Un Tony Blair en France ?

par Jimd
lundi 14 mai 2007

Après dix ans au pouvoir, Tony Blair se retire le 27 juin prochain. Révolutionnant son parti, son pays et certaines gauches européennes, il est un personnage politique central en Europe... paradoxe pour un Royaume-Uni toujours frileux à l’égard de l’Union. À travers ses succès et échecs et selon ses propres convictions politiques, on peut tracer de lui un portrait en demi-teinte. Je voudrais, en revenant sur quelques éléments de son parcours, en effleurant la surface du Blairisme, comprendre l’impact qu’il peut avoir sur notre paysage politique.

Il arrive au pouvoir en 1997, à 43 ans. Il est la tête du Labour le parti "de gauche" qui n’est plus au pouvoir depuis dix-huit ans. Les conservateurs ont mené pendant ces années une politique dure et austère, incarnée par madame Thatcher. Une politique jugée nécessaire par une situation économique et industrielle désastreuse à la fin des années 70. Avec Tony Blair, c’est un leader extrêmement populaire qui arrive au pouvoir, et un nouveau labour, une nouvelle manière d’aborder les problèmes économiques et sociaux, une nouvelle vision politique promettant de maintenir un taux d’imposition assez bas tout en investissant dans les services publics.

L’impact de Blair est tellement important là où, au début de son mandat, on parlait de new labour, on utilise maintenant le terme de Blairisme. Mais qu’est-ce que cette nouvelle gauche ? Il y a eu beaucoup de commentaires en France sur cette nouvelle gauche en France peut-être parce que chez nous se pose toujours la question de ce que sont les valeurs de gauche. Est-ce une gauche ayant viré sa cuti pour se rallier aux idées de droite ? Est-ce du libéralisme pur et dur ? La réalité est bien sûr complexe. Reprenons quelques faits de ces dix années de "Blairisme", parfois assez contradictoires.

Impact social et économique :
- Création d’emploi dans la fonction publique
- Doublement du budget de l’éducation et triplement du budget de la santé


- Investissement dans les transports
- Indépendance de la Banque d’Angleterre.
- Instauration en 1999 d’un salaire minimum. On retrouve, à la fois, un renforcement du rôle de l’Etat (bien que sa réforme sociale (welfare state) fût incomplète), mais aussi une vision moderne de la réalité économique. : l’indépendance de la Banque centrale.

Impact international :
- Réconciliation en Irlande du Nord
- Engagement en Irak L’histoire récente fait peser un poids important sur ce dernier point, un échec qui entache son départ. Nous sommes face à un bilan contrasté avec, certes, une prospérité mais qui a peut-être plus bénéficiée aux catégories aisées. Mais malgré ce contraste, le style Tony Blair, l’abandon de certaines idéologies en matière

Nos Leaders et Tony Blair

On trouve souvent des exercices de comparaison, des parallèles entre Tony Blair et les leaders politiques français. Qui sera le Blair a la française ? Je crois que nous n’avons pas eu d’équivalent en France, tout simplement parce que nous n’avons pas eu non plus de Thatcher.

Nicolas Sarkozy ?

Il est vrai que son dynamisme peut rappeler celui de Tony Blair qui démontrait aussi cette volonté, cette énergie à vouloir changer le pays. Une différence quand même : Tony Blair avait 43 ans au moment de sa prise de pouvoir et pas de responsabilités politiques passées comme c’est le cas pour Nicolas Sarkozy. Une autre différence. La droite en France est au pouvoir depuis des années, avec quelques cohabitations. Le labour de Tony Blair avait été sevré de pouvoir. Le dynamisme de Tony blair, son envie de changer, de faire bouger le pays, était d’autant plus fort que l‘emprise des conservateurs avait été grande. D’autre part, la base électorale de Nicolas Sarkozy n’est pas du tout la même que la base électorale populaire qui a porté Tony Blair au pouvoir il y a dix ans. L’électorat de Nicolas Sarkozy reste un électorat traditionnel de droite en grande partie.

Un Tony Blair français à gauche ?

 !..... Tony Blair avait décomplexé la gauche anglaise, en proposant une manière moderne d’aborder les questions économiques, en acceptant l’économie de marché sans renier ses bases sociales. Le PS se débat une fois encore entre coup de barre à gauche derrière Laurent Fabius et tentative timide de social-démocratie. Et surtout ne pas associer les mots ‘social-libéral’. Libéral... un gros mot. Au-delà de ces considérations, je pense que le PS se retrouve face au vent, incapable de virer et d’engager un cap car il y a eu en face un leader mou, et pas une Thatcher. Le new labour est né en réaction à la politique de Thatcher et, comme dans tout phénomène d’action/réaction, son ascendance dans la politique britannique n’a été que rendue plus forte par la dureté de la ligne thatchérienne. Ce new labour incarnait la volonté de trouver un équilibre entre le conservatisme de Madame Thatcher et les politiques sociales trop orientées vers les syndicats qui avaient caractérisé le parti travailliste auparavant, ouvrant d’ailleurs le champ aux conservateurs. Tony Blair n’avait pas un important ancrage dans son parti et rejetait la doctrine socialiste préférant se placer dans un centre gauche modéré. Il a profondément modifié la ligne de son parti qui auparavant faisait appel à l’Etat pour résoudre les problème sociaux. Je ne vois pas de leader "à la Blair" dans le PS englué dans ses querelles, débats, et idéologies sclérosantes.

Au lendemain de l’élection, le leader politique actuel en France est Nicolas Sarkozy. Peut-être empruntera-t-il au Blairisme certains axes comme la conciliation du social et une vision plus libérale de l’économie. Mais je pense que nous sommes face a un "animal politique", qu’on le supporte ou non, qui indéniablement marquera la politique en France pour cinq à dix ans. Les leaders naissent souvent en réaction à des situations ou à d’autres leaders. Je pense donc l’émergence d’un leader à gauche que l’on puisse comparer à Tony Blair prendra plusieurs années le temps à notre nouveau président de mettre son empreinte et générer des réactions. Un Tony Blair en France....peut être, mais pas avant cinq ans.

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