sans nuances et sans obligations des milliards aux entreprises au travers du pacte de responsabilité et du CICE en ponctionnant les ménages par une augmentation des impôts.

Echec cuisant, parce que ces milliards ne sont pas allés à l’emploi ou bien de manière marginale. On estime à 100 000 emplois les effets des mesures.

Les actionnaires des entreprises disent merci à François Hollande, car ils ont vu augmenter leurs dividendes de manière notable en 2015.

Hollande, par naïveté, par excès de confiance vis-à-vis du Médef ou simplement par soumission au monde économique aura totalement raté sa politique.

L’espoir de millions de chômeurs s’est fracassé sur cette erreur majeure du quinquennat.

Pour le reste, François Hollande fut un Président honnête, sans doute plus que ses prédécesseurs. Il n’aura cependant pas pu résister au corporatisme des grands corps en particulier celui de la fameuse promotion Voltaire de l’Ena, se coupant ainsi des forces vives du pays.


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