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par Orélien Péréol
samedi 19 mars 2022

Maintenir la Terre en état de nous maintenir devrait être la consigne mondiale de la politique humaine. Ce n’est pas le cas : pendant la fin de l’humanité sur Terre, les travaux et les guerres continuent comme à l’accoutumée.

La politique telle que nous la connaissons ne nous laisse pas de répit. Après la chute du communisme, certains annonçaient la fin de l’Histoire. Il n’y aura de fin de l’Histoire qu’avec la fin de l’humanité. Ça vient, ça vient. Pas d’impatience à avoir… ça vient… Pas par des mécanismes internes d’une Histoire qui aurait un sens, et qui aurait enfin réalisé son but ; qui serait comme un voyage : l’humanité aurait atteint le lieu de sa villégiature et poserait ses valises pour vivre en paix, de l’air du temps, de la chaleur, du soleil, de l’amitié, de jeux, de farniente et d’apéros... etc.

La fin de l’Histoire qui vient procède de l’épuisement des ressources en amont et de la salissure généralisée de l’espace, de l’air, en aval de son envahissement par des molécules inutiles pour nous et que nous libérons dans l’atmosphère qui prend une sale gueule (d’atmosphère).

Nous devrions tout lâcher pour honorer cette seule tâche : maintenir la Terre en état de nous maintenir. Nous devrions cesser toutes nos vieilles disputes, nos ressentiments de jaloux, nos appartenances locales et les exclusions qui vont avec (« les imbéciles heureux qui sont nés quelque part » de Georges Brassens 1972). Il nous faudrait résilier tous nos vieux contrats pour garder une chance de rester sur ce petit vaisseau spatial qui ne grandit pas avec nous, il ne grandit pas quand nous augmentons notre nombre et quand nous augmentons nos ponctions de toute sorte de choses du sous-sol… il n’est pas solidaire, il n’arrive pas à les refaire assez vite !

Que ce soit dans les grandes ou les petites choses, ce n’est pas ce que nous faisons, nous ne résilions pas, au contraire.

Petite chose : on nous présente la météo comme si nous étions des vacanciers : le soleil c’est bien, la température haute, c’est bien… Le vent, la pluie, pas bien ; le froid, on n’en parle même pas, une horreur…

Chose moyenne : le djihad n’en finit pas, nous ne le voyons que lors des agressions, qui pointent de temps à autre, mais pour qu’elles pointent de loin en loin, il faut bien qu’il y ait une veille permanente, une « vieille taupe » quelque part. Un djihadiste Franck Elong Abe agresse un indépendantiste corse, Yvan Colonna. Ce dernier, au moment où j’écris est entre la vie et la mort. Les deux causes de ces prisonniers, l’islamisme et l’indépendance de la Corse, sont d’une étrangeté absolue entre elles, sont incommensurables, elles n’ont aucun terrain commun possible ni dans les idées, ni dans leur « nature » : en prison, le militantisme d’Yvan Colonna cesse, il n’a plus d’objet ; l’islamisme de Franck Elong Abe continue et l’anime toujours autant. C’est comme si ces deux causes étaient sur deux planètes, deux planètes en bonne santé qui peuvent porter sans dommage ce type de conflit. La Corse s’enflamme…

Grande chose : L’Histoire vient de reprendre une tournure que l’on croyait avoir rendu impossible : la guerre entre pays occidentaux, anciens, développés, créateurs de cultures importantes en nombre d’œuvres d’art, de littérature, de philosophie, de musique, d’architecture, de sciences et de techniques, adoptés partout et par tous… et en influence sur les autres cultures ; la guerre portée par le désir de guerre d’un dirigeant violent.

Les guerres se passaient dans des pays qui n’avaient pas une grosse empreinte sur l’Histoire du monde. Loin, cela paraissait peu, très peu, marginal, et pour certains en diminution constante. Qui dit permanente diminution prédit disparition à terme, sauf si on met fin à ladite diminution.

La menace atomique jouait son rôle dans la distribution des guerres dans les pays moins développés (ils n’avaient pas cette bombe !). Incroyable surprise : une guerre territoriale, comme au XXème siècle (bombardements des villes et avancée des chars) se déroule entre deux pays développés, comme un retour en arrière, sur un sol quasi européen (en tout cas, on peut s’y rendre en voiture). Ces progrès socio-politiques (démocratie, droits de l’homme, État-providence…) n’étaient pas acquis comme ils avaient l’air de l’être !

Retour du même avec en plus, un léger décalage temporel en arrière (énorme pour nous, mais à l’échelle de l’Histoire de l’humanité, très court).

 

Rien ni personne dans la campagne présidentielle ne traite de ce qui est notre problème commun, notre res-publica. Il est très probable que le président Macron soit reconduit : il n’y a rien dans son programme qui ait à voir avec ce qu’il serait important de faire. L’écologiste Jadot n’arrive pas à se faire entendre. Tous les candidats ont un traitement de l’écologie, qui relève de la bonne conscience, plus ou moins épaisse en mesures concrètes et applicables.

Il faut éteindre le maximum de feux. Ne pas faire autant d’emballages à jeter, moins prendre l’avion, refaire circuler les trains, créer de nouvelles lignes… etc. Dépenser moins la Terre et son atmosphère, dépense qu’on ne calcule pas dans notre « science » économique.

Les mesures liées au covid ont obligé à la réalisation de ce qu’il faut faire. Après, tout est reparti comme avant : plus on extrait de matières de la planète, plus on consomme de mouvements, de mobilités… mieux c’est ! On se réjouit du retour de la croissance !

Dix mesures, liées cette fois à l’envahissement de l’Ukraine par la Russie, sont proposées par l’AIE, Agence Internationale de l’Énergie et sont de l’ordre de ce qu’il nous faut faire pour avoir de la postérité : rouler moins, rouler moins vite, télétravailler 3 jours par semaine… Ces consignes sont données par rapport à la dépendance de la France envers la Russie en matière énergétique. Or, cela dépasse immensément le cadre de la guerre en Ukraine, ce sont des mesures permanentes qu’il faudrait augmenter un peu chaque année.

C’est de fait la seule chose qui compte, qui a de l’importance pour nous, frères humains, qui sur la Terre vivez : Maintenir la Terre en état de nous maintenir.


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